Intervention de Guy Fischer

Réunion du 15 juin 2011 à 22h15
Nouvelle-calédonie — Discussion en procédure accélérée et adoption d'un projet de loi organique dans le texte de la commission modifié

Photo de Guy FischerGuy Fischer :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord louer le travail accompli par Christian Cointat et Bernard Frimat.

Nous savons combien il est important, pour le pouvoir politique, de ne pas subvertir des outils juridiques à des fins personnelles, ni, surtout, contre l’intérêt général.

Nous savons aussi que le pouvoir doit à un moment donné savoir mettre fin aux dérives du pouvoir. Nous avons malheureusement souvent eu l’occasion de rappeler ce principe en ces lieux ; aujourd’hui nous est donnée l’occasion de le mettre en pratique.

La Nouvelle-Calédonie, possession française du Pacifique Sud depuis 1853, est un territoire profondément marqué par les événements historiques qui s’y sont déroulés. Les mouvements de population successifs, ainsi que les rapports de domination coloniale dans lesquels ils s’inscrivaient, ont peu à peu composé la richesse de cette société pluriethnique.

L’archipel a néanmoins longtemps été marqué par de forts clivages entre ethnies autochtones et allochtones, qui ont eu pour effet d’y entretenir des troubles sociaux et politiques durables.

De plus, reniée dans son identité par le code de l’indigénat jusqu’en 1946, la Nouvelle-Calédonie a connu une extraordinaire profusion de statuts juridiques, qui lui ont octroyé plus ou moins d’autonomie selon les gouvernements en place en métropole, sans réelle lisibilité prospective.

À la suite d’une série d’événements dramatiques, est intervenu l’accord de Nouméa, qui a contribué à dénouer la situation en apportant une certaine paix politique aux Néo-Calédoniens.

Cet accord a inscrit la restitution de son identité au peuple kanak, ainsi que la reconnaissance de la souveraineté de l’archipel. Celle-ci se matérialise par des transferts de compétences, qui sont encore en cours et que nous avons le devoir de faciliter. Néanmoins, l’utilisation regrettable qui a été faite de l’article 121 de la loi organique de 1999 est venue rompre l’équilibre politique prévu par l’accord de Nouméa.

En effet, cette disposition a ouvert une possibilité de manœuvre à un parti qui souhaiterait recomposer le gouvernement, quand bien même il n’y compterait qu’un élu : il lui suffit de faire démissionner l’ensemble de ses colistiers et de leurs remplaçants éventuels. Cette pratique évite de recourir à la motion de censure prévue à l’article 95, qui constitue, en théorie, la procédure normale pour renverser le gouvernement.

Une telle technique a été utilisée à répétition, et de façon malveillante, par le parti Calédonie Ensemble, afin d’obtenir de l’État la dissolution du congrès. Depuis lors, cet abus de droit a été mis en échec par le Conseil d’État, qui y a vu une manœuvre électorale. Dans sa décision du 8 avril 2011, la haute juridiction a estimé que les démissions « visaient à vicier la régularité de l’élection du président et du vice-président et avaient, en conséquence, le caractère d’une manœuvre électorale qui doit demeurer sans incidence sur la régularité du scrutin ».

Il nous appartenait de réagir. Cette modification de la loi organique est devenue indispensable, et nous la soutiendrons en vertu du respect des principes républicains.

En 2011, la Nouvelle-Calédonie se verra transférer de nouvelles compétences, notamment dans le domaine de l’enseignement. Entre 2014 et 2018 devrait se tenir un scrutin d’autodétermination, ce qui est une bonne chose, car l’histoire n’a que rarement laissé le choix aux Néo-Calédoniens.

Nous souhaitons véritablement que cette réforme apporte un nouveau souffle à la vie politique néo-calédonienne, déjà trop éprouvée, ainsi que la stabilité nécessaire aux transferts de pouvoirs prévus pour l’avenir. Bien sûr, nous voterons ce texte.

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