Madame la présidente, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, en tant qu’européen convaincu, je suis pleinement conscient de la situation financière de notre pays.
Le Conseil européen, dans un texte très récent, en date du 10 juin, se félicite que la France prévoie d’instaurer « une programmation budgétaire pluriannuelle contraignante ». Mais il s’inquiète dans le même temps des incertitudes qui pèsent sur l’adoption du présent texte.
Mes chers collègues, il est clair que nos partenaires européens nous regardent et attendent un signal fort attestant la volonté de la France de mettre fin à la dérive de ses finances publiques.
Ce signal, c’est ce projet de loi constitutionnelle, qui comporte une disposition phare, la seule que mentionne le Conseil européen : la création des lois-cadres d’équilibre des finances publiques.
C’est pourquoi je me félicite que le Gouvernement ait déposé ce projet de loi constitutionnelle, qu’il est urgent d’adopter, et j’en appelle à la responsabilité de chacun pour prendre la mesure des attentes de l’Union européenne et des conséquences qui découleraient de la non-adoption de ce texte.
Mais j’attire votre attention, mes chers collègues, en tant que parlementaire et plus encore de sénateur, sur une autre disposition de ce texte, qui nous concerne directement : le monopole des lois financières en matière de prélèvements obligatoires.
Depuis le début de son parcours à l’Assemblée nationale, ce dispositif a déjà été supprimé par cinq commissions permanentes, sur les sept qui ont eu à l’examiner.
Sommes-nous, parlementaires, à ce point irresponsables et dépensiers que, pour lutter contre une dette publique qui a atteint 1 600 milliards d’euros, il soit obligatoire de nous retirer la possibilité d’examiner des propositions de loi comportant des dispositions fiscales et de restreindre notre droit d’amendement en la matière ?
Je ne le pense pas, et ce pour deux raisons majeures.
En premier lieu, il n’a échappé à personne que les parlementaires ne peuvent pas proposer d’augmenter les dépenses publiques : l’article 40 le leur interdit.
En second lieu, la commission des finances relève dans son rapport sur le présent texte que « si des allégements de faible ampleur peuvent être adoptés dans des lois sectorielles, les allégements qui ont un fort impact sur le solde public sont en pratique instaurés à l’initiative du Gouvernement ».
J’en viens ainsi, justement, à ces lois ordinaires : sont-elles à l’origine du dérapage de nos finances publiques ?
Je ne citerai que deux chiffres : depuis dix ans, l’impact budgétaire des mesures figurant dans des lois non financières est inférieur à 16 %, les 84 % restants provenant de lois financières.
Quelle que soit la commission à laquelle nous appartenions, nous sommes tous animés du même esprit de responsabilité. Nous travaillons régulièrement en commun, comme ce fut le cas pour la loi de modernisation de l’économie, qui comportait de nombreuses mesures fiscales, y compris celles qui avaient été introduites sur l’initiative des rapporteurs.
Il nous arrive même, mes chers collègues, d’adopter des dispositions fiscales augmentant les recettes, comme dans la loi portant nouvelle organisation du marché de l’électricité, dite loi NOME, puisque la réforme des taxes locales d’électricité devrait susciter 75 millions d’euros de recettes pour l’État.