Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 2 décembre 2009 à 14h45
Loi de finances pour 2010 — Remboursements et dégrèvements

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils, rapporteur spécial de la commission des finances :

Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, ayant juste cinq minutes pour présenter la mission « Remboursements et dégrèvements », qui est tout de même la plus importante du budget de l’État en volume, avec des crédits s’élevant à 95 milliards d’euros, j’irai à l’essentiel.

Tout d’abord, et contrairement à mon habitude – mais il faut dire ce qui est –, je souhaite vous faire part d’une bonne nouvelle : les efforts menés par la commission des finances du Sénat depuis l’examen du projet de loi de finances pour 2006 ont finalement trouvé, au moins partiellement, une réponse.

Après avoir demandé une enquête à la Cour des comptes sur le fondement du 2° de l’article 58 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, la LOLF, et après avoir obtenu un groupe de travail associant le Parlement et l’administration, nous constatons que la maquette budgétaire a finalement commencé à évoluer, du moins s’agissant des remboursements et dégrèvements des impôts d’État.

La présentation des crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2010 isole, d’une part, les dépenses que l’on pourrait qualifier de « techniques » – elles représentent tout de même plus de 80 % du total – et, d’autre part, les dépenses concourant à la mise en œuvre de politiques publiques.

La LOLF n’a pas que des vertus, loin s’en faut, mais elle en a au moins une : elle peut permettre de faire émerger les enjeux politiques derrière la « cuisine » budgétaire. Nous en avons ici un cas d’école. Maintenant qu’il est possible d’identifier les remboursements et dégrèvements concourant à des politiques publiques, quelles conséquences politiques en tirons-nous ? Allons-nous pouvoir analyser l’adéquation entre les choix ayant motivé ces remboursements et dégrèvements et l’effet réel de ces mesures ?

Cela nous renvoie au débat sur les dépenses fiscales en général et sur les crédits d’impôt en particulier, dont les remboursements ne sont que la partie dite « restituée ». Les crédits d’impôt ressemblent tout de même beaucoup à des subventions. En commission, nous avons été plusieurs sénateurs à faire le lien entre l’augmentation du coût des crédits d’impôt et la stabilisation du montant des dépenses budgétaires.

Je vous donnerai deux chiffres. D’une part, les dépenses de l’État sont stables en volume. En 2010, elles augmenteront au même rythme que l’inflation, soit 1, 2 %, ce qui équivaut à 4, 3 milliards d’euros. D’autre part, les crédits d’impôt progresseront dans le même temps de 6 milliards d’euros. Il y a manifestement là un jeu de vases communicants.

La Cour des comptes demande que les dépenses fiscales pouvant faire l’objet d’une restitution soient incluses dans la norme de dépenses de l’État. Le rapporteur spécial de la commission des finances de l’Assemblée nationale a proposé de n’inclure dans la norme de dépenses que la partie restituée. Le Gouvernement préférerait, semble-t-il, traiter cette question dans le cadre des dispositions de la loi du 9 février 2009 de programmation des finances publiques pour les années 2009 à 2012, notamment celles qui concernent les niches fiscales. Or leur diversité risque de poser problème.

À ce stade, la commission des finances n’a pas arrêté sa position. Pour ma part, je ne considère pas que la norme budgétaire soit obligatoirement le plus important. En revanche, ce qui me semble nécessaire, c’est que nous poursuivions le travail pour réintégrer le poids financier des remboursements et dégrèvements dans les domaines concernés.

Sur les crédits proprement dits, je me contenterai de quatre remarques.

Premièrement, la diminution de 20 % environ des remboursements et dégrèvements d’impôts d’État par rapport à la prévision 2009 s’explique surtout par la non-reconduction de certaines mesures du plan de relance, notamment le remboursement mensuel de la TVA.

Deuxièmement, le montant des restitutions de la prime pour l’emploi devrait atteindre 2, 45 milliards d’euros, sous le double effet de la reconduction de la non-indexation des seuils du barème et de l’imputation du revenu de solidarité active, le RSA, versé en 2009, mesure dont les résultats seront ressentis en 2010.

Troisièmement, la diminution de 9 % des dégrèvements d’impôts locaux s’explique surtout par la suppression de la taxe professionnelle. L’effet est encore limité en 2010, car les dégrèvements sont versés pour une large part avec une année de décalage. Mais les élus notent que cette réforme marque la volonté de l’État de se désengager du financement des impôts locaux.

Quatrièmement, je souhaite évoquer le bouclier fiscal, car c’est sur les crédits de cette mission que s’impute ce qui s’appelle techniquement le « plafonnement des impositions directes ». En 2010, tout comme en 2009, 700 millions d’euros sont prévus. J’ai observé avec intérêt que les contribuables relevant du premier décile de revenu fiscal de référence représentaient 60 % des 18 000 bénéficiaires, mais seulement 3, 5 % des restitutions. À l’inverse, les contribuables du dernier décile représentent 30 % des bénéficiaires, mais plus de 90 % des restitutions.

En 2010, j’ai l’intention, en ma qualité de rapporteur spécial, de m’intéresser de manière plus précise au dispositif du bouclier fiscal. Je vous remercie par avance, monsieur le ministre, du concours que vos services voudront bien nous apporter.

Pour le reste, les crédits de la mission traduisent les conséquences de décisions qu’on peut ne pas approuver, mais qui ont été prises ailleurs, notamment lors de l’examen de la première partie du projet de loi de finances. Pour cette raison, la commission des finances vous propose de les adopter. À titre personnel, je ne les approuve pas. Vous ne serez donc pas surpris de mon vote.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion