Intervention de Françoise Laborde

Réunion du 26 avril 2010 à 21h45
Grand paris — Vote sur l'ensemble

Photo de Françoise LabordeFrançoise Laborde :

La région parisienne enregistre une croissance de 2 %, alors que les autres grandes capitales sont à 4 %. Dans un monde de plus en plus ouvert, où la concurrence est vive, il est urgent de donner à Paris et à sa périphérie les moyens de conserver une attractivité qui les maintienne au tout premier rang, celui des régions les plus dynamiques de la planète.

Pour y parvenir, le Gouvernement a fait le choix de s’en remettre à la création d’un établissement public à caractère industriel et commercial dénommé « Société du Grand Paris », chargé de développer un réseau de transport d’intérêt national et de favoriser le développement économique et urbain autour des gares de ce réseau.

On peut regretter que, pour lancer ce grand chantier qui va durer de très nombreuses années, le Gouvernement utilise une fois encore la procédure accélérée, au détriment de la qualité du débat parlementaire. Nous aurions souhaité disposer du délai nécessaire pour engager une réflexion approfondie sur les enjeux stratégiques et économiques portés par ce texte d’intérêt national.

Quant aux consultations des principaux acteurs concernés, qui auraient dû précéder l’élaboration d’un tel texte, elles ont été réduites au service minimum ! Les élus franciliens n’ont eu de cesse de vous le répéter : ils ne comprennent pas pourquoi les collectivités locales n’ont eu que quelques semaines pour donner leur avis sur un texte qui engage leur territoire pour plusieurs décennies.

Ce semblant de dialogue avec les collectivités de l’Île-de-France se traduit fort logiquement par une mise à l’écart des collectivités dans la prise en charge du Grand Paris.

Du fait de la place prépondérante accordée à l’État au sein du conseil de surveillance de la Société du Grand Paris, on tient soigneusement à distance les élus franciliens. Alors que des pans entiers de leur territoire vont être réaménagés, ils seront dépossédés d’un grand nombre de leurs prérogatives en matière d’urbanisme et de transports. Une recentralisation découlera nécessairement d’un tel schéma de gouvernance. Drôle de conception de l’organisation décentralisée de la République, qui est pourtant inscrite dans la Constitution…

Le nouvel EPIC cumulera de façon autoritaire à la fois les compétences de maître d’ouvrage, d’aménageur et d’opérateur foncier, alors que, dans le même temps, il faut le rappeler, l’histoire de l’aménagement de l’Île-de-France est marquée par un désengagement progressif de l’État.

Et pourtant, ce sont bien les responsables locaux qui ont clairement identifié les priorités, en se fondant sur les attentes des usagers : la rénovation des lignes du RER, le désengorgement de la ligne 13, la prolongation d’Eole, la création de la rocade Arc Express, par exemple.

Il conviendrait d’intégrer d’autres dimensions de l’action publique pour donner davantage de cohérence au Grand Paris.

Cependant, même si l’on faisait abstraction du schéma de gouvernance, ce texte permettra-t-il de répondre à la question la plus fondamentale, celle de savoir comment relever le défi de la fracture sociale au sein de ce territoire ?

Comment prétendre donner de l’attractivité à une région sans anticiper davantage sur les questions de l’emploi, du logement et de l’environnement ?

Ce texte manque cruellement de souffle démocratique, mais aussi d’ambition pour la population francilienne. Bien en deçà de nos espérances, il réduit la belle idée du Grand Paris à sa seule dimension technocratique.

C’est pourquoi les parlementaires que nous sommes ne devraient pas se faire les complices de son adoption. Vous l’aurez compris, mes chers collègues, ce projet de loi, même après les modifications apportées par notre Haute Assemblée, ne sera voté par aucun sénateur radical de gauche. Il en ira de même pour la très grande majorité des sénateurs de mon groupe.

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