Intervention de Odette Terrade

Réunion du 12 mai 2011 à 9h30
Collectivités régies par l'article 73 de la constitution et collectivités de guyane et de martinique — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi organique et d'un projet de loi dans les textes de la commission

Photo de Odette TerradeOdette Terrade :

Un tel choix nous conduit à nous interroger sur les prolongements que ce projet de loi pourra connaître à moyen terme.

Ce que les événements des mois de février et mars 2009 ont prouvé, c’est que les sociétés ultramarines étaient marquées par de profondes inégalités sociales. Un sentiment non pas de fatalité devant l’état des choses, mais de blocage et d’absence de promotion sociale et/ou individuelle y est largement partagé.

Ainsi, pour la Martinique, ce mouvement a révélé, de manière évidente, que l’ensemble du commerce et une bonne partie des activités productrices étaient, de fait, contrôlés par un nombre extrêmement réduit de personnes, pour ne pas dire de familles, le plus souvent issues des anciennes lignées de planteurs ou d’une immigration plus récente venue de métropole, et que cette concentration s’opérait au détriment du plus grand nombre.

Si l’évolution statutaire et institutionnelle de la Martinique ne conduit nullement à modifier la situation des pouvoirs économiques et les rapports sociaux et si elle n’offre pas à la jeunesse locale, enfin, les moyens de développer pleinement ses potentiels et ses projets, elle n’aura pas servi à grand-chose. Pis, elle risquera fort de rendre la population méfiante envers toute autre évolution ultérieure et envers le mode de fonctionnement institutionnel qui lui est ici proposé.

La même observation vaut, bien entendu, pour la Guyane, où les problématiques urbaines, comme la protection et de la valorisation des espaces, se posent avec une acuité particulière.

En effet, sur un territoire où l’on compte 30 % de chômeurs – un taux encore plus élevé frappant les femmes et les jeunes, comme d’habitude –, où un grand nombre de logements sont encore dépourvus du confort le plus élémentaire, où de nombreux jeunes sortent du système scolaire sans la formation et les acquis leur permettant de prendre la place qu’ils méritent dans la société, il faudra sans doute autre chose qu’un simple ajustement institutionnel.

Si cette évolution peut conduire à d’autres changements, plus importants, pour les Guyanais, elle sera positive. Si tel n’est pas le cas, elle disqualifiera durablement toute tentative d’évolution qui ne s’appuierait pas sur une priorité accordée à la question sociale et aux problèmes économiques.

Ce constat nous amène, en particulier, à souligner le problème, sous-jacent, des moyens financiers dévolus aux nouvelles collectivités. Le regroupement des conseils généraux et régionaux provoque naturellement la fusion des compétences dévolues aux deux structures, mais aussi, évidemment, celle de leurs ressources propres, singulièrement des dotations budgétaires en vigueur.

Il nous a été indiqué que, parmi les objectifs du texte, figurait, notamment, la volonté de réaliser des économies, en supprimant les doublons. Je ne sais pas si cette formule est nécessairement la bonne, en particulier quand on constate, ce qui est plus que regrettable, une tendance forte à la réduction de la ligne budgétaire unique dévolue au financement du logement – ce point a encore été souligné il y a peu de temps.

Je crains même que nous ne devions être extrêmement vigilants quant à la suite des opérations, d’autant que le risque de nouveaux « délestages » de l’État vers les nouvelles collectivités existe bien.

Madame la ministre, mes chers collègues, sur la foi de ces observations, vous comprendrez aisément que notre groupe attende la fin de la discussion des articles pour déterminer son vote global sur ces deux projets de loi.

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