Intervention de Éric Woerth

Réunion du 19 novembre 2009 à 11h00
Loi de finances pour 2010 — Discussion d'un projet de loi

Éric Woerth, ministre :

Nous avons réussi l’examen de passage de 2009 : celui de la gestion de crise et du plan de relance !

Cependant, si rien n’est assuré et que la situation en matière d’emploi n’est pas satisfaisante, je considère que notre gestion de l’année 2009 a prouvé son efficacité et son équilibre. Les décisions du Gouvernement ont largement permis de soutenir la consommation.

Nos mesures ont permis de limiter la contraction de l’investissement.

Les mesures de sauvetage des banques ont été proportionnées et efficaces. Ce soutien a rapporté au contribuable, en 2009, 1, 4 milliard d’euros, qui viennent s’ajouter au budget de l’État.

Bien sûr, le déficit de l’État est sans commune mesure avec celui que nous avions connu les années précédentes : il atteindrait 141 milliards d’euros à la fin de l’année. Mais il faut être très clair, près de 100% de cette dégradation est due à la situation de crise.

Les dépenses « hors relance » sont tenues. Mieux, comme j’aurais l’occasion de vous le montrer lors de l’examen du collectif, elles sont même en diminution, certes légère, par rapport à l’exécution de 2008 et aux dépenses votées en 2009.

Je ne laisserai donc pas caricaturer notre action. Ce sont les recettes qui ont fondu spectaculairement sous l’effet de la crise et non pas les dépenses de tous les jours qui ont explosé !

Entre 2008 et 2009, l’État a perdu 53 milliards d’euros de recettes.

Rien que sur l’impôt sur les sociétés, la baisse est de 30 milliards d’euros, soit quasiment l’ampleur du déficit budgétaire de 2007.

Entre une année normale, qui voit ses recettes fiscales augmenter de 10 milliards à 12 milliards d’euros, et l’année 2009, qui a enregistré une baisse de 53 milliards d’euros, la différence est pratiquement de l’ordre de 65 milliards d’euros, ce qui est une somme absolument gigantesque.

La sphère sociale se trouve dans la même situation.

Là encore, je ne laisserai passer aucune caricature. Le déficit du régime général atteindrait 23, 4 milliards d’euros, mais la moitié de ce déficit est due à la crise. Notons que l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’ONDAM, que vous avez voté sur l’année 2009 sera tenu à 3, 3 % ou à 3, 4 %.

Loin de moi l’idée de dire que nous sommes satisfaits d’un déficit public qui au total dépassera 8 points de PIB. Qui pourrait l’être ?

Cependant, il faut regarder autour de nous, cette dégradation est moins forte en France. Le FMI et la Commission européenne le confirment, la dégradation du déficit public devrait être depuis 2007 de plus de 7 points de PIB pour l’ensemble des pays industrialisés et de plus de 6 points pour l’ensemble des pays de l’Union européenne, contre 5, 5 points pour la France.

Cela signifie deux choses : nous avons obtenu de meilleurs résultats en matière de croissance et notre positionnement relatif en matière de déficit s’est amélioré.

Le résultat est concret. Notre prélèvement sur recettes pour l’Union européenne augmentera. Or, comme il est calé sur les autres, cela prouve que notre situation relative s’est améliorée.

Notre politique budgétaire nous a donc permis d’enrayer la chute de l’activité en 2009 et de terminer l’année avec une récession moindre que prévue. Quoi qu’il en soit, vous le savez, la situation reste extrêmement fragile. Le défi majeur de l’année 2010 sera, bien évidemment, de réussir durablement la sortie de crise.

Réussir la sortie de crise, c’est d’abord faire en sorte que la reprise, aujourd’hui encore fragile, ne casse pas. Cela signifie qu’il faudra porter une grande attention aux conditions dans lesquelles le plan de relance sera retiré.

Ce plan a une vocation temporaire. Pour l’essentiel, les dépenses de relance pour 2009, soit 39 milliards d’euros si l’on inclut les 6, 7 milliards d’euros de prêts aux constructeurs automobiles, ont donc vocation à ne pas être reconduites en 2010. Néanmoins, nous avons décidé qu’un petit nombre d’entre elles seront maintenues, car il serait excessivement dangereux pour la sortie de crise de les stopper brutalement.

Les dépenses de la mission « Plan de relance de l’économie » représenteront donc encore 4, 1 milliards d’euros de crédits en 2010. Elles seront consacrées à deux priorités, l’investissement et l’emploi.

Le budget prévoit, notamment, les crédits nécessaires à la poursuite des mesures exceptionnelles en faveur de l’emploi mises en œuvre dans le cadre du Fonds d’investissement social, le FISO, mais également l’exonération de charges pour les nouvelles embauches dans les petites entreprises.

Le secteur automobile continuera à bénéficier d’un soutien particulier grâce au maintien, en 2010, de la prime à la casse, dont le montant sera néanmoins progressivement réduit.

Au-delà des crédits de la mission « Plan de relance de l’économie » notre vigilance sur la reprise de l’activité nous a conduits à accentuer notre effort en matière de soutien à la trésorerie des entreprises. Nous poursuivrons, au travers du crédit d’impôt recherche, notamment, ce soutien de trésorerie essentiel à l’activité des entreprises.

Tous ces choix, vous le comprendrez, ont été très longuement pesés. Ils ne sont d’ailleurs pas propres à la France. La plupart des grandes économies développées considèrent l’année 2010 comme une année charnière pour réussir la sortie de crise et utilisent leur budget public en conséquence.

Le G 20 a, à cet égard, bien montré le très fort consensus sur les plans de relance.

Ce retrait progressif du plan de relance conduit à une réduction de 25 milliards d’euros du déficit de l’État, qui passera, en 2010, de 141 milliards d’euros à 116 milliards d’euros. Les 16 milliards d’euros qui manquent pour nous permettre de descendre sous la barre symbolique des 100 milliards d’euros nous semblent indispensables pour sécuriser la reprise. Ils correspondent aux mesures de relance maintenues, au crédit d’impôt recherche ou encore à la suppression de la taxe professionnelle en un an qui entraîne un surcoût temporaire.

D’une part, le déficit budgétaire s’améliore ; d’autre part, les comptes sociaux se dégradent en raison de la situation de l’emploi. Ne nous leurrons pas, il nous reste quelques mois difficiles à vivre sur le front du chômage, même si la stabilisation du marché du travail au troisième trimestre s’avère une bonne nouvelle. La situation dégradée du marché du travail pénalise les rentrées de cotisations sociales. En dépit des efforts réalisés pour maîtriser les dépenses de l’assurance maladie, le déficit du régime général continuera donc de se dégrader, pour atteindre 30, 6 milliards d’euros. Le déficit des administrations sociales passera donc de 1, 4 % du PIB en 2009 à 2, 3 % du PIB en 2010.

Au total, l’ensemble des déficits publics devrait atteindre 8, 5 % du PIB en 2010. Mais, comme je l’ai évoqué, la réforme de la taxe professionnelle coûte plus cher…

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