Intervention de Roselyne Bachelot-Narquin

Réunion du 2 décembre 2009 à 14h45
Loi de finances pour 2010 — Santé

Roselyne Bachelot-Narquin, ministre :

Plusieurs intervenants m’ont demandé, et c’est une question d’actualité, pourquoi nous n’avions pas encore associé les médecins généralistes à la vaccination contre la grippe.

Les raisons en sont simples. Tout d’abord, il faut préserver la capacité soignante de nos médecins généralistes qui doivent faire face à un nombre croissant de consultations supplémentaires liées à la grippe A H1N1 : 410 000 voilà quinze jours, 730 000 la semaine dernière et nous devrions atteindre le nombre de 950 000. Il nous faut impérativement préserver la capacité soignante des médecins généralistes.

Les cabinets de médecine générale sont soumis à de très fortes tensions. Toutes les informations qui me reviennent vont dans ce sens. Et la situation ne va pas s’améliorer. Nous approchons de la période de Noël, pendant laquelle se développent différentes épidémies saisonnières, gastroentérites et bronchiolites notamment. Il est donc crucial d’assurer la permanence des soins alors que certains médecins aspirent bien évidemment à prendre quelques jours de congés à l’occasion de fêtes qui sont essentiellement familiales.

Hier, un généraliste, médecin traitant de 1 100 patients, me déclarait que, selon ses calculs, s’il devait vacciner ces 1 100 patients avant le 15 janvier, à raison de vingt-cinq jours de consultation et de vingt minutes bon poids par consultation, il lui faudrait vacciner quarante-quatre patients par jour, ce qui l’amènerait à faire des journées de quatorze heures.

Nous n’avons donc pas associé les médecins aux opérations d’abord pour préserver les capacités de soins, mais aussi pour des raisons de logistique.

La Fédération française des médecins généralistes, MG France, qui est le principal syndicat de médecins généralistes, a clairement été dans le sens du Gouvernement. Elle considère que la vaccination par des généralistes ne serait possible qu’avec des doses unitaires. Or, la majorité des stocks disponibles est composée de vaccins multidoses.

La Confédération des syndicats médicaux français, la CSMF, veut donner un coup de main. Mais que doit-on entendre par « coup de main » ? Les médecins prendront-ils en charge 5 %, 25 %, 50 % des vaccinations ?

Comment organiser la logistique d’une campagne de vaccination dont on ignore complètement le format ? Notre pays compte 22 000 pharmacies, 57 000 généralistes et 6 000 pédiatres. Comment puis-je organiser la diffusion des stocks de vaccins dans des conditions de sécurité sur la base d’un format que je ne connais pas et qui peut en outre varier d’un endroit à l’autre. C’est notamment le cas si une pharmacie sert un cabinet de médecins généralistes qui a décidé de ne pas vacciner. Dois-je rappeler que selon un sondage réalisé par Le Quotidien du médecin, la moitié des généralistes refuse de vacciner. La moitié ! Une union régionale du syndicat des médecins libéraux a même fait savoir au Gouvernement qu’elle ne voulait pas vacciner.

Comment pourrais-je organiser la logistique de la vaccination avec de telles distorsions ? C’est évidemment tout à fait impossible.

Nous n’excluons pas les médecins généralistes. Si certains d’entre eux ont du temps, s’ils souhaitent consacrer deux ou trois heures par jour à la vaccination, qu’ils viennent nous aider ! On a besoin d’eux dans les centres, dans les équipes mobiles ! On ne les exclut pas ! Ils ont toute leur place dans le dispositif. Mais il faut qu’ils comprennent les problèmes de logistique auxquels se heurtent le Gouvernement et la puissance publique. Il va nous falloir vacciner 300 000 personnes par jour. Nous aurons donc vraiment besoin des forces de la médecine générale.

Oui, je fais confiance aux médecins généralistes, mais je souhaite qu’ils prennent en compte les difficultés d’organisation d’une campagne de santé publique d’une ampleur sans précédent dans notre pays.

J’ai déjà répondu sur l’Agence des systèmes d’information partagés de santé, l’ASIP santé, qui fonctionne depuis le 15 septembre.

Monsieur Barbier, le dépistage du sida reste capital, et je vous remercie de l’avoir évoqué, au lendemain d’ailleurs de la Journée mondiale de lutte contre le sida. La France maintient ses efforts en ce domaine sur le plan tant national qu’international. Nous ne devons pas relâcher nos efforts. Certes, le taux de contamination a baissé de 22 % en cinq ans, mais certaines catégories de la population, notamment les hommes ayant des relations sexuelles avec les hommes, restent particulièrement exposées puisque le taux annuel de contamination est de un pour cent personnes, soit deux cents fois plus que la moyenne de la population.

Nous voulons agir sur tous les fronts : la prévention, la réduction des risques, le dépistage, la prise en compte du soin, la prise en charge médicosociale et, bien entendu, la recherche.

Vous avez évoqué le rapport du Conseil national du sida. Je citerai pour ma part les conclusions du groupe d’experts dirigé par le professeur Yeni et, tout récemment, les conclusions de la Haute Autorité de santé ainsi que l’excellent rapport de Mme Lert et de M. Pialoux. Je tiendrai bien entendu le plus grand compte des conclusions de ces rapports. Je présenterai, au mois de janvier, un cinquième plan qui réservera une place toute particulière au dépistage, comme vous le souhaitez, monsieur Gilbert Barbier.

Monsieur Autain, comme vous l’avez souligné, insalubrité et saturnisme sont étroitement liés. Nous consacrerons 0, 5 million d’euros à la lutte contre l’insalubrité et 0, 65 million d’euros à la lutte contre le saturnisme. Il s’agit de normaliser les protocoles et mettre en œuvre les recommandations de l’INSERM en matière de dépistage, de financer une enquête sur les sources d’exposition au plomb à domicile.

Une proposition de loi, présentée par M. Jean-Luc Warsmann, a été déposée à l’Assemblée nationale. J’ai proposé un durcissement des dispositions prévues à l’article 19 en matière de réglementation et de procédures d’accréditation. J’ai également souhaité permettre aux préfets, en cas d’urgence, d’accélérer les procédures de mise en conformité. Le Gouvernement est donc mobilisé sur ce sujet.

Je remercie Mme Catherine Procaccia, militante convaincue de la prévention dans la lutte des comportements à risques, de son soutien dans les campagnes que nous menons contre l’alcool et le tabac. Soyez assurée, madame, de notre détermination à lutter de manière résolue, comme vous le souhaitez, contre toutes les conduites addictives.

Je n’insisterai pas sur les ARS afin de ne pas allonger encore un propos déjà bien long, mais je reviendrai sur ce sujet si vous le souhaitez.

MM. Autain, Teulade et Cazeau sont de trop fins observateurs des projets de loi de finances pour me reprocher d’avoir laissé fondre les crédits de l’action n° 14 de 1, 9 %. Je suis persuadée qu’ils auront parfaitement entendu, de leur oreille acérée, que cette baisse était due à un rebasage et au transfert de 3, 5 millions d’euros des crédits du GIP Datis, drogues, alcool, tabac info-service vers l’INPES dans le cadre de la reconfiguration de la téléphonie sociale. Je considère qu’il ne pouvait donc s’agir que d’une argumentation purement polémique de la part d’observateurs et de connaisseurs aussi fins des programmes dédiés à la santé.

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