Intervention de Gérard Le Cam

Réunion du 14 juin 2005 à 21h45
Petites et moyennes entreprises — Articles additionnels avant l'article 27 ou après l'article 37

Photo de Gérard Le CamGérard Le Cam :

L'examen de cet article additionnel anticipe le débat que nous aurons jeudi sur la proposition de loi tendant à garantir l'équilibre entre les différentes formes de commerce, texte qui aurait dû être intégré à celui-ci.

La question des concentrations en matière d'équipement commercial est posée depuis de longues années. En effet, malgré la loi Royer de décembre 1973 et la loi Galland, malgré la mise en oeuvre de la loi sur les nouvelles régulations économiques, le mouvement continu des concentrations commerciales se poursuit, les principaux groupes de la grande distribution investissant désormais toutes les régions de notre pays, en prenant position sur tous les segments de clientèle.

Le développement des études stratégiques de marché a notamment conduit les opérateurs de la grande distribution à organiser entre eux une forme de « partage de territoire », certains groupes étant particulièrement présents, sous l'enseigne de leurs super et hypermarchés respectifs, dans des régions bien précises.

De la même manière, lorsque les conditions sociales sont réunies, c'est-à-dire en particulier lorsque le revenu des ménages dans la zone de chalandise est plutôt modeste, les groupes de la distribution investissent les territoires avec leurs propres enseignes de magasins de maxi discompte, en vue de réaliser, au plus près de la clientèle disponible et sans être contraints de passer par les mêmes procédures que pour les grandes surfaces en ce qui concerne l'implantation, le maximum de rendement.

On sait d'ailleurs, à la lecture des comptes sociaux des entités « maxi discompte » des grands groupes de la distribution, que c'est ce créneau de magasins qui dispense aujourd'hui la plus importante rentabilité.

On connaît le prolongement concret de ce processus. La grande distribution exerce aujourd'hui une prédominance exorbitante de ses positions sur l'ensemble des produits, qu'il s'agisse de la distribution de l'alimentaire ou des produits domestiques, et a pratiquement procédé à l'élimination de toute concurrence dans le champ de la diffusion des produits culturels.

Pour bien des aspects, l'affirmation de la libre concurrence procède d'ailleurs dans notre pays de la clause de style ou de la vue de l'esprit, et peu de choses viennent contrebalancer le poids déterminant des entités que constituent les Carrefour, Auchan ou autres dans le domaine de la distribution commerciale.

Il nous semble donc - et je constate d'ailleurs que cette préoccupation est assez partagée - qu'il est temps de permettre aux élus locaux de disposer de nouvelles prérogatives en matière d'urbanisme commercial.

La pérennité du commerce de proximité, qui est d'ailleurs directement combattu par les enseignes de la grande distribution qui ont opté pour ce « format » de magasin, n'est pas qu'une question de vieillissement des exploitants, elle est aussi pleinement liée à la réalité des concentrations et des moyens dont disposent les grands groupes de la distribution pour affirmer leur prédominance.

C'est parce que les grands groupes capitalisent et attirent la plus grande partie de la clientèle que les commerces de proximité périclitent, sauf à oeuvrer en direction de segments de clientèle plus fortunée, recherchant une qualité de produits pour laquelle elle est prête à payer le prix fort, notamment en milieu urbain.

Nous refusons que l'avenir du commerce dans notre pays se résume à un partage entre, d'une part, des grands groupes de la distribution, présents par leurs hypermarchés auprès de la clientèle moyenne et laissant leurs magasins de maxi discompte dans les zones de chalandise les plus déshéritées, et, d'autre part, quelques commerces de proximité présents dans les quartiers les plus favorisés, en direction d'une clientèle « choisie ».

C'est donc sous le bénéfice de ces observations que nous vous invitons à adopter cet amendement relatif aux concentrations.

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