Je souligne également que le Comité ne s’est pas exprimé unanimement sur ce sujet, certains de ses membres n’ayant pas été présents lors du vote !
Plus récemment, à l’Institut d’études politiques de Paris, s’est tenue une réunion consacrée au cumul des mandats, avec la participation de MM. Balladur, Jospin et Rocard, ainsi que d’autres personnalités tout à fait importantes. Bien qu’aucune unanimité ne se soit dégagée à cette occasion, certaines propositions intéressantes ont été mentionnées, portant notamment sur l’adoption de règles différentes pour les sénateurs et les députés. Sur ce point, je vous renvoie, mes chers collègues, aux travaux du GÉVIPAR, le groupe d’études sur la vie et les institutions parlementaires,
Les arguments en faveur de la limitation du cumul des mandats ont été bien développés par M. Bel tout à l’heure : ils concernent la disponibilité des élus, l’ouverture de la vie politique, les attentes de l’opinion publique et l’exemple de l’étranger.
Je suis désolé de le dire, mais ces arguments peuvent se retourner contre la position défendue par leur auteur et finalement plaider en faveur du cumul des mandats.
Premièrement, concernant la disponibilité des élus, est-il démontré que les élus cumulant une fonction parlementaire et un mandat local sont moins présents au Parlement que ceux qui n’exercent aucun autre mandat ? Non !
On pourrait d’ailleurs, ici même, faire la démonstration du fait que certains parlementaires n’ayant pas de mandat local sont, en fin de compte, moins présents que d’autres parlementaires qui, eux, en ont un. Ce premier argument est donc loin d’être convaincant.
Deuxièmement, notre collègue a évoqué une ouverture de la vie politique. Par rapport à ce qui se passait sous la IIIe République, le déroulement de la carrière politique a changé. Autrefois, le « cursus » s’étalait sur toute la vie : il commençait avec la fonction de conseiller municipal, se poursuivait avec celle de conseiller d’arrondissement, de conseiller général, puis de député, pour s’achever avec celle de sénateur. Nous n’avons plus cette espèce de déroulement quasi logique de la vie politique, que la carrière du président René Coty, par exemple, illustre à merveille.
Malgré la disparition de ce modèle, avons-nous bénéficié d’une « ouverture » de la vie politique ? Je n’en suis guère convaincu ! N’avons-nous pas assisté au contraire à des transferts d’une fonction vers une autre ? Les mêmes personnes sont toujours là, mais leurs mandats sont différents !
Troisièmement, les attentes de l’opinion publique revêtent des aspects bien souvent contradictoires. En effet, les sortants sont plus facilement réélus que ceux qui se présentent pour la première fois, et l’on préfère avoir un sénateur-maire ou un député-maire plutôt qu’un maire de la commune où l’on réside qui ne soit pas parlementaire.
Cet élément est donc la preuve que ce n’est pas tout à fait exact.
J’ajouterai qu’un certain nombre de nos collègues qui, dans le passé, furent des sénateurs remarquables, très présents au sein de la Haute Assemblée et qui, entre autres choses, animaient une commission, mais n’étaient pas présents dans leurs collectivités locales, furent allègrement battus. D’autres sénateurs ou députés qui, au contraire, étaient constamment dans leur circonscription électorale sans jamais être à Paris furent réélus sans problème.