Intervention de Alima Boumediene-Thiery

Réunion du 10 septembre 2010 à 15h00
Orientation et programmation pour la performance de la sécurité intérieure — Article 32 ter A

Photo de Alima Boumediene-ThieryAlima Boumediene-Thiery :

Nous en revenons à la question des Roms, qui occupe le devant de l’actualité.

À une époque où le pouvoir administratif et politique se substitue toujours plus au pouvoir judiciaire indépendant, l’article 32 ter A vient porter une attaque supplémentaire contre les gens du voyage. Il conforte la politique scandaleuse d’évacuation forcée des campements illicites conduite par le Gouvernement.

La loi du 5 juillet 2000 relative à l’accueil et à l’habitat des gens du voyage, modifiée par la loi du 5 mars 2007 sur la prévention de la délinquance, prévoit, dans son article 9, une procédure spécifique d’évacuation des campements illicites dans les communes respectant leurs obligations en matière de création d’aires d’accueil pour les gens du voyage.

En d’autres termes, seule une procédure exceptionnelle, décidée par le préfet, peut aujourd’hui s’appliquer dans les communes qui respectent leurs obligations. Il s’agissait d’une contrepartie qui avait pour objectif de motiver les communes à s’investir dans l’aménagement d’aires d’accueil.

Or l’article 32 ter A tend à étendre la procédure d’évacuation à toutes les communes, indépendamment du fait qu’elles respectent ou non les obligations prévues dans la loi de 2000. Cela revient, dans la pratique, à vider de sa substance le dispositif voté en 2000 : désormais, toutes les communes pourront demander l’évacuation forcée de leur terrain.

Cette procédure, je le rappelle, était pourtant supposée inciter les communes à créer des aires d’accueil en subordonnant le concours du préfet au respect de cette obligation. Ce « verrou » incitatif, l’article 32 ter A le fait sauter : d’un coup de plume, vous videz de sa substance la loi de 2000 en proposant une procédure d’évacuation forcée « clé en main ».

Cette disposition, extrêmement grave, cautionne l’inertie, pour ne pas dire qu’elle encourage les communes à ne plus créer d’aires d’accueil pour les gens du voyage : désormais, toutes les communes seront traitées de la même manière.

Monsieur le ministre, avec cette décision, le Gouvernement donne un tour de vis supplémentaire à sa politique de haine et, par une nouvelle stigmatisation, il continue à nourrir la xénophobie et l’exclusion. Au lieu de chercher à inciter les communes à accueillir les gens du voyage, à respecter leurs obligations, le Gouvernement les invite pratiquement à violer la loi. Il construit une politique de rejet, de stigmatisation, d’exclusion honteuse fondée sur la misère de personnes qui, souvent, où qu’elles aillent, sont déjà rejetées comme des parias !

L’article 32 ter A participe à une véritable ségrégation ethnico-territoriale en exonérant totalement les communes de leur obligation de création d’aires d’accueil. Avec cet article, la loi de 2000 devient une coquille vide : c’est un véritable scandale. Les communes qui ont investi dans des aires d’accueil se trouvent désormais sur le même plan que celles qui n’ont rien fait : c’est tout simplement injuste !

Mes chers collègues, nous vous demandons de refuser ce marché de dupes, afin que les gens du voyage ne soient pas, une nouvelle fois, les boucs émissaires d’une politique humaine maintenant très dangereuse.

Je vous invite donc à adopter notre amendement de suppression de l’article 32 ter A et d’en rester aux dispositions de la loi du 5 juillet 2000 qui, si elles sont respectées, offrent une réponse adaptée à l’accueil des gens du voyage.

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