Intervention de Nathalie Goulet

Réunion du 26 mars 2009 à 9h00
Avenir des sous-traitants et équipementiers du secteur automobile — Discussion d'une question orale avec débat

Photo de Nathalie GouletNathalie Goulet :

Avec plus de 34 000 emplois directs, la Basse-Normandie est l’une des régions où la filière automobile est le plus présente.

De façon générale, les observateurs, même les plus critiques, ne doutent pas de la volonté du Gouvernement de protéger et de soutenir le secteur automobile français.

Cela étant, peut-on considérer qu’il existe réellement une filière automobile ? En fait, il existe une filière des constructeurs et une filière des équipementiers, les deux ayant parfois des difficultés à travailler ensemble. La crise sera-t-elle l’occasion de revoir en profondeur et en totalité l’organisation du secteur ? Pour l’heure, nous avons l’impression qu’il y a, d’un côté, les sous-traitants et les équipementiers, et, de l’autre, les constructeurs.

En Basse-Normandie, notre remarquable préfet de région, M. Christian Leyrit, a pris l’heureuse initiative de réunir, dès le 26 janvier, une table ronde rassemblant les représentants de la filière et les élus.

Il est apparu que la situation des quatre cercles de sous-traitants de la filière automobile peut être comparée à celle des victimes d’un grave accident de la route : on réconforte les plus valides, on soigne les blessés, on donne l’extrême-onction aux plus gravement atteints… De même, la politique menée par le Gouvernement renforcera les entreprises les moins touchées, mais laissera de côté les plus fragiles. Il conviendrait, à mon sens, de revoir cette stratégie !

La région Basse-Normandie a pris la mesure de la crise en accordant 44 millions d’euros à la recherche et à l’innovation, ainsi que 11 millions d’euros d’aides supplémentaires à la filière, dont 4 millions d’euros d’aides à la trésorerie.

Le département de l’Orne compte de nombreux sous-traitants importants : je citerai notamment Wagon Automotive, qui emploie 180 personnes à Sainte-Gauburge-Sainte-Colombe et a été placé en redressement judiciaire, Faurecia à Flers, Valéo à Athis-de-l’Orne, ThyssenKrupp au Theil-sur-Huisne, ou Key Plastics à Bellême, cette dernière société, où travaillent 168 salariés, étant soumise à une procédure collective… Je pourrais énumérer de nombreuses autres entreprises en difficulté, des centaines d’emplois étant menacés !

Le conseil général de l’Orne a mis en place un plan doté de 10 millions d’euros, pompeusement baptisé « plan de relance » : sur ce montant, 9 millions d’euros seront savamment saupoudrés pour financer des travaux routiers – le saupoudrage et le clientélisme du goudron s’inscrivent dans la grande tradition des départements ruraux ! –, mais pas un euro ne sera accordé aux sous-traitants ornais…

J’évoquerai, à cet instant, le site Faurecia de Flers.

La société Faurecia, qui fabrique des sièges, des échappements, des équipements acoustiques, des intérieurs de véhicule et des blocs avant, emploie 1 400 salariés et travaille avec cinquante sous-traitants, ce qui représente plus de 400 emplois induits. Alors que 1 215 suppressions d’emploi étaient annoncées par le groupe en France, 271 licenciements étaient prévus sur le site de Flers.

Les élus et les représentants du personnel se sont battus pour se faire entendre d’une direction parfois trop éloignée de l’exploitation – cela peut arriver dans d’autres cas –, et ils sont parvenus à sauver de très nombreux emplois menacés par des délocalisations. Ainsi, ils ont pu démontrer que l’activité comptabilité devait être maintenue sur le site de Flers, au lieu d’être délocalisée au Portugal.

D’ailleurs, au sujet des délocalisations, il y aurait beaucoup à dire.

Par exemple, l’activité de fabrication de glissières emploie environ 700 salariés. Si cette activité est transférée en Pologne alors que l’usine polonaise de Faurecia fabrique déjà des glissières, on parlera non pas de « délocalisation », mais de « relocalisation », ce qui permet d’échapper aux contraintes, aux promesses et aux incantations.

Faurecia est le deuxième fabricant de sièges automobiles au monde. N’y aurait-il pas un avenir, pour cette société, dans un rapprochement avec l’industrie aéronautique afin de fabriquer des sièges d’avion, même si, évidemment, les volumes et les chaînes de production ne sont pas les mêmes ? Il faut envisager des possibilités de diversification, au-delà de la seule voiture « verte ».

En ce qui concerne maintenant la solidarité des banques, thème qui a été abordé tout à l’heure, la société Faurecia a besoin de 150 000 euros pour financer les chèques-vacances de ses salariés. Or la banque, pour l’instant, lui refuse cette somme, alors que la situation de trésorerie de l’entreprise devrait permettre de satisfaire cette demande de concours. Pouvons-nous trouver des solutions pour résoudre ce type de problème ?

Par ailleurs, dans toutes ces entreprises, les salariés sont poussés à prendre des RTT et des jours de congés dès maintenant, mais qu’adviendra-t-il de leur vie familiale et de l’organisation du travail s’il ne leur reste que dix ou douze jours de congés à prendre pendant l’été ?

Comment, monsieur le secrétaire d’État, comptez-vous coordonner les multiples initiatives, rétablir la confiance du marché ?

Enfin, et surtout, quel suivi allez-vous proposer aux différents sites concernés ? J’approuve la suggestion de M. Martial Bourquin d’instaurer un suivi parlementaire : ce serait évidemment une très bonne solution.

La situation est anxiogène pour les salariés, le bassin d’emploi tout entier, ainsi que pour les élus.

Les Restos du cœur de Flers – la communauté d’agglomération compte environ 30 000 habitants – ont vu passer, depuis le début de leur campagne, de 160 à 370 le nombre de familles bénéficiaires de leur aide. Ils ont servi, depuis le mois de décembre, plus de 51 000 repas. Nous parlons ici non pas de chiffres, mais d’hommes, de femmes et d’enfants qui attendent de ce débat sinon des solutions, du moins quelques pistes susceptibles de leur redonner un peu d’espoir.

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