La rédaction de l’article 20 me donne l’impression de laisser de côté une dimension importante. L’amendement n° 744 vise donc à inscrire clairement dans le texte que la biodiversité doit être considérée non pas comme un obstacle qu’il faudrait lever, comme une contrainte dont il faudrait s’affranchir, mais comme un atout, comme une ressource, voire comme un facteur de production. Voilà qui nous ramène à la question agricole !
Trop longtemps, le développement agricole a reposé sur la mécanisation, c’est-à-dire sur l’économie du facteur travail, l’« artificialisation » du milieu et des pratiques : je pense notamment aux élevages hors sol, aux intrants chimiques, à la sélection tournée vers la hausse des rendements plutôt que vers la résistance aux maladies.
Il fut une époque, c’est vrai, où l’objectif prioritaire était d’accroître les rendements. Aujourd’hui, les enjeux sont autres : nous devons préserver l’emploi dans l’agriculture et reconsidérer le rapport entre l’agriculture et l’environnement.
Je souhaite donc, à travers cet amendement, montrer que l’espace agricole, qui occupe l’essentiel de l’espace français, ne doit pas être considéré comme un espace à part, traversé par une trame verte, mais qu’il constitue lui-même un espace de biodiversité, et que l’agriculture a aussi pour fonction de valoriser cette biodiversité.
Peut-être est-ce du fait de mon passé d’ingénieur agronome que j’insiste : nous devons inscrire dans la loi cette nécessité de prendre le tournant de l’agro-écologie, laquelle ne se confond pas avec l’agriculture biologique ; l’agro-écologie consiste seulement à remettre à l’ordre du jour l’agronomie, les pratiques agricoles intégrées, celles qui valorisent déjà les phénomènes naturels.
Je conclurai en rappelant que Guy Paillotin, ancien président de l’INRA, aujourd’hui secrétaire perpétuel de l’Académie d’agriculture de France, nous a déclaré, lorsqu’il a été entendu par la commission des affaires économiques, non pas que l’agriculture allait dans le mur, mais qu’elle était dans le mur !
Nous devons entendre ce message et considérer que l’agriculture, sans forcément devenir agriculture biologique, doit prendre le virage de l’agro-écologie.