Intervention de Michèle Alliot-Marie

Réunion du 16 décembre 2008 à 16h00
Gendarmerie nationale — Discussion générale

Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales :

Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires étrangères, messieurs les rapporteurs, mesdames, messieurs les sénateurs, les évènements de ce jour soulignent les exigences de sécurité au service de la protection de nos concitoyens.

Ce matin, à la suite d’une revendication adressée à l’Agence France-presse, des bâtons de dynamite ont été découverts dans un grand magasin. Heureusement, ils ne contenaient pas d’éléments susceptibles de produire une détonation. Mais ce fait est évidemment préoccupant.

La revendication provient d’un groupe inconnu de tous nos services de sécurité. Les forces de l’ordre sont immédiatement intervenues. Ainsi, avec une très grande réactivité, elles ont mis en place un cordon de sécurité bloquant les rues adjacentes et procédé à l’évacuation des personnes qui se trouvaient à l’intérieur de ce grand magasin et qui, bien sûr, étaient particulièrement nombreuses quelques jours avant Noël. Elles ont ensuite effectué les perquisitions nécessaires, qui ont permis la découverte de la charge.

L’enquête est évidemment en cours pour tenter de déterminer l’origine de ces bâtons de dynamite et identifier les auteurs du dépôt et de la revendication, en vue de leur interpellation et de leur traduction devant la justice.

Par ailleurs, compte tenu de la période sensible que nous traversons, j’ai décidé de renforcer les effectifs employés à la sécurisation de Paris et des grandes villes de province. Dès demain, je tiendrai une réunion consacrée à la sécurité durant cette période, avec les services de police et de gendarmerie, les services de renseignements, les services de sécurité de la RATP, de la SNCF, des grands magasins et d’Aéroports de Paris.

Nous devons faire preuve de prudence et de sérénité, mais il nous faut aussi être vigilants et déterminés. C’est ce que nous faisons chaque fois que la sécurité de nos concitoyens est en jeu.

Cela a un rapport très direct avec le projet de loi que j’ai l’honneur de présenter à la Haute Assemblée aujourd’hui et qui organise le rattachement organique et budgétaire de la gendarmerie nationale au ministère de l’intérieur.

Je n’ai pas besoin de le préciser, surtout ici, la gendarmerie est une force armée, chargée de la sûreté et de la sécurité publiques. Elle l’est aujourd’hui ; elle le restera demain.

Depuis la loi du 28 germinal an VI, aucune loi n’a été adoptée sur le statut et les missions de la gendarmerie nationale.

Pour la première fois dans l’histoire de notre République, les deux forces de sécurité, civile et militaire, seront placées sous la responsabilité pleine et entière du ministre de l’intérieur, même si, depuis 2002, la gendarmerie est déjà placée pour emploi, pour ses missions sur le territoire, sous la responsabilité du ministre de l’intérieur.

Ce rattachement est important au moment où je souhaite constituer un grand ministère moderne de la sécurité, au service de la protection des Français. La gendarmerie nationale doit y tenir toute sa place. Le projet de loi vise à lui donner les moyens de participer pleinement à la mise en place de ce grand ministère. Il répond ainsi à une exigence de modernisation et d’efficacité. Dans le même temps, il conforte l’identité militaire de la gendarmerie, car c’est aussi une condition de cette modernisation et de cette efficacité.

Le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur est logique.

Premièrement, l’environnement de la sécurité intérieure se modifiant, l’organisation de celle-ci doit évoluer.

Le poids des missions de sécurité intérieure de la gendarmerie a justifié son rattachement pour emploi au ministère de l’intérieur en 2002. Aujourd’hui, il faut aller au bout de la démarche.

Vous l’avez souvent souligné au sein de la Haute Assemblée, la séparation entre les missions et les moyens nécessaires à leur exécution se révèle artificielle. Confier le budget au responsable de l’emploi constitue une exigence de rationalité et d’efficacité.

D’ailleurs, l’esprit de la LOLF et, temporairement, les contraintes budgétaires imposent plus que jamais la cohérence des actions de l’État. Que la mission « Sécurité » dépende du ministre de l’intérieur au travers des deux programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » est donc logique et nous fera progresser. En effet, les mutualisations et regroupements de marchés, facilités par le rapprochement en matière de gestion des moyens, nous permettront d’améliorer à la fois les coûts et l’interopérabilité entre les forces de la police nationale et de la gendarmerie nationale.

Deuxièmement, le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur permettra de moderniser un certain nombre de procédures qui, parfois, datent du XIXe siècle.

Il en va ainsi de l’abandon de la procédure de réquisition pour l’engagement des unités de gendarmerie au maintien de l’ordre. Permettez-moi d’insister un peu sur ce point, qui, je le sais, a fait débat, notamment au sein de vos commissions.

Je rappelle que la réquisition permet à l’autorité civile d’obtenir la mise en œuvre de moyens dont elle ne dispose pas normalement, notamment les forces armées pour le maintien de l’ordre. C’est un héritage de la Révolution qui a été ensuite transcrit dans le code de la défense.

Mais dès lors que la gendarmerie est placée sous l’autorité du ministre de l’intérieur, cette procédure formelle n’a plus lieu d’être, quand bien même la gendarmerie reste une force militaire. Il serait quand même assez peu cohérent que le ministre soit contraint de requérir une force dont il dispose.

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