Au-delà des aléas, se pose, bien entendu, la question de l’indexation. Elle nous expose évidemment à quelques difficultés, notamment par rapport à la masse salariale, car les règles d’indexation risquent de provoquer des tensions dans l’exécution budgétaire. Mais je nous incite à voir les choses positivement : cette règle d’indexation jouera dans les deux sens, c’est-à-dire qu’elle nous protégera aussi dans l’hypothèse où l’inflation dépasserait son niveau actuel.
Dans le cadre d’une loi de programmation militaire glissante, avec un budget triennal, nous aurons à gérer cet aléa qui complique aujourd’hui l’exercice budgétaire, mais qui nous préservera le jour où l’inflation sera un peu plus élevée.
Pour ce qui est du financement de l’OTAN, nous avons à trouver les moyens d’assurer les surcoûts liés à la masse salariale supplémentaire. Il ne s’agit en aucun cas pour nous de procéder à de nouvelles réductions d’effectifs afin de financer ces postes complémentaires.
Sur l’A400M, en effet, un certain nombre d’incertitudes subsistent. Si nous abandonnons ce programme, il est fort probable – je parle sous le contrôle d’un expert qui a élaboré un rapport complet sur le sujet – que l’Europe doive renoncer pour des décennies à se doter d’une flotte militaire de transport tactique.
Les surcoûts éventuels, il faut en accepter l’idée et en discuter avec les industriels. Mais, d’ores et déjà, qui pourrait, dans cet hémicycle, prétendre qu’un seul programme militaire n’a jamais connu de surcoût ? Ce serait ignorer les sauts technologiques et industriels majeurs.
Ce programme a été, il est vrai, bâti sur une curiosité : c’est la première fois que l’on établissait un programme militaire à partir d’un contrat civil. Il n’empêche que, dans le combat que je mène avec nos partenaires européens pour préserver ce programme, j’ai en tête, au-delà des emplois et des bureaux d’études, le fait que son abandon signifierait pour les Européens le renoncement, pour les décennies à venir, à toute capacité de construction d’un avion de transport militaire. L’enjeu mérite d’accepter une part d’aléa.
Selon M. Reiner, nous n’aurions pas effectué des choix capacitaires. Mais si nous avons consenti une sérieuse réduction de nos moyens en artillerie et en blindés, n’est-ce pas la preuve de choix capacitaires ? Les restructurations et l’évolution de la carte militaire signifient que nous tirons définitivement les conséquences de l’absence de risques de conflit en Europe centrale. Nous avons opté pour une augmentation de nos moyens satellitaires et un renforcement de notre dissuasion par un système d’alerte avancée.
Monsieur Pintat, votre discours sur la défense antimissile, je le connais ; je l’ai entendu voilà près de vingt ans, quand je faisais partie du cabinet d’un ministre de la défense : des industriels incitaient déjà à se lancer dans la défense antimissile !
Il faut en avoir conscience : outre le fait qu’un tel choix nous engagerait sur le plan budgétaire, il emporterait quantité de problématiques. Sur quelle sorte de défense antimissile allons-nous jeter notre dévolu ? Sur une défense antimissile de théâtre ou sur une défense antimissile balistique ? Quel type de menace visons-nous ? Celle d’un État terroriste ou celle de pays fortement dotés sur le plan nucléaire ? Devons-nous agir seuls ? À l’évidence, c’est impossible ! Dans le cadre d’une alliance, qui détiendra la clé ? Qui disposera du pouvoir d’appréciation ? Qui aura la souveraineté sur les dispositifs ? Toutes ces questions méritent d’être posées ! Au regard du coût d’une telle opération, je vous entends d’ores et déjà nous rappeler la nécessité de financer tel ou tel programme dont nous aurions besoin au quotidien pour assurer nos capacités militaires.
S’il vient un jour à se poser, le choix de la défense antimissile devra être bien pesé, parce que, dans un budget forcément contraint, il nous imposerait des arbitrages cruciaux quant au financement des autres programmes. Pour ma part, je reste extrêmement réservé, car un tel choix ne peut se faire que dans le cadre d’une alliance. Je comprends cependant la volonté de développer le bloc 2 et l’évolution d’Aster.
Selon M. Reiner et Mme Demessine, il faudrait s’interroger sur le fait que le nombre de départs volontaires de militaires soit supérieur à la « déflation » prévue. Mais, dans le même temps, nous n’avons aucun problème de recrutement ! Nous assistons aujourd’hui à une forte remontée des vocations et l’attractivité du métier militaire reste entière. Donc, cessez de voir dans le fonctionnement de notre dispositif une interrogation majeure sur la vocation militaire !