Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, il me semble nécessaire d’apporter certaines précisions sur la « zone de protection naturelle, agricole et forestière » du plateau de Saclay.
Chacun peut se réjouir que la commission spéciale ait reconnu à l’unanimité la nécessité d’inscrire dans la loi que la zone de protection naturelle devrait comprendre « au moins 2 300 hectares de terres consacrées à l’activité agricole », tout en mentionnant les communes du plateau concernées. La rédaction retenue par l’Assemblée nationale entrait en effet en contradiction avec le consensus établi localement, qui trouvait sa traduction dans le projet du schéma directeur de la région Île-de-France, le SDRIF.
Néanmoins, le fait d’avoir sanctuarisé ces 2 300 hectares ne suffit pas à garantir le respect d’un équilibre sur ce site entre terres agricoles et zones urbaines. La logique d’urbanisation massive du plateau, que nous redoutons, risque de s’imposer peu à peu.
L’université Paris XI doit s’installer sur le plateau de Saclay, de grandes écoles et des grandes entreprises doivent s’y délocaliser. Puis, on construira des centres de vie, des logements et des équipements publics. Enfin, la présence d’une gare de métro automatique nous fait craindre le pire quant à l’urbanisation future.
À titre d’exemple, nous savons déjà que le déplacement de la faculté d’Orsay aura des conséquences sur la viabilité de la compostière de la Martinière, qui permet de reconvertir les déchets végétaux des villes alentour. Ensuite, nous risquons l’engrenage : fragilisation des exploitations agricoles qui ne pourront plus utiliser le compost fourni sur place, nécessité d’urbaniser autour du métro automatique, augmentation du trafic routier, etc. Au final, c’est l’équilibre général des quatorze exploitations agricoles du plateau qui sera menacé.
Le Plan Campus consommera 183 hectares, plus 9 hectares près d’HEC, sur les 2 650 hectares comptabilisés sur le plateau. Par conséquent, il restera 160 hectares qui seront urbanisés ailleurs : mais où et quand ?
Ce flou est de nature à susciter des inquiétudes s’agissant d’un patrimoine que l’on peut qualifier d’exceptionnel, en particulier du point de vue hydraulique, grâce à un réseau de rigoles et d’étangs éminemment utile pour l’agriculture, la biodiversité, la prévention des risques d’inondation et la création d’un réseau de circulations douces.
Il est également indispensable de maintenir l’actuelle diversité des activités agricoles, car nombreuses sont les terres qui sont utilisées pour la recherche, notamment par l’INRA. Il importe donc de préserver ce patrimoine agricole en raison des liens qu’il entretient avec les activités de recherche publique.
Or je ne souhaite pas que les louables intentions inscrites dans le projet de loi soient rapidement oubliées une fois la loi votée, surtout quand elles se heurteront à des projets offrant aux appétits du secteur immobilier les espaces naturels et agricoles du plateau de Saclay.
La préservation d’au moins 2 300 hectares agricoles sur ce site constitue indéniablement une avancée. Néanmoins, il ne s’agit ni d’une fin en soi ni d’une garantie suffisante contre une urbanisation qui pourrait remettre en cause le nécessaire équilibre entre les activités de recherche et d’innovation et les activités agricoles.