Ce texte est une transcription minimaliste de la directive 2001/18/CE, qui tend à demander aux États membres de l'Union européenne d'éviter la présence d'OGM dans les produits ayant été élaborés à partir de végétaux « classiques ».
Nous disposions donc d'une marge de manoeuvre pour faire en sorte que l'agriculture ne recourant pas aux OGM soit effectivement préservée. Or nous ne l'avons pas utilisée, confondant délibérément seuil de détection et seuil d'étiquetage, ce dernier représentant, en fait, un « droit à polluer » accepté à l'échelon européen.
En deuxième lieu, s'agissant du Grenelle de l'environnement, j'ai beau être dans l'opposition, monsieur le ministre d'État, je suis beau joueur. Je me réjouissais profondément des avancées qu'il a permises. Je les ai saluées sans états d'âme, mais je dois constater aujourd'hui à regret que le compte n'y est pas.
En termes d'engagements, le Grenelle de l'environnement avait affirmé - et gravé dans le marbre, espérais-je ! - la liberté de consommer et de produire sans recourir aux OGM. Or cette liberté est devenue celle de consommer et de produire avec ou sans OGM. Nous nions ainsi un aspect essentiel du problème, à savoir la dissymétrie liée à l'introduction d'OGM dans l'environnement, à l'introduction d'éléments génétiques nouveaux, dont nous ne connaissons pas toutes les conséquences sur le long terme.
En matière de prudence, nous n'avons donc pas été fidèles aux conclusions du Grenelle de l'environnement. S'il fallait donner un exemple emblématique de cette réalité, j'évoquerais la manière dont a été instauré le fameux « délit de fauchage » : faucher illégalement un champ de maïs « bio » sera nettement moins sévèrement sanctionné par la loi que faucher un champ de maïs OGM. La loi protège le faible...
S'agissant toujours du Grenelle de l'environnement, il s'était passé quelque chose de formidable : l'émergence annoncée, à l'échelon national, de ce que le chercheur Jean Masson avait expérimenté pendant deux ans sur un site de l'INRA, sous l'égide d'une haute autorité qui ferait véritablement une place à la société civile.
Or le texte que nous allons adopter sur les conseils pressants, pour dire les choses directement, de la présidente en partance de l'INRA, Mme Marion Guillou, créera la situation suivante : deux avis seront formulés par le Haut conseil, émanant l'un de scientifiques, l'autre de représentants de la société civile, le second pouvant être pris en compte ou servir simplement de faire-valoir...
En troisième lieu, je voudrais vous rendre attentifs, mes chers collègues, à la veille des élections municipales, au fait que le texte que nous allons adopter nous place complètement en porte-à-faux, une fois de plus, avec les attentes de l'opinion publique. En effet, un sondage, dont les résultats ont été publiés cette semaine, nous apprend que 71 % des Français estiment qu'un produit étiqueté « sans OGM » doit contenir 0 % d'OGM et rejettent donc l'idée d'un « seuil de pollution » acceptable.
Pourquoi en est-on arrivé là ?
Maire d'un petit village, Wattwiller, je mène depuis trois ou quatre ans avec des gens de tous bords, issus de la gauche, de la droite, du centre ou sans étiquette, une réflexion et une action sur les OGM, dans un esprit de consensus. Nous essayons de protéger une exploitation pratiquant l'agriculture biologique par la voie réglementaire, mais ce n'est pas ici le lieu de développer ce point. J'attendais qu'au Sénat, sur un tel sujet, les clivages politiques soient transcendés et que l'on puisse vraiment discuter du fond, en toute sérénité. Je le dis clairement, cela n'a pas été possible, pour deux raisons.
Premièrement, je dois déplorer que le rapporteur, M. Jean Bizet, soit resté campé, je dirais même prostré, dans une posture idéologique.