Intervention de Luc Chatel

Réunion du 10 avril 2008 à 10h30
Commercialisation et utilisation de certains engins motorisés — Adoption d'une proposition de loi

Luc Chatel, secrétaire d'État chargé de l'industrie et de la consommation :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, vous allez examiner ce matin une proposition de loi adoptée par l'Assemblée nationale qui concerne directement la vie quotidienne des Français.

Vous le savez, malgré l'interdiction de circulation des mini-motos sur la voie publique, dont on pouvait légitimement penser qu'elle serait suffisante pour protéger les citoyens et les consommateurs, le problème reste entier. L'actualité récente est malheureusement là pour nous le rappeler.

Consciente de cette lacune, la représentation nationale a réagi vite et fort. Dès le mois d'octobre dernier, les députés du groupe UMP de l'Assemblée nationale ont ainsi constitué un groupe de travail qui a immédiatement engagé des consultations. Cette démarche a permis d'aboutir à des propositions concrètes et constructives qui rejoignaient les conclusions d'autres travaux réalisés par des élus locaux de la région parisienne, appartenant à toutes les sensibilités politiques et directement concernés par cette question. Le résultat de cette concertation revêt la forme de la proposition de loi que nous examinons aujourd'hui.

À la suite de l'adoption de cette proposition de loi en première lecture par l'Assemblée nationale, le 5 février dernier, la commission des lois du Sénat et, en particulier, son rapporteur, M. Jean-Patrick Courtois, ont procédé à un travail remarquable de réécriture et de clarification du texte, tout en respectant en tout point l'objectif fixé. Je remercie le président de la commission des lois d'avoir encouragé la réalisation de ce travail par la Haute Assemblée.

II est incontestable que l'actuel dispositif juridique encadrant l'utilisation des mini-motos ou engins motorisés assimilés n'offre pas toutes les garanties de sécurité, pour les utilisateurs eux-mêmes comme pour les tiers.

Les données collectées dans le cadre de l'enquête permanente sur les accidents de la vie courante montrent qu'une trentaine d'accidents impliquant des mini-motos surviennent chaque année ; l'actualité récente en témoigne également : il suffit de rappeler les accidents tragiques survenus ces derniers mois en France, où des adolescents sont décédés alors qu'ils roulaient sur la voie publique sans casque. Les conséquences de tels agissements sont tout à fait dramatiques.

Compte tenu de l'usage trop souvent inapproprié de ces engins et de leurs caractéristiques propres, notamment leur petite dimension combinée à une vitesse importante, il apparaît nécessaire de faire prendre conscience aux consommateurs, et au public en général, que ces véhicules doivent être utilisés dans un cadre strict et en aucun cas comme un simple vélo ou une trottinette.

Des mesures appropriées s'imposent donc dans le respect du cadre juridique communautaire. Pour les engins qui nous occupent aujourd'hui, la Commission européenne a précisé de manière explicite, dans un courrier adressé le 6 juillet 2006, que les « États membres peuvent réglementer leur utilisation conformément à leur droit national ». Dès lors, mesdames, messieurs les sénateurs, aucun obstacle juridique ne s'oppose à ce que des mesures soient prises afin d'encadrer cette utilisation tant au niveau de l'âge des utilisateurs que des lieux de pratique.

Quant aux mesures envisagées, la proposition de loi examinée aujourd'hui me paraît aller tout à fait dans le sens souhaité par le Gouvernement.

Elle prévoit de limiter la pratique de la mini-moto aux terrains spécialement aménagés et de réserver l'usage de ces engins par les mineurs de moins de 14 ans à la seule pratique sportive dans le cadre d'une association sportive agréée. Elle prévoit également l'interdiction de la vente de ces produits à des mineurs, ce qui peut paraître une évidence, mais qui permet de répondre à la nécessité de sensibiliser et de responsabiliser les professionnels ; le Gouvernement y souscrit pleinement.

Votre rapporteur propose de mettre en place une obligation nouvelle d'identification des engins. Cette disposition permettra d'établir leur traçabilité, tout en responsabilisant leurs propriétaires et donnera aux forces de l'ordre les moyens d'effectuer leurs contrôles dans des conditions réalistes.

Toutes ces mesures apparaissent donc proportionnées et adaptées pour limiter les risques d'accidents, en particulier pour les jeunes utilisateurs qui en sont les principales victimes.

Enfin, il est également indispensable d'assortir ces mesures de sanctions pénales fortes. Il s'agit en particulier de viser les utilisateurs qui méconnaissent la loi ainsi que les professionnels qui, en vendant aux mineurs des mini-motos ou en les mettant à disposition dans des conditions non autorisées, leur font courir des risques inacceptables.

Afin de compléter ce dispositif législatif, le Gouvernement s'est engagé à prendre des mesures destinées à renforcer la sécurité dans le cadre de l'utilisation des engins en cause.

Je rappelle au préalable que les pouvoirs publics agissent déjà pour vérifier la sécurité de ces engins. Ainsi, la direction générale des douanes et droits indirects effectue des contrôles à l'importation des produits originaires de pays tiers, sur le fondement de l'article L. 233-5 du code du travail et de l'article 38 du code des douanes. Les contrôles menés en 2006 et 2007 ont conduit à constater que quatre cinquièmes des lots contrôlés étaient non conformes ou dangereux. Cette situation préoccupante a conduit la direction générale des douanes à proposer à la Commission européenne de soumettre ces produits, en 2008, à un contrôle plus rigoureux des douanes de l'Union européenne. Elle renforcera également sa campagne de contrôle en 2008 sur les produits provenant de pays tiers.

La direction générale de la concurrence et de la répression des fraudes, pour sa part, vérifie le respect de la réglementation spécifique, c'est-à-dire l'application du code du travail, et intervient notamment auprès des vendeurs spécialisés en motocycles ou des grandes surfaces. Il s'agit en particulier de vérifier la présence du marquage CE, présumant de la conformité du produit, d'examiner sur un plan visuel l'éventualité de défauts de conception et, enfin, de s'assurer que l'information donnée au consommateur sur les conditions d'utilisation est pertinente et loyale.

Une enquête réalisée en 2007 auprès de deux cents établissements a montré que cette information était généralement bien communiquée, puisqu'un taux d'anomalies inférieur à 1 % a été relevé. Les problèmes de sécurité associés à un défaut de conception ou de conformité ont, quant à eux, représenté moins de 2, 5 % du total des engins contrôlés.

Les mesures complémentaires que le Gouvernement entend prendre portent sur la normalisation des produits, qui fait l'objet de travaux communautaires récemment lancés. Il s'agira, pour la France, de veiller à ce que soient établis des niveaux d'exigence fondés sur des critères d'adéquation entre le poids, la taille, l'âge des conducteurs et la puissance des machines. Il importe, en effet, que les professionnels et les services de contrôle disposent d'un référentiel de sécurité adapté à tous les utilisateurs en fonction de leurs caractéristiques propres.

Le Gouvernement envisage enfin de réglementer l'information donnée au public sur les restrictions d'utilisation des mini-motos. Ces mesures réglementaires, qui devront probablement être relayées par des campagnes d'information, paraissent indispensables pour prévenir la circulation sur les voies publiques, qui est souvent à l'origine de l'accidentologie constatée.

Mesdames, messieurs les sénateurs, vous l'aurez compris, le Gouvernement souscrit pleinement aux dispositions de la présente proposition de loi. Ce texte fort et équilibré vient renforcer la protection, mais aussi les devoirs du consommateur comme ceux du professionnel. Le Gouvernement se réjouit de cette initiative parlementaire, issue de l'Assemblée nationale et enrichie, ici-même au Sénat, sous la conduite du rapporteur Jean-Patrick Courtois. Il émettra donc un avis favorable à cette proposition de loi.

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