Intervention de Christiane Hummel

Réunion du 9 avril 2008 à 15h00
Lutte contre les discriminations — Discussion générale, amendement 5

Photo de Christiane HummelChristiane Hummel, rapporteur de la délégation aux droits des femmes :

Au cours de la réunion qu’elle a

D’abord, un double constat s’impose :

Dès lors, le Gouvernement a fait le choix d’opérer

Certes, cette démarche présente l’avantage d’être inattaquable au

Cette complexité nous paraît particulièrement regrettable dans uncompréhensible.

Au demeurant, et c’est notres’attacher à en améliorer l’application, car la France doit veiller particulièrement à ne plus encourir le reproche d’être le pays des réformes symboliques.

Notre délégation a examiné attentivement les effets attendus de l’introduction en droit français des définitions données par les directives des notions de « discrimination directe » et de « discrimination indirecte ». Celles-ci peuvent constituer des leviers bien adaptés à la promotion d’une égalité réelle entre les hommes et les femmes.

Ainsi, la définition de la discrimination directe, en permettant des comparaisons hypothétiques, peut contribuer à assouplir le recours à des procédures dites de « test de discrimination », dont le président de la Haute Autorité de lutte contre les discriminations et pour l’égalité nous a indiqué, au cours de son audition, qu’elles étaient actuellement trop strictement encadrées par la jurisprudence des tribunaux français.

Quant à la définition de la discrimination indirecte, elle peut permettre au juge de dépasser les apparences d’une égalité de traitement pour mesurer l’effet concret d’une disposition.

La consécration, par le projet de loi, de ces définitions est donc appréciable, mais leur application devra être bien encadrée, car leur caractère est extrêmement large : comme l’a dit Mme le rapporteur de la commission, nous devrons veiller à ce que certaines expressions, par exemple l’emploi du conditionnel « ne le serait », ne puissent entraîner des dérives et alimenter des procès d’intention dont nous ne voulons pas.

Telle est la préoccupation que nous exprimons dans notre troisième recommandation.

Dans notre quatrième recommandation, nous préconisons une simplification du dispositif, qui n’autorise, actuellement, dans le code du travail, les différences de traitement fondées sur le sexe en matière d’emploi que pour les professions de comédien, de mannequin ou de modèle. Ce dispositif est sans doute trop rigide.

Plutôt que de chercher à actualiser, profession par profession, la liste des dérogations autorisées, nous pensons qu’il vaut mieux s’appuyer sur la combinaison des deux critères proposés dans le projet de loi : celui de l’objectif légitime et celui de l’exigence proportionnée. Nous nous réjouissons donc que l’amendement n° 5 de la commission des affaires sociales donne une traduction législative à cette recommandation.

J’insisterai, pour finir, sur deux dispositions qui nous paraissent appeler des réserves, voire des objections.

La première d’entre elles vise à ce que l’égalité entre les sexes pour l’accès aux biens et services n’interdise pas d’organiser des enseignements en regroupant les élèves en fonction de leur sexe. Certes, une application trop absolue du principe d’égalité entre les sexes pour l’accès au « service » que constitue l’enseignement aurait pu entraîner des effets indésirables, par exemple sur le maintien d’établissements privés non mixtes ou sur la constitution d’équipes masculines ou féminines dans les compétitions sportives en milieu scolaire et universitaire. La loi devait donc sans doute prévoir une dérogation à ce principe, mais notre délégation souhaite, dans une cinquième recommandation, rappeler notre attachement à l’objectif de mixité inscrit à l’article L. 121–1 du code de l’éducation et inciter le Gouvernement à la vigilance.

Il ne faudrait pas que cette dérogation soit utilisée pour remettre en question, pour des motifs culturels ou religieux, la bonne intégration des jeunes filles aux activités, notamment sportives, des établissements d’enseignement.

Nous nous élevons contre l’organisation d’enseignements distincts qui reproduiraient des stéréotypes sexués contre lesquels il convient, au contraire, de lutter.

Enfin, nous nous interrogeons sur la portée de la seconde disposition qui semble devoir dispenser « le contenu des médias et de la publicité » de toute obligation en matière de discrimination en raison de l’appartenance à un sexe. Son sens ne nous paraît pas clair, et l’on peut craindre que cette mesure n’ait pour objet, plus ou moins avoué, d’autoriser des représentations discriminatoires de la femme et, pourquoi pas, de l’homme dans les médias et la publicité.

Nous exprimons donc nos plus expresses réserves à l’égard de cette disposition qui prend le contre-pied des conclusions de nos récents travaux consacrés à l’image de la femme dans les médias, dans le prolongement desquels s’inscrit justement la réflexion confiée par le Gouvernement à la commission présidée par Michèle Reiser.

Conformément à notre sixième recommandation, j’ai déposé, avec la présidente de notre délégation, Gisèle Gautier, et plusieurs de nos collègues, un amendement visant à la suppression de cette mesure.

Sous réserve de l’adoption de ces six recommandations, et sous le bénéfice des observations que je vous ai présentées, la délégation s’est déclarée favorable à l’adoption du projet de loi, car, malgré ses défauts, il devrait contribuer à faire avancer la cause de l’égalité entre les hommes et les femmes, cause à laquelle nous savons, madame la secrétaire d’État, que vous êtes particulièrement attachée.

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