Intervention de Charles Guené

Réunion du 1er avril 2008 à 16h00
Contrats de partenariat — Discussion générale

Photo de Charles GuenéCharles Guené, rapporteur pour avis de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

La première règle est de profiter de l'expérience des PPP au Royaume-Uni.

Que nous apprend-elle ?

D'abord, seule l'efficacité économique, c'est-à-dire le value for money, doit être prise en compte avant de recourir à ces contrats innovants. On peut ainsi considérer qu'un écart d'efficience de 5 % - c'est une marge d'erreur technique -, après neutralisation de la fiscalité, entre un investissement classique et un contrat public-privé permet de légitimer économiquement un PPP.

Ensuite, certaines opérations n'enregistrent pas de gains substantiels. Le Trésor britannique considère que les opérations inférieures à 20 millions de livres, comme celles qui concernent les systèmes d'information, ne présentent pas, en général, un bilan coût-avantage suffisant. S'agissant des investissements d'un montant limité, je pense que l'on peut préférer aux contrats de partenariat des outils plus légers en termes de procédures, comme les baux emphytéotiques administratifs, les BEA, bien adaptés aux petites collectivités locales.

Deuxième règle, il importe de bâtir des indicateurs de performance de l'investissement public. Il faut, en particulier, que l'État soit capable de mesurer le respect des délais et des coûts figurant dans les cahiers des charges et d'en rendre compte au Parlement. En outre, de tels indicateurs permettraient d'établir des comparaisons utiles entre PPP et maîtrise d'ouvrage classique.

Troisième règle, en matière d'évaluation préalable, comme en matière de contrôle ex-post, la constitution d'un référentiel d'analyse financière rigoureux est indispensable. Ce référentiel doit être commun entre les administrations publiques et la Cour des comptes, afin d'intégrer des éléments de coût identique dans les calculs.

Quatrième règle, il convient d'étoffer les équipes de maîtrise d'ouvrage des différents ministères, en leur permettant de recourir à un marché de bons de commande interministériels pour des expertises extérieures, qui deviennent cruciales dans la négociation avec les cocontractants privés.

La réussite des PPP, comme de tout investissement, tient autant à l'évaluation préalable qu'à la conduite du projet et à son suivi dans la durée. Or, si la mission d'appui aux partenariats public-privé du ministère de l'économie, de l'industrie et de l'emploi permet une évaluation préalable approfondie, les mêmes garanties ne sont pas toujours apportées dans l'exécution de l'investissement et dans le suivi du contrat. Pourtant, compte tenu de la complexité des projets en général, ces deux points sont déterminants pour assurer la réussite financière finale des PPP.

Cinquième règle, il faut faire de la consolidation des engagements financiers liés aux PPP dans la dette publique le principe, et de la déconsolidation l'exception. C'est, me semble-t-il, important.

Ne nous le cachons pas, dans un contexte de montée des tensions budgétaires, les risques d'optimisation budgétaire liés aux PPP existent. Si, comme le souhaite le Gouvernement, 15 % des investissements publics étaient réalisés en PPP et si la totalité n'était pas prise en compte dans la dette au sens « maastrichtien » du terme, 10 milliards d'euros supplémentaires annuels, soit 0, 6 point de PIB, n'apparaîtraient pas dans la dette publique, qui a atteint 64, 2 % en 2007.

La recherche par les gestionnaires de la déconsolidation - ce n'est pas un cas d'école, comme le montre le très récent contrat de partenariat sur les prisons - peut conduire à un transfert de risques excessif au partenaire privé, avec pour conséquences une augmentation des coûts et un rétrécissement des conditions de mise en concurrence. Dans ces conditions, les effets comptables, c'est-à-dire l'amélioration faciale de la dette, pourraient conduire à un « sous-optimum » économique des contrats conclus par la personne publique.

Au Royaume-Uni, 87 % des contrats public-privé, représentant 54 % des volumes investis, sont déconsolidés.

Madame la ministre, au sein de l'exécutif comme du Parlement, nous ne sommes pas encore suffisamment armés pour vérifier la soutenabilité des engagements budgétaires de long terme pris par les administrations. Or, au-delà du respect nominal des indicateurs de Maastricht, ce qui est fondamental pour les générations futures, c'est la soutenabilité de notre politique budgétaire à moyen et long terme.

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