Intervention de Hervé Maurey

Réunion du 19 novembre 2009 à 22h15
Loi de finances pour 2010 — Débat général sur les recettes des collectivités territoriales et la suppression de la taxe professionnelle

Photo de Hervé MaureyHervé Maurey :

Monsieur le président, madame la ministre, monsieur le ministre, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur général, mes chers collègues, la suppression de la taxe professionnelle est assurément la mesure emblématique de cette loi de finances. Nous sommes à peu près tous convaincus, sur l’ensemble des travées de cette assemblée, de son bien-fondé.

La taxe professionnelle avait été qualifiée d’« impôt imbécile » par le Président François Mitterrand il y a plus de vingt-cinq ans. Elle a été réformée vingt fois en trente-cinq ans sans que personne ait eu le courage d’aller au-delà.

En cette période de crise économique, cet impôt est particulièrement malvenu puisqu’il pénalise l’investissement, donc la compétitivité. Le Président de la République et le Gouvernement ont donc raison de vouloir sa suppression, même si celle-ci ne réglera pas par enchantement les difficultés que rencontre l’économie française.

Par conséquent, ce n’est pas la suppression de la taxe professionnelle qui pose problème : c’est la perte de recettes – 22, 6 milliards d’euros – qu’elle engendre pour les collectivités. La taxe professionnelle représente, vous le savez, la moitié des recettes fiscales des communes ; ce n’est donc pas une recette négligeable.

Par ailleurs, force est de reconnaître qu’en annonçant la suppression de la taxe professionnelle en février dernier sans préciser par quel dispositif elle serait remplacée, le Président de la République a créé une immense inquiétude parmi les élus de droite, de gauche et du centre. Or cette inquiétude n’est pas levée, comme l’a montré le congrès de l’Association des maires de France cette semaine.

Il a en effet fallu attendre le mois d’août pour connaître les propositions du Gouvernement, que l’Assemblée nationale a été conduite à modifier fortement, dans le bon sens, me semble-t-il, en donnant une part de la cotisation complémentaire aux communes et en territorialisant cet impôt.

Le dispositif peut-il pour autant être voté maintenant, ou dans quelques jours à l’occasion de la seconde partie de la loi de finances, comme on semble désormais nous le proposer ? Très honnêtement, je ne le crois pas. Pour une raison très simple : personne ne mesure l’impact du dispositif proposé sur nos territoires ; nous ne le connaissons pas pour 2011 et encore moins au-delà.

Est-il envisagé, par exemple, d’indexer les dotations de compensation, qui représentent 4 milliards d’euros, sur l’évolution des autres dotations, dont la hausse de 0, 6 % demeure très inférieure à celle des charges, surtout celles qui sont transférées par l’État?

Quelles seront les conséquences sur les finances des collectivités territoriales d’un impôt assis sur la valeur ajoutée et dont l’assiette est, par définition, susceptible de varier fortement ?

Le seuil de 500 000 euros ne défavorisera-t-il pas, une fois de plus, les territoires ruraux qui disposent de petites entreprises?

Est-il logique que le taux d’un impôt sur la valeur ajoutée soit fonction du chiffre d’affaires, et non de la valeur ajoutée ? Pourquoi ne pas appliquer un taux unique, quelle que soit l’entreprise ?

La répartition actuelle de la cotisation complémentaire entre les différentes collectivités est-elle pertinente ou doit-elle être modifiée ?

Le curseur entre territorialisation et mutualisation est-il bien positionné ?

Surtout, qui financera, au final, le coût de la réforme ?

Mme la ministre nous a dit l’autre jour que l’État financerait cette réforme. Mais, compte tenu de l’ampleur des déficits publics, il y a fort à parier que le coût de la réforme pèsera, en définitive, soit sur les entreprises, soit sur les ménages, soit sur les collectivités.

N’y a-t-il pas, en réalité, une volonté d’encadrer les ressources des collectivités territoriales pour maîtriser leurs dépenses, dont le Gouvernement ne manque pas de souligner la trop forte évolution ? Nous sommes nombreux à nous poser cette question.

En augmentant la part des dotations, ne veut-on pas réduire l’autonomie financière des collectivités locales et, plus généralement, leur autonomie ? Si tel était le cas, il vaudrait mieux nous le dire franchement et courageusement!

De nombreuses questions se posent encore, et nous ne pouvons pas, nous qui représentons les territoires, voter à l’aveuglette. Je fais partie de ceux qui pensent que la logique aurait été de se pencher sur les ressources des collectivités après avoir modifié leurs compétences, et non l’inverse.

Je crois également que c’est l’ensemble de notre fiscalité locale qui doit être revue, notamment la DGF, afin d’en faire un instrument de péréquation efficace et réel.

J’observe que lorsqu’on interroge les services de l’État pour savoir comment est calculée la DGF et pourquoi l’on perçoit telle somme, personne n’est capable de répondre, ce qui montre bien la nécessité de la réforme.

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