Intervention de Dominique Voynet

Réunion du 26 avril 2010 à 15h00
Grand paris — Article 20 et annexe A

Photo de Dominique VoynetDominique Voynet :

L’article 20 vise donc à créer un établissement public de l’État à caractère industriel et commercial, dénommé : « Établissement public de Paris-Saclay ».

Ce territoire, dont nous débattrons durant les heures qui viennent, nous le connaissons bien. Il se caractérise par la présence de terres agricoles, de bois, de vallées, de pôles technologiques et d’enseignement. Les « pays de Saclay », comme on dit, sont formés par l’ensemble des territoires et des communes ayant des liens avec le plateau et les vallées environnantes dans les départements de l’Essonne et des Yvelines.

Mes chers collègues, en un mot, nous ne voyons pas l’intérêt de créer un tel établissement.

Tout d'abord, les collectivités territoriales jouissent du principe de libre administration ; elles sont à même d’aménager leur territoire et elles n’ont guère besoin d’une structure supplémentaire dirigée par l’État.

Ensuite, l’histoire du plateau est différente de celle des autres parties du territoire de l’Île-de-France : alors que, dans notre région, le fait intercommunal s’est imposé lentement et malgré des résistances, il n’en a pas été de même autour de Saclay. On a cité tout à l'heure les quatre communautés d’agglomération du plateau, à savoir Saint-Quentin-en-Yvelines, Versailles-Grand Parc, Plateau de Saclay et Europ’Essonne.

Tout se passe finalement comme si l’État adoptait à l’égard de cette organisation intercommunale une attitude ambivalente : d’un côté, on encourage l’intercommunalité et, de l’autre, on semble craindre la montée en puissance d’une expression autonome de communautés d’agglomération prenant la mesure des enjeux de leur développement et travaillant d’égal à égal avec l’État.

Comme l’ont souligné avant moi Catherine Tasca ou Claire-Lise Campion, les dispositions de cet article nient, me semble-t-il, des pratiques mises en œuvre sur ce territoire depuis de nombreuses années puisque l’État reprend le pouvoir en matière de modes de transport et d’aménagement du territoire et écarte les communes et la région, dépossédées au profit d’une entité administrative régionale parallèle à la collectivité territoriale et dont chacun aura bien compris qu’elle ne possède aucune légitimité issue des urnes. Mes chers collègues, on remet en cause le processus de décentralisation amorcé en 1982 !

J’en viens à présent au fond. Monsieur le secrétaire d'État, vous voulez développer une « Silicon Valley à la française » sur le plateau de Saclay. Or la comparaison me paraît quelque peu abusive, d’abord parce que la Silicon Valley s’étend sur une centaine de kilomètres carrés quand le plateau de Saclay en couvre au maximum une dizaine, mais aussi, me semble-t-il, parce que l’on n’a pas pris la mesure de ce qui s’est vraiment passé en Californie : c’est la matière grise qui a provoqué la naissance, puis l’essor de la Silicon Valley ; on ne l’a pas fait venir de façon artificielle !

J’ajoute que le PIB de la Silicon Valley californienne équivaut, crois-je savoir, à celui d’un pays comme le Chili... La comparaison avec le plateau de Saclay est donc particulièrement audacieuse, voire hasardeuse !

Par ailleurs, au projet d’établissement public est évidemment lié le déplacement de l’université d’Orsay sur le plateau. Or le Gouvernement prévoit un tel déménagement dans les prochaines années, alors même que les moyens de transport nécessaires pour accéder au nouveau campus ne seront pas mis en place avant 2013. Les étudiants disposaient d’un accès au RER juste à côté de leur université. Il est donc un peu aventuré d’affirmer que leurs déplacements et leur qualité de travail s’amélioreront à l’avenir ! Surtout, le déménagement de la faculté d’Orsay coûterait, semble-t-il, 400 millions d’euros de plus qu’une réhabilitation de l’université existante.

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