Intervention de Jean-Pierre Michel

Réunion du 3 février 2009 à 10h00
Questions orales — Situation de l'ompi en france

Photo de Jean-Pierre MichelJean-Pierre Michel :

Du fait de l’organisation de nos débats, j’ai déposé ma question voilà plusieurs semaines. Le contexte ayant évolué, vous me permettrez, monsieur le secrétaire d’État, de modifier légèrement le contenu de ma question.

Je souhaite appeler l’attention de M. le ministre des affaires étrangères et européennes sur la décision du tribunal de première instance des Communautés européennes concernant l’Organisation des Moudjahidines du peuple d’Iran, l’OMPI, principal mouvement d’opposition iranienne, membre de la Commission du Conseil national de la Résistance iranienne présidée par Mme Maryam Radjavi. Cette décision du 4 décembre 2008 a annulé la décision du Conseil des ministres de l’Union européenne du 15 juillet 2008, qui réinscrivait l’OMPI, à la demande de la France, assumant alors la Présidence de l’Union européenne, sur la liste des organisations terroristes.

Cet arrêt, assez sévère, précise que le Conseil des ministres a violé les droits de la défense et porté atteinte au droit fondamental de l’OMPI à un contrôle juridictionnel effectif et qu’il n’a pas pu démontrer que l’OMPI était impliqué dans le terrorisme. Il est ajouté que les éléments du dossier fourni par la France au Conseil ne sont pas fondés sur des données « exactes et pertinentes » qui satisferaient aux exigences de preuve et qu’en outre le Conseil n’a pas expliqué les raisons spécifiques pour lesquelles les actes imputables à des individus prétendument membres de l’OMPI doivent être imputés à cette organisation.

Aussi, l’appréciation donnée par le Conseil des ministres proviendrait, selon le tribunal de Luxembourg, non pas d’une autorité judiciaire compétente et indépendante, mais du ministère des affaires étrangères français. De plus, la France, sous prétexte de confidentialité, n’a pas accepté de soumettre ses preuves au tribunal. On verra tout à l’heure pourquoi !

Cet arrêt fait suite à de nombreux autres, notamment à l’arrêt prononcé par la plus haute juridiction britannique, qui a enjoint à son gouvernement de supprimer l’OMPI de sa liste des organisations terroristes, disposition que la Chambre des Communes a adoptée à l’unanimité. Ces multiples décisions ont affirmé sans exception que l’OMPI n’était pas une organisation terroriste et qu’elle n’entendait pas le devenir.

Enfin, le 17 décembre dernier, le tribunal de première instance des Communautés européennes a jugé que la demande du Conseil était irrecevable et que sa décision du 4 décembre était exécutoire.

Le Conseil des ministres a maintenu l’OMPI sur la liste des organisations terroristes, et ce jusqu’à lundi dernier. Entre-temps, la France a fait savoir par la voix de M. Kouchner, notamment lors de son audition devant la commission des affaires étrangères du Sénat, qu’elle n’entendait pas se soumettre à la décision des autorités judiciaires européennes.

Aujourd’hui, le Conseil des ministres a dû se plier, sur un plan tant juridique que politique, car tous les États membres n’étaient pas du même avis, aux décisions de la justice européenne. C’est bien le moins !

L’OMPI a donc été radiée, le 26 janvier dernier, de la liste des organisations terroristes. M. Kouchner, ministre des affaires étrangères et européennes, et M. Bruno Le Maire, secrétaire d’État chargé des affaires européennes, ont déclaré lors d’une conférence de presse qu’il s’agissait d’une décision d’ordre judiciaire, qu’ils n’approuvaient pas cette décision, que le problème politique restait entier et que la France se réservait le droit de faire appel de cette décision. On est d’ailleurs en droit de se demander auprès de qui. Peut-être pourrez-vous me répondre sur ce point, monsieur le secrétaire d’État ?

Ma question, qui n’a pas changé sur le fond, est la suivante : quelle est vraiment la position de la France ? Pourquoi s’acharne-t-elle à demander que l’OMPI demeure inscrite sur la liste des organisations terroristes, nonobstant toutes les décisions judiciaires, notamment européennes ? S’agit-il vraiment de satisfaire les demandes du régime iranien ?

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