Le cas peut se produire s’il quitte le Gouvernement pour occuper une autre fonction incompatible avec l’appartenance à l’une des assemblées, par exemple – le cas s’est produit – celle de membre du Conseil constitutionnel ou celle de membre de la Commission européenne.
Ensuite, au cas où plusieurs remplacements successifs, ayant des causes différentes, seraient intervenus sur une même liste sénatoriale, c’est le dernier arrivé qui devra céder son siège. Le candidat de la liste du titulaire initial du mandat qui est devenu sénateur le plus récemment en remplaçant soit le sénateur devenu ministre, soit un autre sénateur dont le siège était vacant, devra donc céder ce siège au parlementaire ayant cessé d’exercer ses fonctions gouvernementales.
La nouvelle rédaction de l’article L.O. 320 du code électoral proposée sur ce point par le Gouvernement a été réécrite par l’Assemblée nationale, afin de la rendre à la fois plus complète et plus lisible.
Votre rapporteur n’est pas étranger à cette réécriture, c’est le moins qu’on puisse dire ; je crois savoir qu’il en est même l’auteur !
Quoi de plus normal d’ailleurs, et conforme à la tradition républicaine, évoquée à plusieurs reprises dans son rapport par le sénateur Patrice Gélard, que l’assemblée dont les membres sont concernés au premier chef par une disposition prenne une part décisive à sa rédaction, et que l’autre assemblée s’abstienne de la remettre en cause ?
La nouvelle rédaction comporte un ajout utile, en précisant que le sénateur remplaçant temporaire qui a dû céder son siège reprend la première position de la liste, en tête des candidats non élus de celle-ci. Ainsi, il n’y a plus aucune ambiguïté sur le sort réservé à la personne ayant remplacé temporairement un sénateur élu au scrutin de liste et devenu ministre, lorsque ce dernier reprend son mandat.
Par ailleurs, conformément au texte de la réforme constitutionnelle, le nouveau système est applicable aux membres actuels du Gouvernement : le III de l’article 46 de la loi constitutionnelle du 23 juillet dernier énonce en effet qu’il s’applique aux députés et sénateurs ayant accepté des fonctions gouvernementales antérieurement à la date d’entrée en vigueur de la loi organique prévue à l’article 25 – celle dont il est question aujourd’hui – « si, à cette même date, ils exercent encore ces fonctions et que le mandat parlementaire pour lequel ils avaient été élus n’est pas encore expiré », ce qui, vous en conviendrez, est la logique même.
Il n’y a donc là aucune rétroactivité, j’y insiste, mais il y a une simple application aux situations en cours à la date à laquelle vous vous prononcez.
Enfin, le projet de loi ordinaire contient également une disposition technique semblable pour les députés européens qui deviennent membres du Gouvernement, dont la rédaction est calquée sur celle qui s’appliquera à ceux d’entre vous qui sont élus au scrutin proportionnel, en y incluant les améliorations que j’évoquais il y a un instant.
Comme le signale M. Gélard, dans son excellent rapport, une disposition spécifique de l’article 24 de la loi du 7 juillet 1977 qui régit l’élection de nos députés au Parlement européen permet déjà à un représentant ayant accepté une fonction de membre du Gouvernement ou du Conseil constitutionnel, ou la prolongation au-delà de six mois d’une mission temporaire confiée par le Gouvernement, de reprendre l’exercice de son ancien mandat, lorsque ces fonctions ou missions ont cessé et que leur remplaçant est décédé ou a démissionné. Il dispose pour ce faire d’un délai d’un mois.
Ce retour au Parlement européen, qui restera applicable dans les cas autres que l’entrée au Gouvernement, est donc seulement étendu, dans cette dernière hypothèse, pour s’appliquer de droit, sans se limiter aux cas de démission ou de décès du remplaçant.
Le nouveau système n’entrera toutefois en vigueur qu’après le renouvellement du Parlement européen de juin prochain, parce qu’une simple loi ne peut prévoir son application aux situations en cours.
Dans un second temps, j’aborderai les autres dispositions des deux textes, qui portent essentiellement sur l’élection des députés, comme l’indique d’ailleurs le titre du projet de loi ordinaire. Permettez-moi cependant de vous en exposer rapidement le contenu.
La première disposition figure à l’article 1er du projet de loi organique. C’est celle qui fixe, dans l’article L.O. 119 du code électoral, le nombre total des députés, qui correspond en fait au plafond retenu maintenant dans la Constitution, soit cinq cent soixante-dix-sept, qui est aussi, je vous le rappelle, le nombre des membres de l’Assemblée nationale depuis 1985.
Les dispositions organiques du code électoral fixant le nombre des députés élus respectivement dans les départements et dans les collectivités d’outre-mer sont en conséquence abrogées : c’est l’objet de l’article 7 du projet de loi organique. Il appartiendra dorénavant à la loi ordinaire d’arrêter leur nombre.
Certes, une distorsion se trouve ainsi introduite – et il en a été question mercredi dernier au sein de votre commission des lois – avec la fixation des effectifs de votre assemblée, qui résultent de l’addition de plusieurs dispositions fixant, dans le code électoral, les nombres respectifs de sénateurs élus dans les départements et dans chacune des collectivités d’outre-mer et, dans une loi organique spécifique, le nombre de ceux d’entre vous qui représentent les Français de l’étranger.
Mais les deux situations sont conformes à la Constitution, dont l’article 25 renvoie à la loi organique le soin de fixer le nombre des membres de chaque assemblée : il peut s’agir d’un nombre global ou de ce que j’appellerai une somme de « contingents ». Je vous répète toutefois qu’une harmonisation pourrait intervenir à l’occasion de la recodification du code électoral, qui est en cours d’élaboration. Et, pour ce qui est des dispositions organiques relatives au Sénat, leur modification ne se fera qu’avec votre accord.
Les autres dispositions qui figurent dans le projet de loi ordinaire constituent la première étape de l’ajustement de la carte des circonscriptions législatives. Je vous rappelle que cet ajustement est exigé depuis près de dix ans par le Conseil constitutionnel, compte tenu des disparités et des écarts très importants apparus dans leurs populations respectives.
N’oublions pas que la délimitation actuelle a été arrêtée en 1986 sur la base d’un recensement effectué en 1982. La France comptait alors 55 millions d’habitants, contre près de 64 millions aujourd’hui. Cette délimitation aurait dû être révisée au moins en 1999, à la suite des deux recensements généraux de la population intervenus en 1990 et en 1999, mais cela n’a pas été fait, pour toutes sortes de raisons. Nous ne pouvons plus, aujourd’hui, reporter cette réforme.