Intervention de Marie-France Beaufils

Réunion du 19 novembre 2009 à 22h15
Loi de finances pour 2010 — Débat général sur les recettes des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle

Photo de Marie-France BeaufilsMarie-France Beaufils :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, on ne peut comprendre le projet de suppression de la taxe professionnelle sans le situer dans le contexte du projet politique, du projet de société, mis en œuvre par le Président de la République en lien étroit avec les politiques libérales européennes.

Comme le disait Denis Kessler, ex-numéro deux du MEDEF, en 2007 « Le modèle social français est le pur produit du Conseil national de la Résistance. Un compromis entre gaullistes et communistes. Il est grand temps de le réformer, et le gouvernement s’y emploie ».

Ce sont bien toutes ces innovations à la base des politiques de solidarité qui gênent le pouvoir en place et le MEDEF, y compris le nouveau secteur public que l’ensemble des collectivités locales ont développé avec la décentralisation au cours des dernières années.

Communes, départements et régions deviennent aujourd’hui un obstacle à la croissance du capitalisme dans des secteurs où celui-ci voudrait trouver de nouvelles ressources.

Le transfert des services au secteur privé devient une nécessité pour que le monde des actionnaires puisse engranger des dividendes supplémentaires.

Les services publics nationaux, comme La Poste, sont dans le collimateur de ce gouvernement, mais les services publics locaux ne sont pas non plus épargnés.

La politique libérale menée frise la caricature. Le bouclier fiscal en est un symbole. Aujourd’hui, elle s’enfonce un peu plus dans cette voie avec la suppression de la taxe professionnelle, un nouveau bouclier fiscal qui touche la contribution fiscale des entreprises à la vie locale et au dynamisme de nos territoires.

Toutes ces politiques aggravent les conditions de vie et de travail d’une très large majorité de nos concitoyens. La suppression de la taxe professionnelle aura un effet direct, avec la baisse des investissements des collectivités locales et au travers des différents marchés publics, sur les quelque 800 000 emplois du secteur privé qui, chaque année, sont maintenus ou créés grâce à cette activité.

La pression financière aura pour finalité la mise sous tutelle des collectivités, l’État leur dictant ainsi les choix qu’elles doivent réaliser. On peut se demander alors à quoi pourront bien servir les élections, les projets ne seront même plus élaborés avec les citoyens.

La suppression des services publics entraînera des difficultés supplémentaires pour les habitants, sans parler des emplois publics qui disparaîtront eux aussi. Ce n’est pourtant pas le moment !

Dans l’édition 2009 de « France, portrait social », l’INSEE dresse un tableau très inquiétant de la situation de l’emploi. Et 2010 sera pire. Où sont passées les envolées lyriques du candidat Sarkozy sur la valeur travail, sur les revenus trop bas et qu’est devenue sa formule « travailler plus pour gagner plus » ?

Après les 100 000 pertes d’emplois enregistrées en 2008, le recul s’est amplifié au premier semestre 2009, avec plus de 270 000 pertes d’emplois. L’INSEE voit des perspectives très médiocres pour l’avenir à court terme : « Le nombre de chômeurs augmente […] de presque 30 % en un an et demi ». Le nombre de personnes touchées par le chômage partiel a été multiplié par dix en un an et atteint aujourd'hui 320 000 personnes.

De plus, les inégalités salariales s’amplifient de façon inquiétante. L’écart s’est accentué au cours de la dernière période puisque les très hauts salaires ont gagné 8, 5 fois le salaire médian en 2007, contre 6, 6 % en 1996.

Ces inégalités ne sont pas le fruit du hasard, pas plus qu’elles ne sont une fatalité. C’est votre politique qui en est responsable. La suppression de la taxe professionnelle va participer à cette politique inégalitaire.

L’accélération de ce que vous appelez « réformes » ressemble à une tornade dévastant tout sur son passage. Tout ce qui fonde les principes solidaires et tout ce qui reste d’eux dans notre pays est jeté à bas.

Les derniers chiffres confirment que les profits des banques et des assurances vont être multipliés par quatre en 2009 grâce au soutien sans contrepartie que vous avez accordé à ce secteur.

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