Intervention de Jacques Muller

Réunion du 28 mai 2010 à 14h30
Modernisation de l'agriculture et de la pêche — Article 12

Photo de Jacques MullerJacques Muller :

Je ne peux que saluer l’intention affichée dans ce projet de loi d’inscrire l’agriculture et la forêt dans un développement durable des territoires. Le constat de la disparition ou de l’artificialisation des terres ne date pas d’hier, mais je me félicite que le phénomène soit enfin reconnu dans la loi.

Ce problème, qui revêt une dimension culturelle très forte, concerne à la fois nos concitoyens et les décideurs que sont l’État et les collectivités locales.

Pour l’instant, nos concitoyens sont friands de lotissements, forme d’habitat en milieu rural qui est extrêmement consommatrice d’espaces. La maison isolée au milieu d’une parcelle est devenue un modèle d’habitat, à tel point que, dans certaines régions, l’espace rural s’urbanise, des villages s’étendent, des conurbations apparaissent parfois dans les vallées.

C’est pourquoi il est important que la loi fixe un nouveau cap, privilégie les nouvelles constructions à la périphérie des villages anciens plutôt que les lotissements, invente une forme de densification adaptée à l’architecture et au cœur de nos villages.

Les collectivités territoriales et l’État, quant à eux, promeuvent encore et toujours le développement d’infrastructures et de projets parfaitement grenello-incompatibles, par exemple le grand contournement ouest de Strasbourg.

Si nous voulons inverser cette tendance, il nous faudra faire preuve de volontarisme tant la propension que je viens de décrire est aujourd’hui prégnante.

Par ailleurs, les orientations en matière d’énergie me semblent demeurer par trop floues, voire ambiguës.

Comme M. le rapporteur, je me réjouis que des plans régionaux de l’agriculture durable fixent les grandes orientations de la politique agricole, agroalimentaire et agro-industrielle de l’État dans chaque région.

Néanmoins, le projet de loi précise que ces plans tiendront compte de « l’adaptation de l’agriculture au changement climatique », expression qui mérite d’être remplacée par une formule plus précise et plus claire. Il me paraît évident que cette adaptation passe par une évolution des systèmes de production, c'est-à-dire par l’encouragement des énergies directement produites, hors les agrocarburants. Je reviendrai sur cette question lors de l’examen de l’un de mes amendements.

Il importe aussi de prendre en considération la consommation en énergie grise, en engrais et en pesticides par les activités agricoles.

Certains nous annoncent que nous avons atteint le point haut de la courbe de Hubbert, cependant que, pour d’autres, cet événement ne surviendra que dans deux ou trois ans. Toujours est-il que la production de pétrole finira immanquablement par décroître, et c’est pourquoi nous avons le devoir de privilégier les énergies produites de façon autonome par rapport à cette énergie fossile.

De façon là encore ambiguë, le projet de loi mentionne « le développement des sources d’énergie d’origine agricole », autrement dit les agrocarburants. Ce point devra, lui aussi, être clarifié.

En conclusion, je ne peux que déplorer que l’article 12, premier des articles d’un volet consacré à l’inscription de l’agriculture et de la forêt dans un développement durable des territoires, demeure totalement muet sur l’emploi et la condition sociale dans l’agriculture. À mes yeux, l’agriculture repose sur des femmes et des hommes. Comment peut-on prétendre la moderniser, en faire un pilier du développement durable du territoire, en ignorant cet aspect ?

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion