Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, appliqué en France depuis le 1er juillet 1992, le dispositif du permis à points est un élément essentiel de la politique de lutte contre l’insécurité routière menée avec détermination par les pouvoirs publics.
Faire passer la sécurité pour tous avant son intérêt personnel, c’est ce qui sous-tend la mise en œuvre du permis à points, qui a été, depuis lors, adopté par de nombreux pays européens. Chaque conducteur devrait avoir cet état d’esprit dès qu’il utilise son véhicule.
Mais ce dispositif a avant tout contribué à des résultats remarquables en termes de vies épargnées et de diminution du nombre des personnes blessées. Depuis trente ans, la courbe du nombre des tués diminue régulièrement de façon linéaire du fait de l’application du permis à points, mais également grâce aux airbags, aux systèmes de freinage, au rajeunissement du parc automobile, aux contrôles techniques et aux aménagements routiers. Deux vies sur trois ont ainsi été sauvées.
Depuis 2002, en soutien d’une action renforcée dans le domaine du contrôle et de la sanction des infractions routières, ce mécanisme a introduit un véritable changement de comportement des conducteurs et, par là même, la réduction du nombre des victimes. Et c’est bien là l’important !
Cependant, si les principes d’organisation du permis à points sont restés inchangés depuis l’origine, les contrôles, eux, du fait notamment de leur automatisation, sont désormais devenus une autre réalité. La sanction du retrait de point a été renforcée, d’une part, par l’extension de la nature des infractions entraînant de plein droit la réduction du nombre de points du permis de conduire et, d’autre part, par l’évolution du barème des retraits de points.
Ce sont ces dernières évolutions qui font que notre assemblée est saisie, à intervalles réguliers, de propositions de loi visant à modifier les contours de son champ d’application, à sortir telle ou telle catégorie d’infraction jugée trop sévèrement punie par le retrait de point pour une catégorie de conducteurs – les professionnels de la route ont ainsi fait l’objet d’une proposition de loi déposée par le groupe UMP le 12 mars dernier et reprise aujourd'hui dans un amendement – ou telle ou telle situation conjoncturelle.
La crise économique justifierait aujourd’hui les mesures contenues dans cette proposition de loi pour s’attaquer au retrait de points en cas de faible dépassement de vitesse ou de défaut de port de la ceinture de sécurité. L’auteur de cette proposition de loi avance même, dans un article de presse, des chiffres chocs : 30 000 emplois auraient été perdus à la suite d’un permis de conduire invalidé.
Je ne nie pas la nécessité de posséder un permis pour obtenir un emploi, l’existence d’abus de verbalisation, l’incompréhension des sanctions pour les petits excès de vitesse. Pas plus tard qu’avant-hier, toutefois, France Info recevait notre collègue dans une émission matinale où il défendait, sans contradicteur, sa position. Il faut s’interroger sur l’opportunité des mesures proposées et sur l’argumentation, parfois provocante, souvent discutable, mise en avant dans ce document.
La proposition qui nous est faite aujourd’hui s’intéresse, comme l’indique son intitulé, à introduire « une plus grande équité dans notre politique de sécurité routière ». En réduisant les sanctions à une amende, il n’en est rien, au contraire !
La suppression du retrait de points va créer une inégalité entre les conducteurs ayant les moyens financiers d’acquitter de nombreuses amendes et les autres, moins chanceux. En outre, l’expérience démontre qu’en matière de répression des contraventions routières l’amende est beaucoup moins dissuasive que le retrait de point.
Enfin et surtout, la suppression de la réduction de points n’intervient que pour les infractions qui coûtent le plus de vies. Le retrait de trois points pour défaut d’assurance – ce qui ne va pas toucher toutes les catégories sociales – mérite certainement débat au regard de la législation existante. D’emblée, cette sanction paraît non pas trop sévère mais disproportionnée par rapport aux autres mesures qui mettent directement des vies en danger.
Au nom du principe que tout système est perfectible à la marge, c’est l’économie générale des retraits de points qui est attaquée et fragilisée. Or le permis à points s’inscrit dans une démarche avant tout pédagogique. C’est un système qui se présente comme un tout et les attaques dont il fait l’objet pour les catégories non représentatives de la population globale – comme celle qui est visée à l’article 1er, qui ne représente que 0, 12 % des conducteurs, soit une centaine de personnes en infraction –…