Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, mon propos sera très bref, car nous avons, me semble-t-il, dit tout ce que nous avions à dire jeudi dernier, même si ce fut dans des conditions un peu difficiles. En effet, il n'était pas très facile de nous faire entendre, car, à un moment donné, nous avons dû faire face à un « front reconstitué ».
A l'issue d'une procédure parlementaire accélérée, destinée à débattre de textes qui seront finalisés et publiés pendant l'été, un fait est sûr : il n'existe pas, il faut le dire très clairement, de plan Villepin pour l'emploi. Il existe des mesures, qui se trouvaient déjà dans les tiroirs des gouvernements Raffarin I, II et III et que l'on a ressorties, en les habillant, pour constituer un ensemble. La seule vraie mesure novatrice, c'est le CNE, le contrat « nouvelles embauches », à propos duquel, vous le savez - j'y reviendrai tout à l'heure -, nous sommes extrêmement critiques.
C'est d'ailleurs la raison pour laquelle bien peu de nos questions ont obtenu une réponse, même si, monsieur le ministre, vous avez fait un petit effort pour répondre à quelques-unes de nos interrogations. Mais il est vrai que certaines réponses ne peuvent pas être faites !
Nous sommes tout bonnement en présence d'un arsenal de mesures correspondant précisément aux revendications récurrentes du MEDEF. M. Seillières peut partir, car sa mission, me semble-t-il, est accomplie. A Mme Parisot de se montrer, en apparence, momentanément plus ouverte.
Parmi les différents dispositifs que vous nous avez si brièvement exposés, un seul, sans doute, l'extension du service militaire adapté, ne pose pas de problème majeur, même si une telle mesure est adoptée dans la précipitation et sans que nous ayons obtenu de réponse à l'ensemble des questions que nous avons posées.
Pour le reste, il s'agit d'attaques frontales contre la représentation syndicale et, donc, contre le dialogue social, lequel ne représente à vos yeux qu'une expression servant à masquer le refus du patronat de concéder quoi que ce soit aux salariés.
Sous le prétexte d'une mesure intéressante concernant l'apprentissage et destinée à aider les jeunes non diplômés à accéder à ces catégories d'emplois, le statut de la fonction publique fait l'objet d'une nouvelle attaque.
Chacun sait qu'une telle mesure est prise par ordonnance pour éviter une négociation difficile avec les syndicats sur les conséquences de sa mise en oeuvre. En effet, les précédentes négociations qui ont eu lieu en juin n'ont pas abouti.
Vous proposez par ailleurs des mesures parfaitement traditionnelles pour faire reculer les effets des seuils sociaux et pour officiellement simplifier les formalités d'embauche et de paiement. Cela aboutira en réalité à dématérialiser le contrat de travail et à priver le salarié de bulletins de salaire. Il ne pourra donc même plus s'assurer qu'il a été payé pour les heures effectuées.
En outre, s'il est employé grâce à un contrat « nouvelles embauches », il sera dépourvu d'une bonne partie, pour ne pas dire de la totalité, des droits et des garanties élémentaires. Avec ce contrat, vous avez accompli le rêve du patronat : revenir à une situation que seuls les plus anciens ont connue, celle d'avant le CDI, d'avant les procédures de licenciement, quand le patron était totalement libre de « virer » - c'est le terme qui convient ! - un salarié dans l'heure, sans motif ni procédure. En fait, ce contrat n'est pas nouveau ; vous l'avez plutôt sorti des oubliettes de l'histoire sociale.
Un tel dispositif est à l'opposé de la notion d'entreprise citoyenne. Ce mode de gestion, en s'attaquant à cet élément important qu'est un travail stable, est plutôt un facteur de déstabilisation de la citoyenneté.
Dès aujourd'hui, la négociation sur l'assurance chômage prévue à l'automne s'annonce difficile. En effet, la nouvelle ampleur que souhaite donner le MEDEF au contrat « nouvelles embauches » laisse présager le pire, non seulement au regard du déni du droit, mais aussi parce que les salariés qui auront été virés - on ne peut même plus dire licenciés - dépendront de la solidarité nationale et non pas du régime paritaire d'assurance chômage.