Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 20 décembre 2007 à 11h10
Loi de finances rectificative pour 2007 — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, en remplacement de M. Philippe Marini, rapporteur pour le Sénat de la commission mixte paritaire :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en ce dernier jour de session, il me revient de vous présenter, au lieu et place de M. le rapporteur général de la commission des finances, retenu dans son département, les conclusions de la commission mixte paritaire, qui s'est tenue hier, mercredi en début d'après-midi, sur les dispositions restant en discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2007.

Permettez-moi ici de rendre hommage, en son absence, à la performance accomplie, une fois encore, par notre collègue Philippe Marini. Celui-ci, tout en rapportant avec tout le sens de l'écoute et de la pédagogie qu'on lui connaît la loi de finances pour 2008, a pu étudier et enrichir un projet de loi déjà porteur de mesures significatives.

Avant d'exposer les apports de cette commission mixte paritaire, il convient, comme il est de tradition, de fournir quelques éléments sur le bilan chiffré de ses travaux.

Aux 35 articles du projet de loi initial, le Sénat en a ajouté 39, à comparer aux quelque 43 introduits par l'Assemblée nationale.

Venons-en à présent à la commission mixte paritaire. Sur les 67 articles restant en discussion, il en est 45 qui résultent des votes du Sénat, en incluant les trois articles dont la suppression a été maintenue. Sur les 21 autres articles, tous, à l'exception d'un seul, résultent des délibérations de la commission mixte paritaire, y compris les six articles supprimés.

Ces quelques chiffres illustrent à la fois l'importance des apports du Sénat et la qualité des relations entre nos deux assemblées qui, sur de nombreux points, ont nourri des échanges fructueux, dépassant à plusieurs reprises les clivages partisans.

Compte tenu de cet excellent climat, c'est donc sans difficulté, vous l'imaginez, que la commission mixte paritaire est parvenue à un accord sur les dispositions restant en discussion.

Sur le fond, je voudrais essentiellement mettre l'accent sur les dispositifs les plus importants du projet de loi sur lesquels la commission mixte paritaire a suivi les analyses et adopté, à quelques modifications rédactionnelles près, les propositions du Sénat.

Le premier sujet de cette catégorie a été, à l'article 20, le régime fiscal des acquisitions ou constructions de logements bénéficiant d'un « Pass-Foncier ». Il s'agit d'un dispositif qui, tant à l'Assemblée nationale qu'au Sénat, avait suscité, convenons-en, des interrogations fortes.

Le Sénat avait, pour sa part, réduit la portée de ce texte en prévoyant que l'avantage fiscal, qui devrait être associé à ce « Pass-Foncier », se limiterait au seul taux de TVA réduit, à l'exclusion de tout gain en termes de foncier-bâti. En outre, le Sénat avait proposé de mettre le nouveau régime sous condition de durée, en limitant sa validité au 31 décembre 2009.

Nos collègues députés membres de la commission mixte paritaire ont non seulement suivi le Sénat, mais proposé de restreindre ce dispositif aux seules maisons individuelles, et donc d'en exclure les immeubles en copropriété.

Ainsi la commission mixte paritaire a-t-elle prolongé la réflexion du Sénat, en s'efforçant de mieux cibler un régime d'une rare complexité et sur l'efficacité duquel elle reste encore sceptique.

La deuxième question importante traitée par la commission mixte paritaire a trait au dispositif de réduction d'impôt sur la fortune pour investissement dans les petites et moyennes entreprises, introduit par l'Assemblée nationale à l'article 20 ter et largement remanié par le Sénat.

On se souvient des données du problème, telles qu'elles sont apparues cet été lors de la discussion du projet de loi dit « TEPA », c'est-à-dire en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat.

Votre commission des finances est favorable à un dispositif puissant, dans lequel l'avantage fiscal est justifié par une prise de risque directe, dans un rapport presque personnel entre l'investisseur et l'entreprise. Bref, nous souhaitions maintenir l'affectio societatis, ce qui explique que votre commission des finances se soit toujours montrée réservée en ce qui concerne l'octroi de la réduction d'impôt à des investissements intermédiés.

Pour tenir compte de certaines remarques, nous avions accepté, sur l'initiative de notre collègue Philippe Adnot, lors de la discussion du projet de loi TEPA, une première exception en faveur des fonds d'investissement de proximité, qui avait été encadrée et assortie d'un avantage fiscal moindre, de 50 % de l'investissement contre 75 % dans le cas d'un investissement direct ou d'un don à un organisme d'intérêt général, tel qu'une fondation pour la recherche.

Lors de la discussion du présent projet de loi de finances rectificative, l'Assemblée nationale avait cru bon d'assouplir ce dispositif et d'élargir la possibilité d'intermédiation au delà des seuls fonds d'investissements de proximité, en permettant aux investissements dans des fonds communs de placement à risques ou pour l'innovation de donner droit à la réduction d'impôt, dès lors que 40 % des fonds ainsi recueillis s'investissaient dans des entreprises de moins de cinq ans.

Parallèlement, l'Europe s'était invitée dans le débat, à partir du moment où les députés, voulant lever l'hypothèque que faisait peser sur l'efficacité de la réduction d'impôt l'application de la règle dite « de minimis », avaient délibérément placé ce régime dans le cadre des lignes directrices communautaires sur le capital investissement, qui permettent aux aides d'Etat de s'élever jusqu'à 1, 5 million d'euros, contre seulement 200 000 euros dans le régime de droit commun.

Or, il y avait là non seulement un « changement de philosophie » discutable, mais aussi le risque d'une paralysie d'un système que le législateur avait voulu simple, direct et immédiatement opérationnel.

Nos collègues députés, en effet, ne s'étaient pas rendu compte qu'ils retiraient aux bénéficiaires de la réduction d'impôt la possibilité d'investir dans des entreprises de proximité ne répondant pas aux critères relativement stricts qui permettent de faire jouer le plafond d'aides plus élevé des lignes directrices.

C'est pourquoi le Sénat avait voulu combiner les deux systèmes, en permettant d'investir à la fois dans des entreprises généralement quelconques sous le plafond de minimis de 200 000 euros et dans les entreprises en phase d'amorçage, de démarrage ou d'expansion visées par les lignes directrices.

Ce cumul est d'autant plus nécessaire que le bénéfice de ce régime pour les entreprises en expansion n'est accordé que dans des zones très limitées de notre territoire.

Un autre argument qui rendait un tel cumul indispensable est que le régime d'aide doit être validé par la Commission européenne.

Sur ce fondement, et en acceptant de relever de 15 000 à 20 000 euros le plafond de l'avantage fiscal pouvant résulter des investissements intermédiés, la commission mixte paritaire a validé la position du Sénat, tout en préservant, soulignons-le au passage, les dispositions insérées sur l'initiative de notre collègue Philippe Adnot.

Je précise, à cet égard, que ce nouveau plafond est immédiatement applicable et concerne également les fonds d'investissements de proximité, ce qui a permis à la commission mixte paritaire de supprimer l'article 20 sexies.

Un troisième sujet sensible a été discuté à l'article 22 quater relatif à la taxe dite « Poisson ». Alors que l'Assemblée nationale - qui, il est vrai, avait découvert le dispositif au dernier moment - avait accepté que le plan d'aide aux pêcheurs soit financé par une taxe prélevée en amont, le Sénat a préféré une taxe perçue en aval, assortie d'une franchise élevée fixée à 763 000 euros, soit le niveau en deçà duquel les entreprises bénéficient du régime simplifié de TVA.

Toutefois, cette lecture est éventuellement un peu rapide. Le seuil du régime simplifié est sensiblement inférieur à 763 000 euros, me semble-t-il. Peut-être faudra-t-il revenir sur cette rédaction dans quelques instants.

Je ne m'étendrai guère, à ce stade, sur la logique économique qui sous-tend cette taxe, car je suis conscient qu'il n'y avait sans doute pas de bonne solution.

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