Intervention de Alain Chatillon

Réunion du 19 novembre 2009 à 22h15
Loi de finances pour 2010 — Débat général sur les recettes des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle

Photo de Alain ChatillonAlain Chatillon :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, l’organisation prioritaire d’un débat sur les recettes des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle, immédiatement après la discussion générale sur le projet de loi de finances pour 2010, nous place directement au cœur des préoccupations des élus alors que s’achève le congrès de l’Association des maires de France.

Nous nous félicitons de ce qu’un accord ait été trouvé pour séparer le vote de la fin de la taxe professionnelle pour les entreprises du financement des collectivités territoriales, dont nous débattrons ultérieurement.

De même, nous sommes heureux que le président de notre groupe ait accepté qu’un amendement fixe une période probatoire avant l’adoption définitive du texte : la simulation, l’évaluation et la correction des données sont indispensables.

J’organiserai mon propos autour de deux grands axes : la fiscalité des entreprises et les ressources des collectivités territoriales. Ces deux thèmes correspondent aux deux temps de la réforme, telle qu’elle a été récemment redéfinie par le Gouvernement.

Nous examinerons donc dès à présent la suppression proprement dite de la taxe professionnelle et son remplacement par deux nouvelles cotisations pour les entreprises, tandis que le débat sur la compensation transitoire pour les collectivités en 2010 est reporté au mois de décembre.

La réforme de la taxe professionnelle ne sera définitive qu’après la réforme des collectivités et de leurs compétences, ce qui n’est que bon sens. Avec nombre de mes collègues, nous attendions ces décisions logiques et indispensables.

Permettez-moi de faire quelques remarques en tant que chef d’entreprise.

Pour les entreprises, la réforme de la taxe professionnelle doit permettre un allégement de charges d’environ 4, 3 milliards d’euros. Il est nécessaire de maintenir ce niveau d’allégement pour que la réforme contribue à l’amélioration de la compétitivité de l’économie française. Mais je tiens à souligner que la taxe professionnelle n’est que l’un des éléments du parcours en faveur de la compétitivité des entreprises ; ce n’est pas l’essentiel pour éviter le risque de délocalisation.

Il y a quelques mois, Carlos Ghosn, patron ô combien ! emblématique, indiquait que la problématique de son entreprise pour la production d’un nouveau modèle était un écart de 1 400 euros par voiture, selon qu’elle était fabriquée en France ou dans un pays de l’est de l’Union européenne : 240 euros sont liés à la taxe professionnelle et 1 160 euros aux charges sociales.

Depuis l’après-guerre, la France a fait le choix de faire supporter l’excès de charges sociales et fiscales par les entreprises en plombant leur croissance.

Il faut savoir que l’autofinancement des entreprises françaises représente à peine la moitié de celui des entreprises allemandes et britanniques, soit un manque de 120 milliards d’euros.

Les prélèvements obligatoires, par rapport au PIB, s’établissent ainsi à 44 % pour les entreprises françaises, à 37 % pour les entreprises britanniques et à 36 % pour les entreprises allemandes.

Comme vous le voyez, contrairement à certaines idées reçues, ce sont les entreprises et non pas les ménages qui assurent l’essentiel des prélèvements supplémentaires français. Voilà pourquoi, depuis un demi-siècle, nos entreprises n’ont pas la croissance de leurs voisins. Voilà pourquoi nous avons un parc d’entreprises vieillissant et atteint de nanisme.

On n’échappera pas, si l’on veut rétablir la compétitivité de nos entreprises, à une opération vérité sur les charges sociales. Le président Jean Arthuis avait évoqué la solution de la TVA sociale, que je reprends à mon compte.

Pour en revenir à la réforme de la taxe professionnelle pour les entreprises, je m’inquiète de la suppression du lien entre le taux de la cotisation foncière des entreprises, qui est basée sur les valeurs locatives foncières, et le taux des impôts locaux des ménages. Or ce lien est un élément indispensable de la réforme, destiné à éviter le renouvellement des conséquences de la déliaison des taux de la taxe professionnelle qui a conduit, dans un passé récent, à des augmentations substantielles de l’imposition locale des entreprises. Dans ce cas, on ne peut parler de compétitivité !

Si la possibilité pour les collectivités locales d’augmenter plus fortement les taux sur les entreprises était maintenue, l’allègement procuré par la réforme serait réduit dès 2010 et conduirait rapidement à effacer les effets de cette réforme.

En abordant le deuxième point de mon intervention, les recettes des collectivités territoriales, je tiens ici à réaffirmer solennellement mon attachement au principe de la décentralisation et à son corollaire, l’autonomie financière de nos collectivités locales.

J’ai, bien entendu, écouté avec attention le Premier ministre il y a deux jours et j’ai pris bonne note de ses propos rassurants quant à l’éligibilité au Fonds de compensation de la TVA des investissements 2009 non réalisés à la fin de cette année, la reconduction en 2010 du remboursement du FCTVA, la compensation intégrale de la taxe carbone versée par les collectivités, avec la création d’un fonds géré par l’ADEME, et l’appui aux territoires ruraux pour la couverture numérique à 100 %. Mais ces mesures conjoncturelles ne doivent pas nous faire oublier l’essentiel.

Pour le bloc communal – j’ai procédé à des simulations dans mon secteur –, il faut absolument maintenir le lien avec les entreprises et continuer à voter localement les quatre taxes, notamment la cotisation locale d’activité et la cotisation complémentaire sur la valeur ajoutée.

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