Aujourd'hui, deux tiers des conjoints travaillent dans l'entreprise familiale, et seulement 10 % d'entre eux bénéficient d'une pension de retraite.
Deux femmes sur trois travaillent donc aux côtés de leur mari entrepreneur. Le plus souvent, elles ne sont ni salariées ni associées. Elles tiennent la comptabilité, rédigent les devis, répondent au téléphone, traitent le courrier et font bien d'autres tâches. Il s'agit d'un travail non négligeable estimé à six heures par jour.
Mais cette aide invisible est lourde de conséquences. Non salariées, elles ne peuvent toucher ni allocations chômage, ni indemnités en cas de licenciement, de maladie ou de maternité, ni retraite personnelle. Et, en cas de décès de leur mari ou en cas de séparation, elles se retrouvent sans ressources et privées de droits sociaux.
Les conjointes sont présentes dans 51 % des entreprises du bâtiment, 74 % des commerces alimentaires, 35 % des commerces non alimentaires et 61 % des cafés-hôtels-restaurants.
Afin que le travail du conjoint et que ses droits soient reconnus, le droit actuel lui offre trois possibilités, soit trois statuts différents, dont le choix dépend parfois de la forme juridique de l'entreprise : celui de conjoint collaborateur, celui de conjoint salarié ou encore celui de conjoint associé.
Il est très difficile d'estimer le nombre potentiel de conjoints pouvant relever de l'un de ces statuts, puisque les caisses de retraite des professionnels ne connaissent pas le nombre d'ayants droit, ceux-ci relevant de la CANAM.
Il est difficile d'évaluer exactement le nombre actuel de conjoints collaborateurs en raison tant du caractère facultatif de la déclaration d'activité que du caractère volontaire de l'adhésion à l'assurance vieillesse et d'invalidité-décès. Les centres de formalités des entreprises recensent 43 500 conjoints mentionnés comme collaborateurs, dont seulement 9 500 cotisent à l'assurance volontaire. Toutefois, ces chiffres sont très réducteurs par rapport à la réalité. Le ministère en charge des PME estime que le nombre de conjoints exerçant une activité professionnelle de manière régulière et susceptibles d'opter pour le statut de conjoint collaborateur serait de l'ordre de 10 000 à 20 000 personnes.
Pour l'ensemble de ces raisons, le projet de loi mentionne une obligation de choix entre l'un des trois statuts. Il faudra que ce choix soit enregistré par mention au registre du commerce et des sociétés, au registre des métiers ou à l'URSSAF.
Il s'avère, en effet, que, avec le système facultatif actuel, dans un grand nombre de cas, aucun choix statutaire n'est effectué par le conjoint du chef d'entreprise. Il est alors un conjoint collaborateur, mais, faute d'être défini comme tel juridiquement et d'avoir adhéré aux assurances sociales volontaires, il ne lui est reconnu aucun droit propre, notamment en matière d'assurance vieillesse et de décès-invalidité. Lorsque la situation de l'entreprise évolue défavorablement ou que la relation matrimoniale se rompt, le conjoint se trouve placé dans un état d'insécurité déplorable.
Avec le nouveau dispositif proposé, le conjoint collaborateur bénéficiera enfin d'un réel statut lui ouvrant des droits professionnels et sociaux, que les articles suivants du projet de loi s'attachent à préciser.
Je voudrais donc saluer l'initiative du Gouvernement d'instaurer un véritable statut pour les conjoints de chefs d'entreprise travaillant dans l'entreprise familiale. Il était visiblement attendu depuis longtemps.
Il est à noter que le conjoint collaborateur se verra ouvrir un droit à la formation professionnelle et à la validation des acquis de l'expérience.
Le texte prévoit également la création d'un contrat de travail et d'un statut pour celle ou celui qui collabore avec son conjoint exerçant une profession libérale.
Enfin, la commission des affaires économiques a décidé d'assimiler les collaborateurs, concubins de chef d'entreprise, ou liés à ce dernier par un pacte civil de solidarité, au conjoint du chef d'entreprise.
Nous voterons donc, avec beaucoup de satisfaction, cet article 10 qui donnera à de nombreux conjoints de chef d'entreprises un statut réellement protecteur ainsi qu'une véritable reconnaissance pour le rôle qu'ils ou, plutôt, qu'elles accomplissent pour la bonne marche de l'entreprise familiale. Cette mesure vise, par là même, à l'amélioration de la situation des femmes dans la société.