Intervention de Alain Dufaut

Réunion du 8 juillet 2009 à 14h30
Protection pénale de la propriété littéraire et artistique sur internet — Discussion d'un projet de loi en procédure accélérée

Photo de Alain DufautAlain Dufaut :

Bien au contraire, ce projet de loi vise simplement à restaurer l’équilibre actuellement rompu entre deux séries de droits fondamentaux qui doivent être nécessairement conciliés : le droit de propriété et le droit moral des créateurs sur leurs œuvres, d’une part, le droit au respect de la vie privée des internautes, d’autre part.

La liberté n’est-elle pas de pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui ? La seule liberté à laquelle il est mis aujourd'hui fin, c’est celle de se servir abondamment dans le répertoire de nos artistes, sans leur rendre des comptes. Qui peut être contre ?

En effet, les conséquences du piratage de masse sont désastreuses pour l’économie des industries culturelles et, par conséquent, pour toute la création. Je citerai quelques chiffres récents communiqués par le syndicat national de l’édition phonographique : le marché des ventes de CD et de DVD a connu une chute de 18, 5 % pour le seul premier trimestre de 2009. Depuis le début de la crise du disque, voilà sept ans, ce marché a été divisé par trois, mes chers collègues !

Or cette chute est loin d’être compensée par les ventes numériques légales – internet et téléphonie mobile –, qui ne représentent que 15 % du total des ventes musicales. Si l’on veut que les offres légales progressent, il faut donc stopper le piratage ou y mettre un frein important.

La lutte sera essentiellement préventive et pédagogique. Selon un sondage IPSOS réalisé en 2008 et une étude du même type menée au Royaume-Uni, 90 % des personnes interrogées cessent de « pirater » après deux avertissements successifs.

Le rapporteur l’a souligné, ce projet de loi tend à restaurer la crédibilité de la sanction dans l’esprit des internautes. Le dispositif est, j’y insiste, particulièrement dissuasif, ce qui devrait limiter considérablement les contentieux. Pour les réfractaires, est prévue la possibilité de recourir aux ordonnances pénales et au juge unique. Le déroulement de la procédure judiciaire est ainsi facilité et gagnera en rapidité. Comme il est indiqué dans l’étude d’impact préalable, les conséquences budgétaires en seront limitées d’autant.

L’étude conclut que le système de sanctions prévu par le projet de loi évitera aussi bien la « criminalisation » des pirates ordinaires que l’engorgement des services d’enquête et des tribunaux.

Je tiens à souligner que la commission de la culture a adopté plusieurs amendements visant à perfectionner le dispositif. Elle propose ainsi de clarifier la situation du titulaire de l’abonnement à internet « négligent » n’ayant pas protégé suffisamment son accès. Celui-ci sera averti par courrier recommandé préalablement à toute sanction.

Par ailleurs, la commission souhaite éviter des sanctions disproportionnées : elle propose en particulier que le fraudeur qui se réabonnerait malgré la décision de suspension ne puisse encourir une peine d’emprisonnement.

J’adhère également aux garanties proposées pour protéger la vie privée, notamment l’effacement des données personnelles une fois la période de suspension de l’abonnement terminée. Un amendement prévoit que la sanction de suspension en cas de négligence ne soit pas inscrite au bulletin n° 3 du casier judiciaire, accessible aux employeurs, ce qui est une très bonne chose.

Notre rapporteur, Michel Thiollière, qui s’est beaucoup investi dans l’étude de la loi HADOPI, …

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