Madame la secrétaire d'État, je tiens tout d’abord à saluer la mobilisation du Gouvernement et votre volonté de faire bouger les choses.
Un premier plan Autisme 2005-2007 a permis la création de 2 600 places en établissements. Le second plan, élaboré avec les familles et les associations, tente d’apporter non seulement des solutions quantitatives, avec 4 100 places supplémentaires, mais également qualitatives, avec un dispositif de dépistage, d’accompagnement et de prise en charge. La France est dramatiquement en retard dans la prise en charge de l’autisme, qui concerne plus de 100 000 personnes.
J’aborderai devant vous les principales difficultés rencontrées par les familles, et que j’avais déjà évoquées lors de la présentation de mon rapport préalable à la loi du 11 février 2005.
Concernant le dépistage, l’autisme peut être détecté tôt, dès l’âge de dix-huit mois. Or les médecins ne sont pas suffisamment formés, ce qui est très grave. On le sait, une prise en charge précoce de l’enfant peut lui permettre de réaliser des progrès significatifs dans le développement de ses capacités cognitives et sociales pour récupérer notamment certaines fonctions, tel le langage.
Par ailleurs, le problème crucial rencontré par les familles est le manque de places d’accueil.
Les résultats sont encore très insuffisants. Ne pouvant trouver une structure, nombreuses sont les familles faisant le choix de placer leur enfant en Belgique, malgré l’inconvénient de la distance. J’estime, pour ma part, que cette situation est indigne d’un pays comme le nôtre.
En février dernier, la députée Cécile Gallez, résidant aux confins de la Belgique, a publié un rapport faisant le point sur cet état de fait. Elle décrit un meilleur accompagnement belge.
Tout d’abord, sur le plan scolaire, la prise en charge des enfants autistes considérés intégrables par la commission d’autonomie y est plus rapide : l’enfant passe en consultation devant un psychologue et est aussitôt inscrit dans une école spécialisée.
En France, l’intégration d’un enfant est plus longue et plus compliquée. Les maîtres ne sont pas assez formés, et il n’y a pas suffisamment d’auxiliaires de vie scolaire, les AVS. La formation des AVS consiste en une information générale sur le handicap, ce qui n’est pas satisfaisant vu les spécificités de l’autisme.
Si, en application de la loi du 11 février 2005, le nombre d’inscriptions à l’école a augmenté, la scolarisation effective de ces enfants reste toutefois encore insuffisante en France.
À Paris, ville de plus de deux millions d’habitants, le nombre d’enfants autistes scolarisés est le même qu’à Mons, ville belge qui ne compte que 97 000 habitants ! J’ajoute que d’autres pays ont mieux aménagé la scolarisation des enfants autistes.
Ainsi, en Italie, les effectifs des classes qui accueillent ces enfants sont divisés par deux. En Belgique, les classes comprennent au maximum huit enfants. En Suède, tous les enfants autistes sont scolarisés.
Par ailleurs, les instituts médico-éducatifs ne sont pas assez nombreux ; l’accompagnement est souvent meilleur dans les institutions belges.
Tous les spécialistes s’accordent à reconnaître l’importance de la famille dans l’évolution de l’enfant. Les institutions belges s’ouvrent aux familles, tant aux parents qu’à la fratrie, cheminant véritablement en commun. Le système, d’une grande souplesse, permet d’accueillir l’enfant en internat en période de crise ou, à l’inverse, de soutenir un retour dans la famille quand cela va mieux. Les structures, souvent de petite taille, tentent d’assurer une prise en charge à long terme, ainsi qu’une recherche de solutions pour l’avenir de l’enfant.
Le plan Autisme, qui prévoit de créer des places, doit donc s’inspirer du système belge, c’est du moins notre avis. Les familles comme les professionnels sont, dans leur ensemble, persuadés qu’il n’existe pas, pour le moment, une méthode unique qui serait applicable avec efficacité à tous les autistes. D’ailleurs, existe-t-il un autisme ou des autismes ?
Le président du groupe de suivi scientifique sur l’autisme nous a expliqué lors d’une table ronde organisée l’année dernière par la commission des affaires sociales que, sur 100 personnes arrivées à l’âge adulte, 15 mènent une vie normale, entre 30 et 35 peuvent exercer une activité dans un lieu protégé et vivre dans un logement autonome, mais en étant aidées, 30 ont une activité non rentable et ont besoin d’aides ponctuelles, et 20 sont très dépendantes.
Il faut pouvoir répondre à ces différentes situations en diversifiant les types de structures créées. Il faut également que les parents soient rassurés sur la prise en charge de leur enfant quand ils ne seront plus là, le plus grave étant sans doute l’insuffisance de la prise en charge des autistes adultes. Il n’existe pratiquement pas d’établissement spécialisé pour eux en France, que ce soit en externat ou en internat.
Or il est reconnu que, sous peine de régression, il faut maintenir un accompagnement éducatif et social avec les autistes adultes : moins de 10 % d’entre eux ont accès à des établissements ou services d’aide par le travail, les ESAT. Que ce soit pour les enfants ou les adultes, le dernier recours reste l’hôpital psychiatrique, alors qu’il est inadapté pour les autistes. Ils arrivent dans la sphère du médical sans avoir participé à de nombreuses actions éducatives spécifiques, et le coût de journée y est élevé.