Intervention de Charles Gautier

Réunion du 5 décembre 2007 à 15h30
Loi de finances pour 2008 — Sécurité

Photo de Charles GautierCharles Gautier :

Madame le ministre, lors de votre audition par la commission des lois, vous avez indiqué que les priorités de votre ministère allaient aux investissements plutôt qu'aux personnels. Vous insistez depuis plusieurs mois sur les moyens techniques dont il faut doter les services de maintien de l'ordre.

Certes, les caméras de vidéosurveillance, les technologies modernes sont indispensables dans un État moderne et réactif à toute menace intérieure ou extérieure. Pourtant, que constate-t-on aujourd'hui ? Un fossé s'est creusé depuis 2002 entre les habitants de certains quartiers, notamment les jeunes, et les forces de l'ordre. Le lien entre eux, que le gouvernement de Lionel Jospin avait réussi à renouer lentement, grâce à la mise en place de la police de proximité, vous l'avez brisé net !

Bien sûr, madame le ministre, vous me répondrez encore que la police n'est pas faite pour jouer au football avec les jeunes de banlieue... Mais cette réponse vous sert surtout à nier la réalité. Et cette réalité, c'est que l'instauration d'une police de proximité avait permis de renouer des liens sociaux, d'humaniser ces quartiers, d'y replacer l'État et ses représentants à visage humain.

Les nouvelles répartitions des effectifs de police ne privilégient plus ces quartiers, alors que ce sont eux qui en ont le plus besoin. Au contraire, lorsque s'y déroule un nouvel événement, vous y envoyez les CRS, qui ne connaissent ni le terrain ni les habitants. De cette manière, vous creusez encore le fossé entre les plus faibles et l'État.

L'escalade des violences depuis 2002 démontre bien l'échec de votre politique en matière de sécurité. Pis, cela démontre le danger que cette politique représente.

Aux quartiers riches, les rondes policières nocturnes, aux quartiers pauvres, les CRS !

Loin de moi l'idée de jeter le discrédit sur les compagnies républicaines de sécurité ou sur les gendarmes mobiles. Ils remplissent toujours de façon efficace et courageuse leur mission de maintien de l'ordre public. Néanmoins, la réorientation de leurs missions vers des actions de lutte contre la délinquance et contre l'insécurité semble douteuse. Elle constitue, en fait, une mesure de gestion des effectifs pour réaliser des économies d'échelle.

Progressivement, ces forces mobiles sont devenues des forces d'appoint pérennes et non plus ponctuelles aux unités de base de la police et de la gendarmerie. Elles les aident en matière de sécurité publique, notamment dans la lutte contre les violences urbaines, et pour les interventions nocturnes. La dernière expérience est un échec : leur intervention à Villiers-le-Bel a fini par prendre la forme d'un véritable traquenard à leur encontre, allant même jusqu'à les contraindre à se replier pour protéger leur matériel contre le vol !

Dans ce contexte, au vu des résultats et de la tension permanente qui règne dans les quartiers difficiles, le débat sur le format et la formation adéquats des forces mobiles est plus que d'actualité. L'intervention des forces mobiles dans ces conditions ne poserait-elle pas plus de problèmes qu'elle n'est censée en résoudre ?

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