Intervention de Marie-Luce Penchard

Réunion du 15 juin 2011 à 22h15
Nouvelle-calédonie — Discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi organique dans le texte de la commission modifié

Marie-Luce Penchard, ministre :

Il s’agit encore de rappeler avec force les principes de collégialité et de proportionnalité qui président au fonctionnement du gouvernement calédonien.

Il s’agit enfin de réunir le comité des signataires à l’échéance prévue afin de remettre le processus de Nouméa au cœur des priorités de travail.

Les entretiens qu’a conduits personnellement le Premier ministre du 17 au 19 mai dernier ont confirmé que les forces politiques calédoniennes adhéraient à la démarche proposée, et qu’elles étaient aujourd’hui désireuses de sortir de la crise politique, avec l’aide d’un l’État qui serait, non seulement, un partenaire, mais aussi, et surtout, le garant de l’accord de Nouméa.

Un nouveau gouvernement calédonien a ainsi été élu le 10 juin 2011.

Le projet de loi que je présente aujourd’hui vise donc à modifier de manière limitée le statut de la Nouvelle-Calédonie. Il s’agit en effet uniquement de corriger l’article 121 de la loi organique du 19 mars 1999.

Cet article prévoit que, lorsqu’un membre du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie cesse d’exercer ses fonctions, le candidat suivant de la liste le remplace. Lorsqu’il n’existe pas de suivant de liste susceptible de le remplacer, le gouvernement, dans son ensemble, est démissionnaire de plein droit et assure l’expédition des affaires courantes jusqu’à l’élection d’un nouveau gouvernement.

Le législateur organique n’avait cependant pas prévu – les débats de l’époque devant la Haute Assemblée l’attestent – que cet article soit utilisé comme substitut à la motion de censure, par le biais de démissions collectives ayant pour seul objet de faire tomber le gouvernement.

Ni la lettre du texte, ni la jurisprudence administrative n’interdisent une telle pratique. De fait, ce mécanisme a été utilisé pour renverser le gouvernement en 2002, en 2004, en 2007, ainsi qu’en février 2011.

Les forces politiques locales sont, en réalité, aujourd’hui très attachées à ce mécanisme, qui offre à la minorité politique une capacité d’expression supplémentaire, à savoir la possibilité de faire tomber un gouvernement sans recourir à la motion de censure qui, elle, nécessite une majorité.

Ce mécanisme, c’est aussi, pour les institutions calédoniennes, un espace de souplesse et, dans certaines circonstances, de respiration politique.

En revanche, l’instabilité institutionnelle est née, cette année, de l’utilisation répétée de ce mécanisme, dans le seul but d’empêcher le fonctionnement normal des institutions et de créer les conditions d’une dissolution.

Ce détournement de l’article 121 n’est pas acceptable. Il est clairement contraire à l’esprit du texte et, plus globalement, à celui du statut de la Nouvelle-Calédonie. Le Conseil d’État, statuant au contentieux, l’a sévèrement qualifié, le 8 avril 2011, de « manœuvre ».

Il est donc nécessaire, pour préserver le fonctionnement normal des institutions calédoniennes, de ne plus permettre une telle utilisation de l’article 121, sans pour autant supprimer le mécanisme lui-même.

Garantir une stabilité institutionnelle pendant un délai raisonnable est l’objectif premier du texte qui vous est soumis.

Le projet de loi prévoit, pour ce faire, l’instauration d’un délai de carence de dix-huit mois, pendant lequel, lorsque les membres d’un groupe ont démissionné en bloc et fait démissionner d’office le gouvernement, le mécanisme est donc privé d’effet : les démissions collectives restent possibles, mais elles perdent pendant dix-huit mois leur effet paralysant sur le fonctionnement du gouvernement.

Cette disposition comporte toutefois une limite : si le nombre de membres du gouvernement à remplacer est égal ou supérieur à la moitié de l’effectif, le gouvernement est en tout état de cause démissionnaire de plein droit. Dans cette hypothèse, en effet, le gouvernement ne peut plus valablement fonctionner. Empêcher qu’il ne tombe n’est plus légitime.

Je rappelle à ce stade que l’élection du gouvernement à la proportionnelle est une originalité du statut de la Nouvelle-Calédonie : il s’agit d’associer à l’exécutif les principales forces politiques représentées au congrès, de façon équilibrée.

La collégialité et la proportionnalité du gouvernement sont des principes directement issus de l’accord de Nouméa. Elles ont, à ce titre, valeur constitutionnelle.

Pour cette raison, il est indispensable que, à l’issue d’une crise politique, la représentation équilibrée du gouvernement soit restaurée. C’est le deuxième objectif du projet de loi qui vous est soumis.

Ce dernier prévoit ainsi la possibilité pour un groupe démissionnaire de réintégrer le gouvernement, par simple notification d’une nouvelle liste de représentants, à tout moment du délai de carence de dix-huit mois.

Laisser la porte ouverte au groupe démissionnaire, ne pas l’exclure du gouvernement si telle n’est plus sa volonté : c’est l’esprit même du statut.

Enfin, le texte prévoit une disposition transitoire qui permet de rendre immédiatement applicable le délai de carence de dix-huit mois, en prenant en compte les démissions de plein droit antérieures à l’entrée en vigueur de la réforme.

Mesdames, messieurs les sénateurs, lors des entretiens à l’hôtel Matignon, les groupes politiques calédoniens ont unanimement adhéré à l’objectif de stabilité du Gouvernement. Ils ont approuvé cette réforme dans son principe.

Le texte du Gouvernement, issu d’une très large consultation politique, a repris in extenso la rédaction du Conseil d’État, dont je veux souligner devant vous la qualité des avis rendus sur un sujet sensible et complexe.

Le Gouvernement est très attaché à ce que ce texte, discuté longuement dans son principe, ciselé dans sa rédaction, …

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