Lors de la réflexion portant sur l’opération du plateau de Saclay, nous avons souvent fait référence à la Silicon Valley ;jesuisdoncallé la visiter afin d’en comprendre le développement.
L’essor de la Silicon Valley est essentiellement lié au rôle déterminant joué, dans les années quarante, par le directeur de l’université réputée de Stanford.
À cette époque, Stanford a connu un tournant majeur : le ministère de la défense des États-Unis a passé de nombreux contrats avec cette université et les entreprises en développement dans les secteurs de la radio et de l’énergie, entre autres.
Le directeur de l’université, qui en avait assez de voir ses meilleurs éléments partir travailler dans les entreprises situées à l’est des États-Unis, a mis des locaux de l’université à la disposition de ses anciens étudiants afin qu’ils développent leur projet scientifique. C’est le cas, par exemple, du garage Hewlett-Packard.
Le moteur de toute cette émulsion a été avant tout l’envie partagée des étudiants de réaliser un projet commun : l’étudiant qui a une idée la concrétise, confie la maturité scientifique de son projet à un centre de recherche, trouve des entrepreneurs et des sous-traitants qui la réalisent techniquement, des financeurs non frileux qui soutiennent le potentiel du projet par le capital-risque, des commercialisateurs, et bénéficie des terrains mis à disposition par l’université.
Il faut qu’il y ait, au départ, une personnalité qui possède une vision et une énergie, qui pense plus vite et plus loin. C’est ce qui a permis à Stanford de devenir l’université qu’elle est actuellement.
À Grenoble, Hubert Dubedout, le maire socialiste, a joué ce rôle de visionnaire, de décideur. À la suite des jeux Olympiques qui avaient eu lieu dans cette ville, c’est lui, et non pas l’État ou les institutions, qui a pris l’initiative de dynamiser le développement de Grenoble. Par le biais d’une structure associative, il a convié autour de la même table tous les acteurs concernés, c’est-à-dire les entreprises, les universitaires, les chercheurs et les collectivités territoriales, et a créé ce cluster de Grenoble, ô combien précurseur. M. le secrétaire d’Étatnous a rappelé que sa réflexion s’était appuyée sur cette expérience.
À Saclay, malheureusement, rien de tel ne s’est produit. Or la structure existe depuis longtemps. Mais ni l’État ni la région n’ont pris l’initiative de la faire évoluer. Christian Blanc a été le premier à proposer un nouveau projet.
Mais il faut se garder de donner une mission trop hégémonique à l’établissement public de Paris-Saclay. C’est la raison pour laquelle je propose plusieurs mesures d’atténuation au projet qui nous est proposé.
En effet, la réussite économique ne se décrète pas d’en haut. Elle ne dépend que des entrepreneurs, de leurs idées, de leur capacité à les réaliser, de la fluidité des liens avec le monde de la recherche et le monde universitaire.
Dès lors, il faut impérativement se borner à poser des garde-fous, afin que les initiatives se développent du bas vers le haut, selon le schéma dit bottom-up, et cantonner la gouvernance dans un rôle de briseur d’obstacles que les entrepreneurs ou autres acteurs de cette chaîne ne pourraient pas surmonter.
Il faut donc non pas reproduire le schéma interventionniste qui se révèle nécessaire pour le projet du Grand Paris – pour creuser des trous, il faut une autorité ! –, mais poser dans la loi le principe de la possible participation de l’établissement, au service de tous les acteurs qui travaillent ensemble à la réalisation de projets technologiques, économiques ou humains.
Tel est l’objet des quelques modifications rédactionnelles que je vous propose, qui visent à assouplir le cadre de l’intervention de l’établissement public de Paris-Saclay : à aucun moment, on ne doit pouvoir considérer que l’établissement a une compétence exclusive dans la réalisation de certaines de ses missions ; au contraire, il intervient dans le respect du principe de subsidiarité.