Intervention de André Vantomme

Réunion du 15 juillet 2009 à 21h45
Programmation militaire pour les années 2009 à 2014 — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de André VantommeAndré Vantomme :

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je souhaite vous parler des OPEX. Depuis vingt ans, la France projette en permanence 10 000 à 12 000 militaires dans des opérations extérieures. Ces effectifs s’ajoutent à ceux qui sont prépositionnés dans des pays avec lesquels nous avons signé des accords de défense.

Les OPEX coûtent cher et sont en augmentation continue. Les crédits pour 2008 s’élèvent à 852 millions et sont probablement sous-estimés, car tout laisse à penser que le coût de telles opérations ne devrait guère se réduire compte tenu de notre implication croissante en Afghanistan.

Cela a motivé la curiosité légitime de nos collègues de l’Assemblée nationale – rapport d’information n° 1790 de la mission d’évaluation et de contrôle sur le financement des OPEX –, ainsi que des magistrats de la deuxième chambre de la Cour des comptes, qui ont procédé à un contrôle sur ce thème.

Je ne saurais oublier les travaux menés depuis l’année dernière par la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées du Sénat, qui ont abouti à la publication d’un rapport intitulé Les opérations extérieures sous le contrôle du Parlement.

Cette curiosité et cet intérêt pour les OPEX paraissent particulièrement opportuns dans le cadre de la discussion de la loi de programmation militaire.

Le sujet est sensible, car, pendant des années, jusqu’en 2001, le financement des OPEX figurait trop souvent au sein des crédits d’équipement, qui servaient de variable ajustement.

Depuis 2005, une dotation est inscrite dans le projet de loi de finances initiale, complétée en loi de finances rectificative, le différentiel ayant contribué à la résorption des reports de crédits d’investissement – on y revient ! – de la loi relative à la programmation militaire pour les années 1997 à 2002.

Monsieur le ministre, votre loi de programmation prévoit une budgétisation plus complète et porte la provision en loi de finances initiale de 510 millions d’euros en 2009 à 570 millions d’euros en 2010 et à 630 millions d’euros en 2011. Elle précise que les crédits mis en réserve au titre des différents ministères pourront être mobilisés pour contribuer à résorber le différentiel.

Qu’en est-il de la sincérité budgétaire dans cette affaire ? La situation est paradoxale : d’un côté, vous demandez aux militaires un engagement fort et total, au péril de leur vie – vingt-sept morts en Afghanistan – et accroissez l’engagement de notre pays, notamment en Afghanistan ; de l’autre, vous ne savez pas inscrire en sincérité et en conformité avec notre droit budgétaire les sommes nécessaires dans le budget de l’État.

Ah ! le bel artifice que la réserve au titre des différents ministères ! Nous ne manquerons pas de nous intéresser à ce dispositif magique pour connaître les généreux contributeurs, qui, une fois le temps de l’annonce passée par leur politique de communication, auront à cœur, contraints et forcés, d’accomplir leur devoir à l’égard du budget de la défense et de renoncer à leur propre politique. S’agira-t-il de l’éducation nationale, de la santé, des affaires étrangères, de la justice ? Tout le monde aura sa « chance » !

Vous me permettrez, monsieur le ministre, puisque l’on traite aujourd’hui des opérations extérieures, de constater que, décidément, à l’étranger, nous avons beaucoup de difficultés avec la sincérité budgétaire. Votre éminent collègue des affaires étrangères continue, année après année, de comptabiliser, de façon extracomptable, les mêmes annulations de dettes vis-à-vis des pays pauvres, pour majorer artificiellement et d’une manière fallacieuse notre contribution à l’aide au développement. Vous-même, bien qu’en progrès, n’arrivez toujours pas à inscrire dans votre budget et dans la loi de programmation militaire la réalité des engagements extérieurs de notre pays.

Cette exigence de sincérité et de respect de notre droit budgétaire est d’autant plus nécessaire que le Parlement, mais aussi nos concitoyens sont informés des soupçons et des initiatives judiciaires à l’égard de ventes d’armement à l’étranger et des conséquences dommageables pour notre pays.

Dans le même temps, le bouclier du secret-défense s’agrandit et renforce le sentiment de soupçon. Attention à la contagion !

Surtout, l’exigence de sincérité budgétaire contribuera, j’en suis sûr, à mieux apprécier les évolutions que se doit de réserver le Parlement à ces très coûteux engagements en période de crise.

Monsieur le ministre, dans les quelques minutes qui me sont imparties, il n’est pas possible d’être trop bavard et d’aborder tous les aspects des OPEX. Je conclurai donc mon propos sur une interrogation : le courage et les sacrifices de nos militaires en Afghanistan, les efforts budgétaires consentis depuis sept ans sont-ils en rapport avec les résultats obtenus sur place quant aux progrès de nos valeurs et au partage de nos idéaux qui ont motivé notre engagement initial ? J’écouterai avec intérêt et attention votre réponse !

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