Je dois vous dire, mes chers collègues, combien je suis choquée par l’insertion dans ce projet de loi de la mesure prévue à l’avant-dernier alinéa de cet article. Celle-ci autorise ni plus ni moins la généralisation du principe de discrimination en fonction du sexe dans le milieu scolaire, alors que rien de tel n’est exigé par les directives, ainsi que l’a rappelé Bariza Khiari.
Ainsi, aux termes de cet alinéa, ne fera pas obstacle aux principes de discrimination « l’organisation d’enseignements par regroupement des élèves en fonction de leur sexe ».
Cette disposition appelle deux réflexions, l’une juridique, l’autre politique.
D’un point de vue juridique, d’abord – et le rapport d’information réalisé par la délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes le souligne à juste titre –, le code de l’éducation dispose, en son article L. 121-1, que les établissements qui accueillent des élèves « contribuent à favoriser la mixité et l’égalité entre les hommes et les femmes ».
L’avant-dernier alinéa de l'article 2 est en contradiction totale avec cet article du code de l’éducation. Comment, en effet, peut-on poser dans un code que le rôle de l’éducation est de favoriser la mixité quand, dans le même temps, une autre disposition législative autorise, sans le moindre encadrement ni la moindre limitation, la séparation des élèves en fonction de leur sexe ?
Madame la secrétaire d'État, avec cet alinéa, vous ouvrez une véritable boîte de Pandore juridique, et l’on verra une disposition aux contours flous entrer en conflit avec une autre disposition sans contour du tout ! Vous demandez en somme à ces deux dispositions de se contenir, de se limiter, voire de s’annuler, un peu comme si toutes deux avaient la même valeur.
Cette question de la valeur m’amène précisément à ma seconde réflexion, politique celle-là, sans pour autant constituer un sujet de polémique, car je veux croire que, au sein de cette assemblée, nous avons toutes et tous la même idée d’une société démocratique moderne, fondée sur l’égalité devant les droits et les devoirs.
Vous conviendrez avec moi, mes chers collègues, que la mixité et l’égalité entre les hommes et les femmes sont des combats permanents. Il nous appartient à tous, à tous les niveaux, de multiplier les initiatives en sa faveur.
Je rappelle à ce propos l’une des recommandations de la délégation aux droits des femmes et à l’égalité entre les hommes et les femmes, qui met en garde contre l’organisation d’enseignements distincts risquant de reproduire des stéréotypes sexués contre lesquels il convient au contraire de lutter.
Or nous savons tous que, pour réussir le vivre-ensemble, il nous faut intervenir dès l’école, pour casser certains stéréotypes tenaces et apprendre à construire une vie commune. C’est précisément cela que vous remettez en cause avec cet alinéa, madame la secrétaire d'État.
Je vous demande donc, mes chers collègues, d’adopter notre amendement, dont l’objet est de supprimer une disposition qui prive de l’un de ses fondements notre école publique et n’ajoute rien de positif au droit français.