Intervention de Michel Sergent

Réunion du 19 novembre 2010 à 14h30
Loi de finances pour 2011 — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Michel SergentMichel Sergent :

La loi de finances pour 2010 a instauré, sur l’initiative de la majorité et avec le soutien du Gouvernement, la fiscalisation des indemnités journalières des accidents du travail à partir de 2011.

Cette mesure est totalement inacceptable et même choquante. En effet, utiliser le mot « équité », comme le fait la majorité, est une provocation, sachant qu’il existe dans notre pays des niches fiscales représentant près de 75 milliards d’euros en 2010 et, après le léger coup de rabot annoncé, encore 67 milliards ou 68 milliards d’euros en 2011. Et ce ne sont pas les 125 millions d’euros à attendre de cette mesure qui vont permettre de colmater la brèche constatée dans les finances publiques !

En revanche, c’est un signal extrêmement dur qui est envoyé à toutes celles et à tous ceux qui sont qualifiés par la terminologie légale de « victimes d’accident du travail ». Maintenir ce dispositif en l’état, c’est, en réalité, considérer que ce qui arrive à ces personnes est normal, voire banal.

Il convient de rappeler que le revenu de substitution est de l’ordre du 60 % du salaire. Soumettre au surplus cette fraction du salaire à fiscalisation n’est pas admissible.

Nos comptes sociaux sont en déficit de près de 25 milliards d’euros en 2010, ceux de l’État de 150 milliards d’euros. Or les dispositions de la loi en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat, la fameuse loi TEPA, qui entraînent des pertes de recettes fiscales représentant une dizaine de milliards d’euros sont maintenues, alors qu’elles concernent des gens qui vivent de leur rentes, qui ne travaillent pas, qui ne risquent donc certainement pas, eux, d’être victimes d’un accident du travail !

À titre d’exemple, en 2007 – ce sont les derniers chiffres précis disponibles, mais ils ne doivent guère varier pour les années suivantes –, 622 salariés ont péri dans un accident du travail, on a dénombré 720 150 accidents du travail avec arrêt, plus de 35 millions de journées d’indemnisation, et un peu plus de 46 000 accidents ont entraîné une incapacité permanente.

Il s’agit donc bien de victimes, que l’on veut encore doublement victimiser avec la fiscalisation.

Par ailleurs, le Conseil économique, social et environnemental, consulté l’année dernière par le président de l’Assemblée nationale, s’est montré défavorable à cette mesure, aux effets souvent dramatiques : au-delà même des souffrances physiques endurées, les victimes perdent une partie de leurs revenus.

Pour toutes ces raisons, au nom de la justice fiscale et sociale, il convient d’abroger cette mesure inique.

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