Intervention de Gisèle Gautier

Réunion du 14 mai 2008 à 21h30
Insertion sociale et professionnelle des jeunes en difficulté au sein des institutions de la défense — Adoption définitive d'un projet de loi

Photo de Gisèle GautierGisèle Gautier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi comporte deux grands volets : d’une part, des dispositions relatives au dispositif « défense 2ème chance », d’autre part, des mesures tendant à modifier et à compléter la partie législative du code de la défense et du code civil concernant le personnel militaire.

Nos excellents rapporteurs ont déjà abordé la plupart des points de ce texte, mais je souhaite insister sur un élément qui me semble important, à savoir la ratification de l’ordonnance du 2 août 2005 à l’origine du dispositif « défense 2ème chance ».

Depuis bientôt trois ans, ce dispositif vise à assurer l’insertion professionnelle et sociale de jeunes, filles ou garçons, âgés de dix-huit à vingt et un ans – cette limite a été portée à vingt-deux ans révolus par un amendement adopté à l’Assemblée nationale – qui connaissent des difficultés scolaires, qui présentent des risques clairs de marginalisation et qui, j’y insiste, se portent volontaires pour intégrer l’un des centres.

Pour ce faire, a été institué l’ÉPIDe, qui est rattaché aux ministères de la défense et de l’emploi ; cet établissement est financé par les crédits du plan de cohésion sociale. Les vingt-deux centres accueillent à ce jour près de 1 800 jeunes, pour une capacité totale, à terme, de 3 000 places.

Un premier bilan peut être dressé : depuis la création de l’ÉPIDe, les centres ont permis à plus de 1 500 jeunes d’être diplômés à l’issue d’un parcours d’au moins un an, même si les abandons en cours de cursus sont encore trop importants.

Il s’agit donc d’un dispositif qui fonctionne bien et qui doit être pérennisé tant l’emploi et l’intégration des jeunes sont des défis majeurs pour notre société.

Il faut le savoir, 800 000 jeunes Français participent chaque année aux journées d’appel de préparation à la défense. À cette occasion, des tests sont effectués en relation avec le ministère de l’éducation nationale pour évaluer les jeunes qui ont des difficultés de lecture et d’écriture ; 60 000 d’entre eux sont en situation d’échec : certains, en simple échec scolaire, peuvent rejoindre des systèmes éducatifs traditionnels ; d’autres sont malheureusement en voie de marginalisation sociale

Il n’existait au profit de ces jeunes que très peu de structures capables de leur proposer un soutien et de favoriser leur intégration sociale et professionnelle. Le dispositif institué vise donc à donner aux volontaires les moyens qui leur manquaient et non à leur imposer un parcours de réinsertion, qui aurait pu être inodore, incolore et finalement inefficace.

Le dispositif « défense 2ème chance » ne doit donc pas être remis en cause. Il importe de suivre de près son développement sur l’ensemble du territoire. Les premiers résultats sont encourageants, mais ils doivent, bien sûr, être confirmés par un examen minutieux ; la montée en puissance du système est à ce prix.

Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2008, de nombreuses inquiétudes, sans doute légitimes, s’étaient manifestées quant à la viabilité du dispositif et aux moyens de fonctionnement. Mais, aujourd’hui, nous ne pouvons que nous réjouir puisque nos préoccupations ont été entendues, le Premier ministre s’étant prononcé en faveur de l’ÉPIDe.

Monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, en pérennisant cet établissement, nous envoyons un signal positif fort à ces jeunes.

En 2008, l’ÉPIDe disposera d’un budget de fonctionnement de 85, 3 millions d’euros, soit une augmentation de 33, 5 millions d’euros par rapport aux crédits prévus initialement.

L’avenir du dispositif semble donc assuré aujourd'hui, même si nous resterons vigilants pour confirmer, lors de l’examen de chaque loi de finances, notre volonté de donner à ce programme innovant les moyens de ses ambitions.

À ce titre, la diversification des ressources de l’ÉPIDe, en lui facilitant par exemple l’accès à la taxe d’apprentissage, est une excellente chose. Elle permettra à l’ÉPIDe de bénéficier d’une fraction de la taxe d’apprentissage dite « hors quotas », au titre des frais afférents à la formation et à l’orientation scolaire et professionnelle. Le nouvel article apporte donc une base juridique nécessaire.

Il faut également réfléchir – toujours pour assurer la viabilité du dispositif – à un renforcement des partenariats locaux. Enfin, ne pourrait-on pas améliorer le timide soutien financier du fonds social européen ?

Après deux ans de fonctionnement, certaines adaptations paraissent en effet nécessaires. L’Assemblée nationale a ainsi adopté un amendement étendant le bénéfice des services de l’ÉPIDe aux volontaires âgés de vingt-deux ans révolus. Cette mesure n’affecte ni la taille du dispositif ni le nombre de places ; elle ne fait que diversifier les profils des candidats, répondant en cela aux demandes des missions locales ; elle reprend d’ailleurs les propositions du Conseil économique social et de la mission d’information sur l’ÉPIDe de la dernière législature.

Malgré ces avancées, des incertitudes demeurent, notamment en ce qui concerne les personnels formateurs. Celles-ci se concentrent sur deux aspects essentiels.

Tout d’abord, il semble nécessaire d’améliorer les conditions de rémunération, en particulier pour les anciens militaires, officiers et officiers de réserve, car elles ne sont pas incitatives. L’implication d’anciens militaires est sans conteste la principale valeur ajoutée du dispositif. Il convient donc de favoriser leur recrutement et d’aplanir toutes les difficultés techniques relatives, notamment, au cumul de leur salaire et de leur pension ou au remboursement du pécule perçu par certains d’entre eux à leur départ des armées.

Il apparaît également nécessaire de donner aux personnels des perspectives d’emploi qui dépassent les contrats à durée déterminée actuels.

Enfin, la spécificité du dispositif nécessite que tous les personnels bénéficient initialement d’une formation commune. Ce n’est pas parce qu’on est militaire qu’on est pédagogue !

Les personnels qui s’impliquent au quotidien, bien au-delà de leurs obligations contractuelles, et que je tiens à saluer en notre nom à tous, doivent bénéficier de notre attention et voir les spécificités de leurs missions reconnues. Soyez certain, monsieur le secrétaire d’État, que nous veillerons à leur assurer de meilleures conditions de travail et un avenir professionnel plus sûr ; je suis sûre que vous partagez cette préoccupation.

Je me félicite de la réussite d’une action qui, au départ, n’était qu’un pari du Gouvernement, que beaucoup alors estimaient risqué du fait que le dispositif repose sur le volontariat des jeunes concernés. La gageure était particulièrement difficile à soutenir au regard d’un taux d’analphabétisme des jeunes Français proche de 15 %.

Rendre l’espoir à ceux qui n’ont « a priori » aucune chance est un défi considérable. Nous devons être fiers d’appartenir à une majorité qui a su le relever et qui souhaite aujourd’hui que le système soit pérennisé.

Les autres dispositions du projet de loi prévoient notamment la ratification de l’ordonnance du 29 mars 2007 relative au personnel militaire modifiant et complétant la partie législative du code de la défense et le code civil. À l’évidence, nous sommes favorables à cette ratification, qui procède aux adaptations rendues nécessaires par les dernières évolutions législatives du statut des militaires et de la réserve opérationnelle, mais aussi, de façon plus générale, par l’évolution de la société.

Le groupe UMP votera dans son ensemble ce projet de loi, renouvelant ainsi son attachement au dispositif unique et innovant « défense 2ème chance », que nous souhaitons voir maintenu et développé.

Enfin, je ne voudrais pas conclure sans féliciter notre collègue François Trucy de la qualité et de la concision de son rapport. Je sais combien il s’est investi pour le rendre lisible et accessible, afin de nous permettre de nous prononcer par un vote que, personnellement, au regard de l’enjeu, je souhaite favorable.

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