Ce dispositif se traduit, pour le Gouvernement, par l’impossibilité de créer, supprimer ou réformer des prélèvements obligatoires par voie d’ordonnance et, pour le Parlement, par la nécessité de privilégier, pour ses initiatives en la matière, les vecteurs financiers.
L’objectif n’est certainement pas de remettre en cause les droits du Parlement ; il s’agit, bien au contraire, de l’impliquer pleinement dans le rétablissement de nos finances publiques.
J’ajoute que, en modifiant les modalités de son contrôle, l’Assemblée nationale a entendu apaiser les dernières craintes qui pouvaient encore s’attacher, de ce point de vue, à ce qu’il est convenu d’appeler, probablement assez maladroitement, le « monopole fiscal ».
Elle s’est d’abord inspirée de la procédure de l’article 41 de la Constitution, concernant aujourd’hui le partage de la loi et du règlement.
Ainsi, il resterait possible, pour un député ou un sénateur, de déposer une proposition de loi ordinaire ou des amendements relatifs aux prélèvements obligatoires, à charge pour le Gouvernement ou le président de l’assemblée concernée d’en soulever l’irrecevabilité, étant entendu que, en cas de désaccord, il appartiendrait au Conseil constitutionnel de trancher.
L’Assemblée nationale a, ensuite, souhaité, ce qui est peut-être moins évident, que, à l’occasion d’une saisine sur le fondement de l’article 61 de la Constitution, le Conseil constitutionnel soit tenu de censurer les dispositions en cause, que leur irrecevabilité ait été ou non soulevée au cours du débat parlementaire.
Ce dispositif subtil a l’inconvénient de son avantage : il est complexe.
Il va de soi que, à ce stade du débat parlementaire, le texte de ce projet de loi constitutionnelle ne saurait être considéré comme figé. Je me permets simplement d’appeler votre attention sur le fait qu’il s’agit, pour l’Assemblée nationale, d’un élément de l’équilibre d’ensemble et qu’il vous faudra, le moment venu, vous retrouver sur une vision partagée.
J’observe, en tout état de cause, que c’est surtout sous un autre angle que la Haute Assemblée appréhende les conséquences du monopole fiscal. Plusieurs amendements, émanant de votre commission des lois, de votre commission des finances ou de votre commission des affaires économiques, traduisent une inquiétude quant à la capacité du Parlement à examiner correctement une réforme d’ensemble, dès lors que le financement serait nécessairement séparé du principe.
Pour remédier à cette objection, vos commissions ont élaboré plusieurs propositions alternatives. Naturellement, mesdames, messieurs les sénateurs, je fais confiance au débat parlementaire et à votre esprit de responsabilité pour aboutir ensemble à un compromis qui préserve l’équilibre du texte et ses objectifs, et qui ne crée pas, par ailleurs, de contraintes ou de lourdeurs excessives dont le Parlement lui-même serait la victime.