Intervention de François Marc

Réunion du 19 novembre 2009 à 15h00
Loi de finances pour 2010 — Demande de renvoi à la commission

Photo de François MarcFrançois Marc :

À nos yeux, il est inacceptable que la suppression annoncée de la taxe professionnelle s’effectue dans un tel manque de transparence. Il semble que cette réforme contraigne de fait à procéder à de multiples ajustements au cours des mois à venir. Pour reprendre une formule qu’a employée un sénateur de la majorité, je dirai que la « clause de revoyure » ne suffit pas. De nombreuses questions demeurent en effet sans réponse.

En outre, le Sénat ne peut pas se satisfaire des modalités calendaires qui ont été imposées par le Gouvernement. Pourtant, l’inversion du calendrier était une revendication de bon sens ! Le principe de réalité devrait nous conduire à voter d’abord la réforme des collectivités territoriales et, ensuite seulement, celle de la taxe professionnelle. Comment peut-on envisager sérieusement de mener la réforme des moyens avant celle des compétences ? La seconde doit trouver ses fondations dans les choix et principes de la première !

Le travail relatif au volet territorial de la réforme n’est pas achevé ; c’est un fait. C’est même la commission des lois du Sénat qui a souligné cette totale inadaptation dans un communiqué en date du 29 octobre.

Il est clair que le calendrier parlementaire est inapproprié et il est irréaliste de vouloir régler tous les aspects d’une réforme aussi importante dans un laps de temps aussi contraint que celui qui nous est accordé pour la discussion budgétaire.

Vous le savez, au Sénat, il a été décidé de scinder l’article concerné en deux, conformément aux règles de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances. Alors que nous sommes appelés à examiner, en première partie, les règles qui s’appliqueront dès 2010, c’est-à-dire la suppression de la taxe professionnelle pour les entreprises, nous aborderons en seconde partie la réforme des finances locales à partir de 2011.

Il y aura donc obligation de repasser devant le Parlement avant le 30 juin 2010, à l’occasion soit d’un collectif budgétaire, soit d’une loi ordinaire concomitante à la réforme des collectivités territoriales.

Il n’a échappé à personne que ce vote en deux temps répondait à une logique purement politique. Il s’agit de créer une sorte de rideau de fumée pour s’extraire des admonestations de certains soutiens de la majorité. L’objet du dispositif est clair : donner des gages aux sénateurs frondeurs en renvoyant à plus tard les sujets sensibles, faute de simulations et de préparation sérieuse de la réforme.

Le Sénat ne saurait se satisfaire d’un tel petit « arrangement entre amis ».

Changer les règles en cours de route, voilà un étonnant message envoyé aux Français sur le mode de fonctionnement du Parlement ! Celui-ci ne peut pas se contenter de se prononcer sur le seul volet « entreprises » de la réforme. Il est indispensable d’indiquer précisément aux élus, dès l’examen du projet de loi de finances pour 2010, sur quelles recettes de substitution ils pourront compter pour mener à bien leurs projets locaux.

Je l’ai dit, l’impréparation de ce texte est patente ! L’improvisation du Gouvernement et la confusion de la majorité règnent depuis le début de la discussion budgétaire au Parlement.

Il est à noter que, sur la taxe professionnelle, seule la voix de Bercy a été entendue. Nous n’avons jamais entendu le point de vue du ministère de l'intérieur, curieusement absent de ce débat alors qu’il a la responsabilité des collectivités territoriales. Le manque d’investissement du ministre de l'intérieur est d’autant plus déroutant qu’il s’agit de mettre en œuvre une promesse électorale de son ami le Président de la République !

Les conditions d’examen parlementaire de la réforme illustrent également les dysfonctionnements du parlementarisme et les dérives du quinquennat. La promesse présidentielle de suppression de la taxe professionnelle aboutit à démanteler certains acquis de la décentralisation pour tenter de mieux régenter les collectivités territoriales.

Au fond, ces arguments majeurs sur l’improvisation coupable du Gouvernement sont, à eux seuls, déjà suffisants pour justifier un retour en commission, afin d’examiner le projet de loi de finances de manière beaucoup plus approfondie.

Encore une fois, monsieur le rapporteur général, je ne critique pas le travail qui a été effectué par la commission.

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