On se souvient tous du système de dopage institutionnalisé au sein de l’équipe Festina, mais des pratiques organisées de dopage ont aussi été révélées dans le football, par exemple au sein de la Juventus de Turin, à la fin des années quatre-vingt-dix.
Il faut donc aussi sanctionner tous ceux qui composent la chaîne du dopage : les producteurs, les fabricants, les distributeurs - y compris par le biais d’internet, la distribution se faisant plus facilement encore -, les transporteurs, et les revendeurs de substances et procédés dopants. Dans le dopage, il y a des dealers qui, pour l’instant, ne sont pas inquiétés !
Sur ce point, le bilanplusieurs raisons.
Tout d’abord, le trafic de produits dopants n’est pas pénalisé. En effet, pour enclencher une action judiciaire en matière de dopage, il faut aujourd'hui que les produits détenus par une personne soient considérés comme « vénéneux » au sens du code de la santé publique, ou qu’il s’agisse de stupéfiants, dont la détention est pénalement réprimée, ou bien encore qu’il existe des indices très sérieux prouvant que cette personne cède, offre, administre ou applique ces substances à un sportif, ce qui constitue le délit de pourvoyeur, tel qu’il est défini par la loi de 1999.
Toutefois, le nombre de personnes condamnées sur cette base est extrêmement faible. C’est la raison pour laquelle il fallait revoir ce texte pour le rendre plus efficace.
Ensuite, le sportif n’est jamais concerné par les actions judiciaires, il n’encourt que des sanctions sportives telles qu’une rétrogradation, une suspension, voire une radiation. Ainsi, il n’est jamais entendu par les enquêteurs pour donner, par exemple, des informations sur ses sources d’approvisionnement, sauf s’il est volontaire !
En l’état actuel de la législation, le sportif soupçonné ne peut donc être mis en garde à vue et interrogé par les enquêteurs, ce qui, vous le reconnaîtrez, mes chers collègues, constitue une aberration.
La conclusion est simple : il faut une législation pénale spécifique en matière de dopage. Tel est l’objet central du présent projet de loi, qui vise à créer de nouvelles incriminations, pour les sportifs, de détention de produits dopants et, pour ceux qui structurent la filière du dopage, de détention, de fabrication, de production, d’importation, d’exportation et de transport illicites de produits dopants.
La détention de produits dopants pour des sportifs sera punie de un an d’emprisonnement. Concrètement, il s’agit non pas de les condamner, car nous ne souhaitons pas voir des sportifs en prison, mais de pouvoir ouvrir une enquête préliminaire si des raisons sérieuses laissent à penser que les sportifs détiennent de tels produits.
En effet, sans incrimination pénale, il n’y a pas d’enquête préliminaire et, sans enquête préliminaire, il n’y a pas de possibilité d’interroger un sportif en garde à vue. Or c’est justement la garde à vue qui permettra de remonter la filière dopante et, éventuellement, de démanteler le réseau.
De plus, en cas de flagrance, la nouvelle incrimination permettra d’effectuer des perquisitions sur commission rogatoire du juge, ce qui n’était quasiment pas possible jusqu’à maintenant. On a pu le constater l’année dernière sur le Tour de France, après le contrôle positif d’Alexandre Vinokourov : en dépit d’une enquête diligentée par le procureur de la République de Pau, aucune perquisition n’a pu être menée dans l’hôtel de l’équipe Astana, d’autant que, après l’annonce prématurée sur une radio du cas positif de Vinokourov, toute l’équipe avait quitté l’hôtel !
Je suis donc absolument favorable à cette incrimination, dont les conditions d’application peuvent probablement être améliorées. La commission des affaires culturelles a fait quelques propositions dans ce sens.
Je suis également pleinement favorable à l’incrimination de trafic de substances. Elle permettra de sanctionner l’ensemble des acteurs du dopage, du fabriquant au revendeur.
En outre, sur certains points précis ignorés de la loi de 2006, le projet de loi complète très utilement le code du sport, notamment pour renforcer les pouvoirs de l’Agence française de lutte contre le dopage, l’AFLD.
L’Agence avait fait des observations dans son rapport d’activité de 2006, dont quelques-unes ont été reprises par le Gouvernement et l’Assemblée nationale lors de la discussion du texte. Notre assemblée pourra très utilement adopter quelques amendements complémentaires proposés par la commission des affaires culturelles sur ce sujet.
Pour toutes ces raisons, et sous réserve de l’adoption des amendements qu’elle présentera, la commission des affaires culturelles du Sénat s’est déclarée favorable à l’adoption de ce projet de loi.
Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi sur le dopage n’est pas le premier et ne sera pas le dernier car, nous le savons tous, pour lutter efficacement contre ce fléau qui frappe le sport, la législation devra sans cesse être améliorée, afin de s’adapter au mieux aux évolutions, aux pratiques et parfois aux « parades » de tous ceux qui, par le dopage, dénaturent l’éthique du sport et mettent gravement en péril la santé de nos sportifs.