Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 20 décembre 2007 à 11h10
Loi de finances rectificative pour 2007 — Adoption des conclusions modifiées du rapport d'une commission mixe paritaire

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, rapporteur :

De fait, après un large échange de vues, la commission mixte paritaire a considéré qu'il s'agissait, à bien des égards, de la moins mauvaise des solutions.

C'est elle qui devrait éviter une répercussion trop brutale de la taxe, soit en amont sur les pêcheurs, qu'il s'agit précisément d'aider, soit en aval, à l'échelle du commerce de détail, qui n'a pas besoin d'une entrave supplémentaire à l'exercice de son activité.

L'article 23 a été l'occasion pour la commission mixte paritaire de confirmer les avancées obtenues par le Sénat. Ont ainsi été exonérées de la taxe intérieure de consommation sur le gaz naturel, la TICGN, à la fois les véhicules de transport public ou les bennes de ramassage et les réseaux de chaleur. En outre, l'exonération jusqu'au 1er janvier 2009 des livraisons de gaz faites aux autorités régionales et locales, ainsi qu'aux autres organismes de droit public, a été confirmée.

Enfin, toujours à l'article 23, la commission mixte paritaire a repris la mesure, introduite par le Sénat, abaissant le taux de taxe intérieure sur les produits pétroliers applicable au super-éthanol E 85, afin de tenir un engagement qu'elle avait pris à l'égard de notre collègue député Charles de Courson lors de la discussion de la commission mixte paritaire du projet de loi de finances pour 2008.

En ce qui concerne un quatrième et dernier sujet substantiel, connu sous l'appellation « d'écopastille » applicable aux véhicules terrestres à moteur, la commission mixte paritaire a d'abord confirmé l'exonération de malus pour les véhicules achetés avant le 5 décembre 2007, introduite au Sénat sur l'initiative de notre collègue Philippe Dallier.

Toutefois, elle a également supprimé l'abattement de 50 % sur le montant du malus applicable aux véhicules fonctionnant au super-éthanol E 85. Il y a là, je n'en doute pas, une décision qui décevra nombre des plus farouches partisans des biocarburants au sein de notre Haute Assemblée, mais la commission mixte paritaire s'est rendue aux arguments de l'Assemblée nationale pour considérer qu'il fallait s'en tenir à des critères objectifs de rejet de CO2 dans l'atmosphère, indépendamment de la nature du carburant.

À l'issue de cette revue des questions les plus marquantes de ce collectif budgétaire, je voudrais aussi évoquer brièvement les autres points qui ont fait l'objet des délibérations de la commission mixte paritaire, après avoir signalé le grand nombre d'initiatives individuelles d'origine sénatoriale - dues, notamment, à notre collègue Alain Lambert - qui ont été retenues par la commission mixte paritaire.

En premier lieu, je voudrais me féliciter, à titre personnel, de la confirmation par la commission mixte paritaire de la suppression du prélèvement introduit à l'Assemblée nationale sur le produit des paris hippiques au profit des communes d'implantation d'hippodromes. Sans doute, monsieur le ministre, faudra-t-il dédommager les communes qui, tout en faisant des efforts, subissent un préjudice.

Il y avait là un prélèvement qui, en dépit de sa modicité, 0, 1 %, et de son plafonnement à 500 000 euros par commune aurait pu porter atteinte au caractère attractif des jeux et nuire à l'ensemble de la filière dans un contexte rendu incertain par le processus de libéralisation en cours sur le plan européen.

Il ne me paraissait pas légitime de concentrer le produit de ce prélèvement sur les seules communes, alors qu'elles bénéficient incontestablement de l'effet d'attraction exercé par les hippodromes et qu'elles ne sont pas, dans de nombreux cas, les seules collectivités à entretenir des champs de course ou à investir dans ceux-ci. Certains départements, certaines régions font des efforts et participent également au financement des hippodromes, alors que d'autres communes ne font rien.

Permettez-moi également, à titre personnel, de regretter que la commission mixte paritaire ait, pour des raisons budgétaires évidentes - la mesure coûte de 300 millions à 400 millions d'euros - supprimé l'article 7 A, introduit au Sénat par nos collègues Michel Houel, Jacques Gautier et Colette Mélot, tendant à exclure de la majoration de 25 % applicable aux revenus professionnels les contribuables faisant appel aux services d'un comptable ou d'un expert-comptable non salarié, en tout état de cause, agréé par la direction générale des impôts. Il est ubuesque de redresser de 25 % les revenus des professionnels indépendants, artisans, commerçants, professions libérales, agriculteurs, qui ne font pas appel au service d'un centre de gestion ou d'une association de gestion agréée.

Ma conviction est que le système mis en place à compter de la loi de finances pour 2006 ne pourra pas rester indéfiniment en l'état, tant il est absurde de présumer que les professionnels qui n'adhèrent pas à un centre de gestion agréé, sont tous des fraudeurs.

Parmi les autres mesures sur lesquelles la commission mixte paritaire a dû statuer, il est un certain nombre de niches fiscales.

Pour certaines d'entre elles, la commission mixte paritaire a accepté de les valider dans la version votée, parfois non sans hésitation, par le Sénat, qu'il s'agisse des exonérations de taxe professionnelle dont devraient bénéficier les librairies indépendantes de référence, ou du crédit d'impôt pour les dépenses de création de jeux vidéo, mesure introduite par le Sénat sur l'initiative de notre collègue Jacques Valade. En revanche, l'exonération de taxe professionnelle pour les activités de portage à domicile a été supprimée par la commission mixte paritaire.

De même, d'autres mesures touchant aux collectivités locales méritent d'être mentionnées, car elles témoignent de l'esprit d'ouverture du Sénat et de la commission mixte paritaire face aux initiatives portées par nos collègues de l'opposition.

C'est ainsi que la commission mixte paritaire a validé l'article 26 septies relatif au régime d'écrêtement des établissements publics de coopération intercommunale à taxe professionnelle unique au titre des fonds départementaux de péréquation de la taxe professionnelle lors de transferts d'entreprises au sein d'un même établissement public de coopération intercommunale, initiative de notre collègue Nicole Bricq, qui avait donné lieu à un sous-amendement défendu par nos collègues Georges Mouly et Aymeri de Montesquiou.

L'autre sujet « transpartisan » a été la confirmation par la commission mixte paritaire de l'article 26 octies relatif à la répartition de la taxe sur les spectacles entre la commune d'accueil, les collectivités maîtres d'ouvrage et les collectivités gestionnaires de l'équipement sportif concerné.

Je terminerai cet inventaire à la Prévert, classique pour une commission mixte paritaire, par trois sujets.

Premier sujet : l'instauration de la possibilité pour les commissions départementales des impôts ou les commissions de conciliation, ainsi que la commission nationale des impôts, de faire appel à une expertise extérieure à la demande du contribuable, et à ses frais. Il s'agit là d'un pas non négligeable pour amener l'administration fiscale à nouer un dialogue plus égalitaire entre le contribuable, qui est la contrepartie de la lutte contre la fraude que le présent projet de loi de finances rectificative tend précisément à renforcer.

Deuxième sujet : l'acceptation par la commission mixte paritaire de la réforme des taxes communales sur la publicité, votée à l'unanimité sur la proposition de notre rapporteur général et dont l'entrée en vigueur prévue seulement d'ici à 2009 devrait permettre de procéder à d'éventuels ajustements d'assiette ou de tarif pour tenir compte des réactions qu'une telle initiative ne devrait pas manquer de susciter. Évoquée à maintes reprises, cette réforme avait été sans cesse ajournée. Je me réjouis de cette concordance de vues entre les députés et les sénateurs, pour rendre cette réglementation cohérente et adaptée.

Troisième sujet : la création d'une commission nationale d'évaluation applicable aux collectivités territoriales, à la suite de l'initiative de notre collègue Alain Lambert. Les modifications apportées en commission mixte paritaire, adoptées sous la surveillance étroite de notre collègue Michel Charasse, signataire au Sénat d'un amendement ayant le même objet, ne devraient pas en dénaturer l'esprit consistant à éviter que les collectivités territoriales ne subissent des augmentations de charges rampantes par suite de la multiplication de normes dans tous les domaines. À cet égard, il nous arrive, en notre qualité de législateur, de participer à l'alourdissement des charges incombant aux collectivités territoriales.

Je souhaite terminer cette revue des apports de la commission mixte paritaire en observant que ces délibérations ne devraient pas affecter le solde prévu pour 2007, dont le montant est resté inchangé entre les lectures à l'Assemblée nationale et au Sénat. Peut-être faudra-t-il toutefois revenir sur la prise en charge de l'exonération intégrale de la redevance audiovisuelle pour les personnes de soixante-cinq ans disposant de revenus modestes.

Cela étant dit, face aux perspectives de ralentissement économique, je dirais volontiers, à la suite du Premier ministre dans une interview récente : « Restons vigilants ! ».

Nul doute que, au vu des incertitudes résultant de la crise des subprimes, l'exécution 2007, qui se présente donc favorablement avec une amélioration du solde de plus de 3, 7 milliards d'euros, il faudra veiller à ce que ce solde soit tenu. Peut-être, monsieur le ministre, disposez-vous déjà des premières indications sur les rentrées de l'impôt sur les sociétés, qui conditionnent la capacité du Gouvernement à atteindre les objectifs ambitieux affichés par la présente loi de finances rectificative.

Compte tenu de tous ces aléas, je ne puis donc qu'inciter le Gouvernement à faire preuve d'une totale détermination à tenir ses objectifs, en lui donnant rendez-vous lors de l'examen du projet de loi de règlement du budget de l'année 2007, qui ne manquera pas de se révéler le moment de vérité budgétaire. On verra alors dans quelle mesure les ambitions affichées dans le présent collectif se traduiront dans la réalité.

En dernier lieu, comme il est de coutume en cette fin d'année, je ne voudrais pas achever cet exposé sans procéder aux remerciements d'usage et sans former des voeux pour que tous ici profitent des fêtes de fin d'année afin de récupérer des fatigues résultant de cette session budgétaire.

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, joyeux Noël et heureuse année 2008 !

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