Intervention de Bernard Cazeau

Réunion du 2 décembre 2009 à 14h45
Loi de finances pour 2010 — Santé

Photo de Bernard CazeauBernard Cazeau :

Les assurés sociaux n’ont pas, selon nous, à se substituer à l’État pour régler les problèmes liés à la prise en charge exceptionnelle de cette mesure sanitaire.

À ce sujet, vous avez très certainement voulu démontrer que, en matière de vaccination de masse, vous pouviez vous passer des professionnels libéraux. Les files d’attente vous prouvent le contraire, comme Gilbert Barbier vous l’a déjà fait remarquer. Attendre des heures pour se faire piquer ! Jusqu’à quand demanderez-vous aux Français de s’appliquer ce masochisme républicain ?

Pour le reste, force est de constater que, en matière de crédits destinés à la santé publique, les années se suivent et se ressemblent.

Pour le programme « Prévention et sécurité sanitaire », les autorisations d’engagement pour 2010 s’élèvent à 471, 8 millions d’euros, soit une progression de 1, 74 % par rapport à la loi de finances initiale pour 2009. Le montant des crédits de paiement est, quant à lui, de 491, 3 millions d’euros.

Cette augmentation recouvre des évolutions contrastées selon les actions du programme. Sur les sept actions auxquelles des crédits ont été attribués, trois enregistrent une diminution importante de leurs moyens, tant en autorisations d’engagement qu’en crédits de paiement. Il s’agit des actions 11 « pilotage de la politique de santé publique », 14 « prévention des maladies chroniques et qualité de vie des malades » et 16 « Réponse aux alertes et gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises sanitaires ». On peut s’étonner de ces choix.

En effet, les mesures d’urgence prises dans le cadre de la préparation à une pandémie grippale ont été financées par une ouverture de crédits de l’ACOSS en faveur de l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires, l’EPRUS, afin de compléter les crédits nécessaires.

La régularisation de la part prise en charge par l’État devra intervenir dans la loi de finances rectificative, si bien que les prévisions budgétaires incluses dans le projet annuel de performances pour 2010 ne permettent nullement de prendre la mesure, du moins à ce jour, de l’effort financier consenti par l’État pour lutter contre la grippe A.

En ce qui concerne le deuxième programme de la mission « Santé », il est constitué de la participation de l’État à l’organisation d’une offre de soins de qualité. Bien que marginaux par rapport au financement apporté dans ce domaine par l’assurance maladie dans le cadre du PLFSS, les crédits de ce programme n’en devraient pas moins avoir un rôle très important.

En effet, ils assurent principalement le financement des stages extra-hospitaliers effectués par les futurs médecins dans le cadre des formations médicales. Pour autant, comme la réflexion menée en matière d’organisation médicale dans le cadre de la loi HPST a vraiment été minimale, il est permis de s’interroger sur la crédibilité de ce programme.

Enfin, le dernier programme de la mission, celui qui concerne la protection maladie, sera doté en 2010 de 585 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement, soit une hausse des crédits de 8, 3 % par rapport à 2009, à mettre au compte de la seule aide médicale d’État, ou AME, dont la sous-dotation structurelle est toujours d’actualité.

À cet égard, je tenais à souligner l’étrangeté de vos mesures visant à faciliter l’aide à l’acquisition de couvertures complémentaires de santé pour les assurés couverts par des contrats collectifs, lesquels profitent avant tout aux cadres des grandes entreprises. Elles permettront notamment de mieux leur rembourser leurs dépassements d’honoraires. Le coût de cette niche sociale est évalué à 2, 2 milliards d’euros pour 2010 ! Là encore, quel paradoxe ! C’est donc en quelque sorte aux contribuables, ou aux cotisants sociaux, et principalement aux bas revenus, qu’il revient d’entretenir le mécanisme pervers des dépassements d’honoraires pour les hauts revenus !

Il en est de même de la fiscalisation des indemnités journalières accordées aux victimes d’accidents du travail, sur laquelle nous souhaiterions connaître votre point de vue.

Sur tous ces sujets, comme sur d’autres, le décalage entre les bonnes intentions annoncées et les actes concrets saute aux yeux. Alors que ces crédits devraient traduire l’implication de l’État en matière de santé publique, ils démontrent en réalité la tendance de l’État à s’en décharger, soit sur l’assurance maladie, par le biais de transferts, purement et simplement, soit de façon plus détournée, par des reconductions de dettes – la dette au titre de l’AME, qui commence tout juste à être apurée depuis l’an dernier, en constitue un bon exemple –, ou encore par des cessions partielles de financement aux collectivités territoriales, qui constituent souvent les prémices d’un désengagement.

L’État se voit, ici ou là, obligé de saupoudrer des actions de rattrapage qui n’auraient plus lieu d’être si un travail de réflexion globale était mené en amont.

Les difficultés d’accès aux soins ne vont donc pas être réglées par ce budget. C’est moins une question d’argent qu’une question de volonté politique. Il serait temps de mettre les intérêts des assurés sociaux au cœur de vos préoccupations, avant de satisfaire tels ou tels lobbies. Je me dois ainsi d’insister sur le fait que de trois à quatre millions de nos compatriotes ne bénéficient toujours pas de couverture complémentaire de santé.

Telles sont toutes les raisons pour lesquelles, madame la ministre, le groupe socialiste ne votera pas les crédits de la mission « santé ».

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion