Si l’on en croit le rapport du Conseil des prélèvements obligatoires sur les niches fiscales et sociales, une grande partie du déficit public et des déficits de la sécurité sociale provient de l’accumulation des baisses d’impôt, parfois même de leur suppression – la taxe professionnelle, par exemple –, des dépenses fiscales et des régimes dérogatoires concernant l’ensemble des activités économiques.
En 2010, selon ce rapport, plus de 170 milliards d’euros auront été consacrés, dans notre fiscalité et notre système de prélèvements, à alléger les obligations fiscales et sociales des entreprises.
La justification de telles mesures, qui se sont empilées au fil du temps, visant parfois les mêmes objectifs et la même « matière fiscale », est connue de tous.
Quand il s’est agi de réduire l’impôt sur les sociétés, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.
Quand il s’est agi de réduire puis de supprimer la taxe professionnelle, il fallait encourager l’emploi et l’investissement.
La chute du nombre des emplois salariés dans notre pays, le démantèlement d’une grande partie de l’emploi industriel – aujourd’hui, ce secteur recourt si massivement à l’emploi précaire et à l’emploi intérimaire que c’est la qualité de l’emploi en général et la conception même du travail qui sont en péril – semblent des éléments suffisamment évidents pour démontrer que les intentions affichées dans le passé, à l’appui de telle ou telle mesure, ne se sont qu’assez peu traduites dans les faits.
La dépense fiscale consacrée à l’impôt sur les sociétés dite « niche Copé » est relativement importante, de l’ordre de 35 milliards d’euros, soit, pratiquement, la dépense budgétaire du ministère de l’éducation. Mais les régimes particuliers d’imposition se révèlent encore plus coûteux, avec un total estimé à 71, 5 milliards d’euros par le Conseil des prélèvements obligatoires.
En d’autres termes, la niche Copé qui vise à exonérer les plus-values de cession de titres de participation de nos grandes entreprises à vocation transnationale représente un coût de 6 milliards d'euros ! Une telle dépense permet à quelques-unes de nos plus grandes entreprises de vendre à qui elles souhaitent et comme elles l’entendent telle ou telle filiale membre de leur groupe sans avoir à rendre le moindre compte à la collectivité.
En outre, le régime dérogatoire intervient même si la cession de participation se traduit in fine par un plan social de liquidation d’emplois ou d’activité mis en œuvre par le nouveau groupe « propriétaire », aussi rapidement qu’il a acquitté le prix de cession.
Autrement dit, l’opération peut non seulement faire perdre quelques recettes fiscales à l’État – « quelques » n’est-il pas de trop ? – mais également se traduire – c’est d’ailleurs souvent le cas – par un coût social complémentaire supporté par la société dans son ensemble.
Devons-nous continuer à financer, sur les deniers publics, des opérations de restructuration industrielle qui peuvent se révéler mortifères pour l’emploi et l’activité dans notre pays ? Nous ne le pensons pas. D’où notre amendement.