Intervention de Michel Moreigne

Réunion du 13 mai 2008 à 22h45
Contrôle comptable du revenu minimum d'insertion — Adoption des conclusions du rapport d'une commission

Photo de Michel MoreigneMichel Moreigne :

Il ne s’agit en effet pas uniquement de donner aux départements les moyens de mieux piloter le RMI ; il est indispensable de leur accorder également les moyens financiers nécessaires.

Au risque d’être à nouveau un peu désagréable, je rappellerai que le déficit des départements imputable au financement du RMI s’élève aujourd’hui à près de 2, 5 milliards d’euros. Quant au département que j’ai, avec une certaine obstination, l’honneur de représenter ici, il subit un déficit qui atteint 1, 5 million d’euros, soit près de quatre points de fiscalité départementale, ce qui est d’autant moins négligeable qu’il s’agit d’un des départements les moins riches.

L’État, qui s’était engagé à compenser les compétences transférées aux collectivités territoriales, ne respecte pas sa parole.

Avec la montée en puissance du nouveau dispositif en perspective et alors que les dépenses liées au RMI devraient bientôt atteindre quelque 6 milliards d’euros, comment les départements pourront-ils faire face, l’État ne leur transférant qu’une ressource atone en guise de compensation financière ?

Certes, le Gouvernement a bien fait naguère – presque jadis ! – un geste en s’engageant à verser 500 millions d’euros par an par le biais du fonds de mobilisation départementale pour l’insertion. Néanmoins, chacun sait ici que cet engagement prendra fin cette année même.

En outre, le financement de la réforme des minima sociaux, avec la généralisation du RSA désormais prévue au cours de l’année 2009, aggravera sans doute encore cette situation ! Je le regrette, comme nombre d’entre vous sans doute, mes chers collègues.

J’ai bien noté, monsieur le haut-commissaire, que la participation de l’État aux contrats d’avenir créés dans le cadre de la loi de programmation pour la cohésion sociale du 18 janvier 2005 était réglée et qu’il suffisait que les conseils généraux présentent la facture à l’État : soyez sûr que votre annonce aura des effets que, pour ma part, je trouve heureux !

Permettez-moi, mes chers collègues, de rendre hommage, à cette tribune, aux conseils généraux.

Devenus à la suite de la décentralisation du RMI entièrement responsables de l’insertion sociale, les départements ont fortement investi dans les moyens humains et matériels afin de remplir leurs missions et de favoriser le retour à l’emploi. Pour cela, ils n’ont pas toujours pu compter sur le total soutien de l’État.

À cet égard, quitte à être qualifié d’obstiné, je ferai référence aux personnels qui auraient dû être mis à la disposition des conseils généraux à la suite des lois de décentralisation.

Face au refus des conseils généraux de signer les conventions de mise à disposition des personnels, une mission a été confiée aux inspections générales afin d’évaluer les effectifs des DDASS affectés aux compétences sociales ainsi qu’au RMI avant les lois de décentralisation.

Mise en place en février 2007, cette mission, après s’être rendue dans dix départements, a remis son rapport au Gouvernement l’été dernier.

Ce rapport souligne la notable sous-évaluation des personnels qui auraient dû être mis à disposition des départements au 1er janvier 2004. Selon la mission, 94, 5 équivalents temps plein dédiés au RMI auraient en effet « disparu » au cours de l’année 2003, année précédant le transfert de compétence.

Pour ce qui concerne ces emplois, la compensation financière est estimée à 3 millions d’euros par an, soit – c’est mathématique – un coût de 12 millions d’euros pour la période 2004-2007.

Au-delà des emplois disparus, monsieur le haut-commissaire, je rappellerai pour rafraîchir les mémoires que 145, 13 équivalents temps plein sont en outre devenus vacants depuis le 1er janvier 2004.

La mission souligne l’urgence qu’il y a à traiter définitivement ce dossier en compensant financièrement et rétroactivement les montants correspondant au coût des personnels qui auraient dû être mis à disposition des départements. Cela fait rêver… Espérons que le rêve se transformera en réalité !

En conclusion, si le texte que nous examinons semble répondre à la demande des départements de disposer des moyens nécessaires au bon pilotage du RMI, il ne doit en aucun cas constituer « l’arbre qui cache la forêt » des désaccords entre l’État et les conseils généraux, s’agissant tant des finances que des moyens en personnel.

En effet, les propositions qui nous sont soumises, puisqu’elles tendent à fluidifier les relations entre les départements et les organismes payeurs, sont souhaitables et doivent être mises en œuvre préalablement à la mise en place généralisée du RSA. Néanmoins, ne laissons pas passer le message selon lequel tous les maux du RMI seraient uniquement le fait des RMIstes et des indus. Ce serait se contenter de peu.

J’aurais préféré qu’il soit demandé à l’État, avec autant de vigueur et d’énergie que l’a fait notre collègue du département du Rhône pour le contrôle des bénéficiaires du RMI – c’est en effet bien de cela qu’il s’agit –, de respecter ses obligations envers les collectivités territoriales et de payer ses dettes.

Après ce réquisitoire que j’ai volontairement exposé de façon modérée, vous aurez compris, monsieur le haut-commissaire, mes chers collègues, que le groupe socialiste s’abstiendra sur cette proposition de loi qui contribuera à régler un problème mineur, certes, mais ne réglera pas l’essentiel.

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