Intervention de Daniel Raoul

Réunion du 28 septembre 2010 à 14h30
Nouvelle organisation du marché de l'électricité — Article 1er

Photo de Daniel RaoulDaniel Raoul :

Je voudrais qu’il n’y ait pas d’ambiguïté entre nous, en particulier sur ce que l’on appelle « la maîtrise publique de l’énergie nucléaire ». J’exposerai donc clairement notre position, à partir de trois considérants.

Tout d’abord, comme le confirme la loi du 10 février 2000, l’électricité est un bien de première nécessité non stockable.

Ensuite, nous avons défendu le « 3x20 » inscrit à l’article 2 du Grenelle 1 : « La France se fixe comme objectif de devenir l’économie la plus efficiente en équivalent carbone de la Communauté européenne d’ici à 2020. À cette fin, elle prendra toute sa part à la réalisation de l’objectif de réduction d’au moins 20 % des émissions de gaz à effet de serre de la Communauté européenne à cette échéance, cet objectif étant porté à 30 % pour autant que d’autres pays industrialisés hors de la Communauté européenne s’engagent sur des objectifs comparables et que les pays en développement les plus avancés apportent une contribution adaptée. Elle soutiendra également la conclusion d’engagements internationaux contraignants de réduction des émissions. Elle concourra, de la même manière, à la réalisation de l’objectif d’amélioration de 20 % de l’efficacité énergétique de la Communauté européenne et s’engage à porter la part des énergies renouvelables à au moins 23 % de sa consommation d’énergie finale d’ici à 2020. »

Enfin, l’expertise française en matière d’énergie nucléaire est reconnue mondialement.

Je vais maintenant énumérer les six points qui fondent notre position.

Premièrement, le système électrique français est surtout dépendant en matière de production de pointe. Il est nécessaire de responsabiliser les consommateurs domestiques et industriels sur la maîtrise de leur consommation énergétique et sur les capacités d’effacement – nous reviendrons sur ce point au cours de l’examen du texte. L’évaluation de nos besoins énergétiques futurs doit être analysée à l’aune de la priorité donnée à la sobriété et à l’efficacité énergétique, notamment dans le bâtiment et les transports.

Deuxièmement, étant donné nos engagements européens en matière de lutte contre les gaz à effet de serre, l’énergie nucléaire est aujourd’hui incontournable dans le bouquet énergétique français.

Troisièmement, pour être accepté, le nucléaire doit être sûr et rester sous maîtrise publique. C’est pourquoi le prolongement des autorisations d’exploitation des centrales nucléaires existantes et leur renouvellement ne peuvent reposer que sur la continuité de l’effort de recherche et le maintien des compétences. Cet effort doit permettre d’avancer vers une future génération de réacteurs visant à réduire et maîtriser les déchets. Sur ce point, nous pouvons d’ailleurs nous interroger, mes chers collègues : n’avons-nous pas fait fausse route avec l’EPR, au lieu de nous tourner vers les réacteurs de quatrième génération ?

Quatrièmement, il convient, de la même façon, de maintenir une exigence forte en matière de contrôle et de transparence de la filière nucléaire et de non-prolifération.

Cinquièmement, cet effort de recherche en matière nucléaire ne doit pas, toutefois, se faire au détriment d’un effort de recherche au moins équivalent en matière d’énergies renouvelables, d’efficacité énergétique et de développement volontariste de l’ensemble des filières industrielles liées.

Je vous donnerai un seul exemple, mes chers collègues, celui de l’énergie photovoltaïque. En raison du prix de rachat de l’électricité produite et des niches fiscales, nous importons aujourd’hui des produits dont le bilan carbone est pour le moins négatif. Autrement dit, on a mis la charrue devant les bœufs ! Après avoir créé un effet d’aubaine pour certains industriels, nous achetons des produits qui ne sont pas conformes aux exigences du Grenelle de l’environnement.

Sixièmement, enfin, nous devons renforcer la solidarité de notre système électrique avec l’ensemble du réseau européen, en assurant le développement des interconnexions et en créant ce que l’on appelle, depuis la loi du 10 février 2000, une véritable politique européenne de l’énergie, dont la nécessité s’avère particulièrement cruciale au vu des tensions qui s’exercent entre certains pays concernant leur alimentation en gaz. Il serait donc grand temps qu’une politique européenne de l’énergie se mette en place, simplement pour assurer notre indépendance.

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