L'article 41 du présent projet de loi porte sur la programmation effective de la construction de logements sociaux pour les cinq années de mise en oeuvre du présent texte.
Les objectifs fixés par l'article sont relativement lisibles et susceptibles de fournir une forme de symbolique propre à cette loi de programmation. C'est là un objectif en apparence ambitieux, et surtout largement supérieur à la réalisation des dernières années, puisque, depuis plusieurs exercices, nous sommes sur un cycle de construction d'environ 50 000 à 55 000 nouveaux logements locatifs sociaux. Le goulet d'étranglement de la demande s'enserre d'autant plus que le sensible ralentissement de la construction de logements en accession, par le biais du prêt à taux zéro, consacre la persistance d'une demande insatisfaite allant sans cesse croissant.
Nous nous trouvons dans une situation où seul l'investissement locatif privé, à loyers répondant aux seuls critères de marché, est en progression. Mais ces prix étant discriminatoires, les listes d'attente s'allongent aussi sûrement que progresse la rentabilité de ces investissements.
L'effort que le Gouvernement entend mener en matière de construction sociale est en apparence important. Pour autant, les véritables moyens financiers nécessaires à sa mise en oeuvre ne sont manifestement pas réunis.
Cet effort annoncé par le Gouvernement est en effet largement dépendant de bien des facteurs, qu'il s'agisse du coût du foncier, comme de la bonne volonté des élus locaux, dans le cadre des compétences des structures intercommunales, à prévoir effectivement la réalisation de logements sociaux dans leurs opérations d'urbanisme - et on a bien vu tout à l'heure que, quand on parlait de logements sociaux, on ne parlait pas des prêts locatifs sociaux, les PLS.
Mais il dépend aussi étroitement de la capacité financière des opérateurs eux-mêmes, de l'engagement des organismes collecteurs du 1 %, et de celui des collectivités locales, dans le cofinancement des opérations menées dans le cadre de la loi de programmation.
On peut même craindre que cela ne conduise, faute de pouvoir effectivement bousculer les plans de financement, à ne pas atteindre les objectifs visés. En bout de loi de programme, en effet, 482 millions d'euros en autorisations de programme seraient mobilisés pour la réalisation de logements.
Or, ce montant est à rapprocher des sommes consacrées à la ligne prêt locatif aidé-prime à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale, ou PLA-PALULOS, qui se situait, avant l'exercice 2004, sur des bases extrêmement proches. L'Union sociale pour l'habitat regrette d'ailleurs que la loi de programmation ne permette pas de faire autre chose que de rattraper le retard accumulé. Pour sa part, le Conseil économique et social, dans le rapport Prud'homme, relève que les besoins de logements, pour faire face à la demande urgente et rattraper le retard, se situent au niveau de 120 000 constructions neuves.
Le compte n'y est pas, hélas ! avec cet article 41, malgré bien des apparences séduisantes, reconnaissons-le. Il faut aller plus loin et programmer un volume plus conséquent de constructions neuves, tandis que le parc privé doit être au plus libéré de l'application de la seule loi du marché.
Notre amendement vise donc clairement à lever les incertitudes, nées d'un bouclage hasardeux du plan de financement de la programmation, et à situer les besoins au niveau requis par la crise du logement que connaît notre pays. Et quant aux coûts, 200 à 300 millions d'euros annuels en plus pour le logement social, ce n'est finalement que relativement peu au regard, entre autres, de la dépense fiscale engendrée par l'aide à l'investissement locatif privé.