Intervention de Jean Arthuis

Réunion du 20 novembre 2008 à 15h00
Loi de finances pour 2009 — Discussion d'un projet de loi

Photo de Jean ArthuisJean Arthuis, président de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Madame la présidente, madame le ministre, mes chers collègues, nous voici donc ce soir, tout juste deux semaines après l’examen du projet de loi de programmation des finances publiques et le débat sur les prélèvements obligatoires, entrés de « plain-pied » dans la réalité économique et budgétaire de l’année 2009.

Pour cette année, l’exercice de prévision n’a probablement jamais été aussi difficile du fait de la crise sans précédent que nous devons affronter. Cette crise, par ses origines, son ampleur et ses conséquences, est malheureusement, sans nul doute, la plus grave depuis celle de 1929.

Il s’agit, en effet, d’une crise financière qui se double désormais d’une crise économique. Elle fait, à ce titre, encourir à notre pays un grave risque de crise sociale, une crise susceptible d’éprouver les fondements de son pacte républicain.

Sur le seul plan budgétaire, nous connaissons cependant un précédent d’une ampleur significative sous la Ve République : la loi de finances pour 1993, dont le cadrage macroéconomique était, lui aussi, chargé d’incertitudes. L’année 1993 fut marquée par une récession de 1, 3 %, la première depuis 1945, et l’exécution budgétaire s’est, en effet, soldée par un déficit public de près de 6 % du PIB. C’était, au surplus, il est vrai, la fin de l’époque de la réhabilitation de la dépense publique.

Les circonstances actuelles sont cependant bien différentes, et je tiens à rendre hommage au Gouvernement, qui a accompli un effort de rigueur et de sincérité dans l’évaluation des dépenses du budget qui nous est présenté. Cet exercice a d’autant plus de valeur à mes yeux qu’il s’opère dans un contexte délicat et mouvant.

Mais il y a quand même quelques bonnes nouvelles. Madame la ministre, il ne vous a pas échappé que, pour l’immédiat, notamment du fait des actions courageuses et concertées conduites par les pouvoirs publics, les taux d’intérêt se sont détendus : en un mois, pour les financements à un an, c’est une baisse de 100 points de base, soit 1% d’une dette de 1 000 milliards. L’allégement de charge est significatif

Autre bonne nouvelle dans ce contexte si incertain : les prix du pétrole sont revenus à des niveaux moins irrationnels. À 53 dollars le baril, la décrue est pour le moins significative puisque la baisse atteint près de 60 % en quelques mois. Sans doute est-il en effet possible, dans ces conditions, de revoir les prévisions d’inflation à la baisse ; les contraintes qui pèsent sur les crédits de dépense se trouveront ainsi quelque peu desserrées.

S’agissant de l’évaluation des recettes, nombre de scénarios sont possibles et ont été envisagés. Souhaitant qu’en ce domaine, comme l’a dit le rapporteur général, nous n’ajoutions pas la crise à la crise, j’adhère pleinement à la stratégie de sagesse choisie par le Gouvernement. Je le sais, le pilotage de nos finances publiques sera en 2009 contraignant et périlleux.

Nous devons, en effet, tout à la fois poursuivre, et sans doute amplifier, les réformes structurelles, tout en préservant la cohésion sociale. Il nous faut traverser la crise en aidant simultanément les plus vulnérables de nos concitoyens.

Grâce à cette prise de conscience lucide et à cette mobilisation générale de tous les acteurs économiques et sociaux, nous serons en mesure de mieux affronter cette crise et, je l’espère, de nous préparer à en sortir, étant entendu que cette perspective risque de se faire attendre quelque peu.

Nul doute que la réussite appelle tous les gouvernements à l’échelle du monde à agir de concert, à la recherche d’une synergie globale. C’est d’ailleurs, me semble-t-il, l’un des principaux enseignements du sommet du G20 qui vient de se tenir à Washington ; vous en revenez, madame la ministre.

Sous l’impulsion de la présidence française, l’Union européenne s’est mobilisée pour préparer les réformes attendues : surveillance des marchés financiers ; lutte contre les paradis bancaires, juridiques et fiscaux ; contrôle des spéculations à découvert. Tous les membres du G20, en attendant la prochaine réunion, prévue au début de l’année prochaine, sont convenus d’engagements généraux et, pour l’immédiat, ont reconnu la nécessité de faire « bon usage » des instruments budgétaires et fiscaux.

S’agissant du budget, la première question qui vient à l’esprit est de savoir s’il faut un plan de relance. Or le budget que nous examinons, madame la ministre, est, à la vérité, déjà un budget de relance.

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