… 130 milliards d’euros de la dette de la sécurité sociale ont été transférés à la CADES.
C’est pourquoi l’instauration de lois pluriannuelles contraignantes mérite d’être approuvée.
J’observe toutefois qu’aucune disposition spécifique n’est prévue pour l’examen en commission de ces projets de loi-cadre.
J’en viens à l’amendement que la commission des affaires sociales vous demandera d’approuver, mes chers collègues.
Dès lors que les futures lois-cadres définiront une trajectoire de retour à l’équilibre financier qui s’imposera aux lois de finances comme aux lois de financement, il est légitime qu’elles fassent l’objet d’un examen dans des conditions spécifiques. C’est pourquoi la commission des affaires sociales a adopté un amendement prévoyant que ces textes particuliers seront obligatoirement examinés par une commission spéciale composée à parité de membres de la commission des finances et de la commission des affaires sociales. La constitution d’une telle commission permettra un travail en commun des parlementaires spécialisés en matière de finances de l’État et de finances de la sécurité sociale.
Il est à notre sens nécessaire d’inscrire une telle disposition dans la Constitution elle-même. À défaut, la loi organique qui précisera le contenu et les conditions d’examen des lois-cadres d’équilibre des finances publiques ne pourrait juridiquement la prévoir. Chaque assemblée pourrait donc décider, au cas par cas, de constituer ou non une commission spéciale, ce qui n’apparaît pas satisfaisant au regard du caractère contraignant, pour les finances sociales comme pour celles de l’État, des futures lois-cadres.
La commission spéciale me semble donc être la moins mauvaise des solutions.
Refuser ce travail en commun des commissions chargées des deux lois financières marquerait une première étape vers l’absorption de la loi de financement de la sécurité sociale par la loi de finances, alors même que les deux textes répondent à des logiques différentes et appellent la poursuite du dialogue qui s’est instauré entre nos deux commissions au cours des dernières années.
J’ai d’ailleurs noté une véritable amélioration dans les échanges entre nos deux commissions pour un travail en commun et une approche globale des équilibres des lois de finances et des lois de financement de la sécurité sociale.
Si nous soutenons la création des lois-cadres, qui constitue la disposition la plus novatrice du projet de loi constitutionnelle, je dois vous faire part des réserves très sérieuses de la commission des affaires sociales sur l’autre mesure phare du projet de loi constitutionnelle, je veux parler de l’instauration du monopole.
Comme l’a déjà parfaitement démontré M. Jean-Jacques Hyest, ce monopole présenterait de très sérieux inconvénients.
Tout d’abord, le Parlement ne pourrait plus appréhender les réformes dans leur globalité, leurs conséquences financières étant systématiquement renvoyées aux lois financières. Une telle pratique réduirait considérablement l’intérêt du débat parlementaire et obligerait les assemblées à se prononcer sans connaître précisément l’ensemble des éléments constitutifs d’une réforme.
Par ailleurs, l’initiative parlementaire serait drastiquement limitée par ce dispositif qui viendrait s’ajouter à la contrainte de l’article 40 de la Constitution et à l’irrecevabilité des cavaliers budgétaires et des cavaliers sociaux.
Enfin, plus aucune discussion parlementaire sur la fiscalité ou les ressources de la sécurité sociale ne pourrait avoir lieu en dehors du projet de loi de finances ou du projet de loi de financement, alors que nous savons combien les conditions d’examen de ces textes sont rigoureusement encadrées : discussion en premier lieu par l’Assemblée nationale, délais précisément fixés, lecture unique dans chaque assemblée, discussion sur la base du texte du Gouvernement.
Dans ces conditions, mes chers collègues, le monopole des lois financières ne paraît pas acceptable en l’état. L’équilibre des finances publiques ne passe pas par l’affaiblissement du Parlement.